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1960

Carlos se souvenait parfaitement de ce jour. Le jour où il avait rencontré Amelia. Cela faisait presque deux ans qu'il était arrivé au Brésil. Cela faisait presque deux ans qu'il avait commencé une nouvelle vie. Une vie bien plus belle qu'il n'aurait pu se l'imaginer. Perchée sur les collines de Rio de Janeiro, la maison du Senhor lui semblait être un vrai palais. Derrière ses poutres blanches, ses balcons et ses grandes fenêtres, elle renfermait presque toute la forêt amazonienne. Dans ce petit écrin de paradis, Carlos était heureux. Heureux surtout d'avoir enfin trouvé un ami. Car Senhor Borboleta n'était pas seulement celui avec qui il parlait du matin au soir de papillons. Senhor Borboleta c'était presque son père… Heureux donc, Carlos n'attendait rien de plus. Il se forçait à ne pas penser à son village, au Portugal, à son passé pour ne pas le laisser assombrir son bonheur. Bonheur qui, sans qu'il s'y attende, allait grandir encore…

Elle était arrivée un beau matin de printemps, une fleur au milieu de la forêt verdoyante, avec sa robe rose, ses cheveux blonds et ses yeux verts. Amelia avait son âge. C'était la nièce de Senhor Borboleta, la fille de sa sœur. Son père, fils d'un simple commerçant portugais, avait fait fortune et avait décidé de s'installer avec sa famille sur les côtes brésiliennes où il espérait prospérer encore davantage. Senhor Borboleta était aux anges. Il ne s'était jamais vraiment entendu avec sa sœur, encore moins avec son beau-frère. Mais il adorait Amelia. Et Amelia l'adorait. La maison Borboleta devint rapidement son refuge durant les chaudes après-midi d'été. Elle arrivait, toujours la même, avec sa robe de soi ou de satin et rejoignait son oncle et Carlos dans la bibliothèque. Elle s'intéressait alors avec sa douce voix et ses yeux pétillants à toutes leurs recherches. Elle aimait particulièrement les dessins que Carlos faisait à l'encre et à l'aquarelle sur des feuilles épaisses. Elle restait des fois de longues minutes à les contempler, rêveuse. Amelia n'était pas une scientifique. C'était plutôt une poète, une artiste. Elle aimait ce qui était beau. Elle posait parfois quelques questions comme pour mieux s'envoler avec les papillons. Ou alors elle s'asseyait près de la fenêtre avec un livre en latin, en français, en anglais, peu lui importait.
Pour Carlos, Amelia était une nouvelle personne dans cette vie merveilleuse. D'abord un être intriguant, puis finalement une amie. Et avec le temps, quelque chose d'autre avait germé. Jusqu'au jour où, au milieu du jardin, la rose enfin s'était ouverte, de sa belle couleur vermeille.

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