L'héritage

Chapitre 22 : Analyses complémentaires

Ewen et Maggie se rendirent dans les locaux de la morgue de Jouville où Bastien leur avait donné rendez-vous. En attendant que le médecin se libère, ils attendirent dans une salle d'attente impersonnelle et aussi froide que les cadavres autopsiés dans ce lieu.

Dans cette même salle d'attente, un couple attendait, blottis l'un contre l'autre, effondrés. Ils devaient avoir une cinquantaine d'années. Maggie les imaginait sans mal pleurant la perte de leur enfant mort d'un accident de la route ou d'un suicide. C'était fréquent ici. Et rien ni personne ne pourrait le ramener à la vie, jamais. Il était devenu une statistique de plus.

François Rieur, le médecin légiste en chef, vint les chercher. Il fit un signe de tête à l'adresse des détectives, puis il emmena le couple avec lui. L'homme et la femme le suivirent docilement. Ils étaient déjà cassés et, avec ce que François allait leur apprendre, ils seraient sûrement brisés en de millions de morceaux irréparables. Il allait leur décrire froidement comment la personne qu'ils chérissaient avait été emmenée dans un autre monde.

Puis ces gens rentreraient chez eux, avec sûrement l'envie d'aller rejoindre l'être aimé et perdu. S'ils avaient suffisamment de soutien autour d'eux, ils retrouveront petit à petit leur élan vital. La vie reprendrait son cours, avec un manque qu'ils ne parviendront jamais à combler.

Alors que les deux détectives étaient plongés dans leurs pensées morbides, Bastien fit son apparition dans la pièce. Il marqua un temps d'arrêt en voyant les mines graves de sa sœur et son collègue.

« —Il y a un problème ? demanda ce dernier en conservant un sang-froid à toute épreuve.

—Non non, lui répondirent les détectives en chœur.

—Je crois qu'on a fait preuve d'un peu trop d'empathie envers le couple qui vient de suivre François, expliqua Ewen en jetant un coup d'œil à sa collègue afin qu'elle valide ou non ses dires.

—C'est exactement ça, ajouta Maggie qui retrouvait sa joie de vivre.

—Au moins vous restez humains, soupira Bastien. J'ai l'impression que ça se perd ici. Tous les anciens ont l'air d'être aussi froids et durs que du béton armé. Surtout, ne me laissez jamais devenir comme eux. »

Ewen et Maggie le lui promirent, puis les trois individus se rendirent dans le bureau du jeune médecin légiste. La pièce était très épurée et une ambiance zen entourait le local grâce notamment à des tableaux représentant des paysages en pleine nature, ainsi que deux petits bambous posés sur une étagère remplie de livres de médecine.

Maggie se rendit compte que c'était la première fois qu'elle venait dans le bureau de son frère et, bien qu'elle savait qu'il était de nature plutôt calme, elle ignorait qu'il aimait ce genre d'atmosphère. Bastien la vit s'attarder avec curiosité sur sa table d'auscultation et le paravent.

« —Je n'autopsie pas que des cadavres, lui précisa-t-il. J'ai aussi pour mission de faire des expertises sur des vivants. En cas de maltraitances par exemple.

—C'est pas forcément plus gai, lança Ewen.

—Heureusement qu'il y a toujours des volontaires pour faire ce métier. »

Bastien proposa ensuite eux deux détectives de prendre place sur les chaises devant son bureau. Une petite fontaine, posée sur ce même meuble, produisait un son agréable tout en étant une plaisante distraction pour les yeux.

Le médecin se passa une main dans ses cheveux bouclés en soupirant avant de se lancer :

« —Bon ! Par quoi commencer ?

—Par nous expliquer pourquoi c'est toi qui reprend le dossier ? hasarda Ewen.

—Oui ! François a trop de travail alors il s'est déchargé de cette mission sur moi. Maintenant que les analyses principales ont été faites, il devait passer à autre chose de plus... actuel. »