Aliénor
L'école était en ébullition. Les vacances approchaient à grands pas, l'échéance pour le concours d'art aussi, par conséquent. Mais ce qui animait surtout l'école, c'était l'annonce du bal de rentrée. Il y en avait un à chaque reprise, mais était prévu bien avant pour laisser au comité d'élèves le temps de l'organiser. Emiliane y avait trainé Aliénor dès la première occasion , au début de leur scolarité ici. Le thème de ce bal serait le XVIIIe siècle. Cela avait suscité un grand enthousiasme, et un élan d'énergie créative de la part d'Emiliane et d'Aliénor, au désespoir d'Aaron et Cyrielle. Elles se retrouvèrent environ une demi-heure avant l'heure de la réunion prévue dans la salle de bal, qui avait été conservée quasiment à l'identique depuis son utilisation par les d'Alverny. Le pôle décoration aurait peu de travail pour ce bal.
Aliénor se rappelait d'une fois où les peintres, les sculpteurs et les chargés des décors du théâtre avaient, le temps d'une soirée, arrangé la salle pour qu'elle semble toute droite sortie du Moyen-Age. Maintenant, elle aurait adoré savoir ce que Gabriel et Danaë en auraient pensé. En parlant d'eux, ils traversèrent les murs, arrivant dans la salle. Aliénor ne s'y habituerait jamais.
- Tu souhaitais nous voir ? demanda Gabriel à Emiliane.
- Bien sûr ! C'est un bal sur le thème de votre siècle, on va avoir besoin de l'aide de nos contemporains préférés, répondit-elle sur un ton plein d'enthousiasme.
- Alors laissez moi vous dire que les d'Alverny aimaient voir les choses en grand. Mais je ne suis pas le mieux placé pour vous en parler.
Il lança un regard entendu à Danaë, qui sembla hésiter avant de s'ouvrir. Aliénor n'avait que très peu échangé avec Danaë jusqu'ici, mais ça avait suffi à comprendre qu'elle était une personne très secrète. Mais elle finit par parler, un air nostalgique dans la voix.
- Mère adorait recevoir du monde. C'était un rayon de soleil dans la maison. Elle parvenait à se faire apprécier même des hommes les plus austères. C'est elle qui a assuré la réputation de notre famille d'organiser des réceptions somptueuses, elle avait le goût des choses bien faites.
Danaë se déplaça jusqu'à un coin de la pièce, non loin de la piste de danse. Elle marchait ici comme si l'école lui appartenait encore.
- L'orchestre se tenait toujours ici. Nous avions embauché un quatuor à cordes sur une base récurrente, nous avions parfois des joueurs de flûte, et de harpe exceptionnellement. Après le décès de Mère, ils ont continué à venir. Je pense qu'ils étaient tous attachés à elle, et à raison.
Puis elle s'avança au milieu de la salle, tournant sur elle-même pour leur désigner l'espace dédié à la danse.
- Ici, on dansait. La piste n'était jamais vide. Mère y tenait énormément, alors encore plus que par tradition, nous dansions en son honneur. Elle aurait adoré te voir faire d'ailleurs, dit-elle à Gabriel. Elle t'aurait beaucoup apprécié.
Danaë souriait en parlant. Aliénor lui trouvait une certaine tendresse dans la voix, alors que les souvenirs semblaient vivides dans son esprit. Elle ne l'avait jamais entendue parler autant, et elle comprenait maintenant que Danaë avait du être très attachée à sa mère, mais qu'elle avait dû mourir avant qu'ils ne deviennent tous des fantômes. C'était horrible, pensa Aliénor.
- Il n'est sans doute pas trop tard pour lui rendre hommage, répondit Gabriel.
Si Aliénor ne comprit pas tout de suite ce qu'il insinuait, Danaë, elle, acquiesça d'un signe de tête. Il lui prit la main et ils se dirigèrent vers le centre de la piste d'un air entendu. Aliénor ne savait pas que les fantômes pouvaient se toucher entre eux.
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Haunted School
RomanceCe n'était qu'un accident. Une erreur de parcours. Aliénor ne croyait même pas aux fantômes. Alors pourquoi ? Pourquoi avait-elle décidé d'aider Gabriel ? Pourquoi lui avait-il demandé de tuer un fantôme ? Au début, Gabriel et Aliénor n'étaient qu'u...