Chapitre 38 - Une idée lumineuse

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Le pisse-debout fait un grand effet à Mei. Je ne sais même pas pourquoi je suis étonnée.

— Je trouve ça classe ! s'exclame-t-elle. Oh mon Dieu, je n'arrête pas de boire juste pour avoir envie d'y retourner ! Attends ! Je sens que ça vient, j'y vais !

— Tu es complètement tarée, réplique Sam en grimaçant. Je trouve ça tellement... malaisant ! Et pour... enfin... si c'est la grosse commission ?

— Ah oui, tiens ! reprend Mei. Pour le caca, ça se passe comment ? Je suis sûre que ça va me plaire.

— Regardez, à côté du bouton d'évacuation, il y a ce petit levier. Hop ! Ça tourne ! Et voilà le parfait attirail pour déféquer de manière totalement hygiénique et confortable ! Les selcyns recyclent différemment l'urine et les excréments, il y a donc deux systèmes distincts.

— Ils recyclent l'urine ? demande Sam en regardant avec suspicion le trou dans le mur se refermer. J'espère qu'ils ne nous la font pas boire !

— Ça doit bien finir par revenir dans la boucle à un moment, rie Mei. Hey, vous croyez que le pipi de selcyn a des vertus aphrodisiaques ?

Un bruit dans le couloir me fait sursauter, coupant net ma bonne humeur durement retrouvée. Je m'éloigne vers la douche sous le regard surpris de Mei. Luttant pour calmer mon angoisse, je longe le mur transparent pour me tenir le plus loin possible de l'entrée. De là où je me trouve, j'ai une vue sur toute la pièce. Elle est, à peu de chose près, identique à ma chambre sur Tavira. À peine plus petite, il manque les livres et le dressing fourni. Et les ustensiles de cuisine que j'avais, jour après jour, réquisitionnés. Les murs sont d'un blanc sans nuance, la table métallique longue et fine est plaquée contre la paroi de la même manière qu'à Tavira. Le couchage se résume à un immense matelas calé dans une cavité à même le sol, en plein milieu de la pièce. Et ici aussi, pas besoin de fenêtre puisque tout un pan de mur est transparent. La vue extérieure est d'ailleurs à couper le souffle : à côté de la base, un lac immense d'un bleu sombre s'étale fièrement jusqu'aux pieds de montagnes aux sommets enneigés. Les Alpes européennes. Le ciel azur du jour me permet de distinguer toutes les nuances de couleur des forêts poussant sur les flancs des hauts massifs. Je me sens si petite. Nouveau bruit, je me plaque un peu plus contre le mur.

— Ce n'est rien, murmure Sam. Juste quelqu'un qui passe.

— J'ai participé à ta capture, souffle Mei en baissant les yeux. Je t'ai assommée de médocs pour te livrer à ce monstre. Tu en ressors très marquée, je le vois bien, tu as l'air terrorisée. Si j'avais su... ce qu'il t'a fait est juste...

— Inhumain, complète Sam.

— Je vais m'en remettre, les rassuré-je en essayant de retrouver une certaine contenance.

— Tu bondis au plafond au moindre bruit ! se désespère Mei. Ce n'est pas un reproche, ma Lily. Tu as passé plus de trente heures avec un fou furieux, je me doute que ce n'est pas une situation qui laisse indemne. Seulement, je m'en veux tellement.

— Hafid n'aurait jamais laissé un tel comportement impuni, soupire Sam, les yeux brillants de larmes contenues. Ni le Maréchal Silva. S'il savait, il ferait tout pour stopper le Général Muzhi et les onze Faraday rebelles. C'est un homme bien. Mon beau-père le porte... portait en haute estime.

— Ouais, mais on se retrouve le cul entre deux chaises, fait Mei en grimaçant. Nous avons des alliés et des ennemis dans les deux camps.

— Attends ! m'écrié-je en sentant une idée s'imposer à moi. Tu as raison, Sam... si le maréchal avait connaissance de la menace des onze, je suis prête à parier qu'il déploierait tous les moyens en sa possession pour empêcher une guerre nucléaire.

Corps étrangers [TERMINÉ] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant