Chapitre 20

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Samedi, 08 avril 2023.

Douala, Cameroun.

*** Lynn Djandjo ***

Il est déjà huit heures passées, lorsque  ma conversation téléphonique avec Guillaume prend fin. Ayant passé toute la soirée de la veille ici à l'hôpital, il a tenu à s'assurer que j'aie passé une belle nuit. C'est toujours aussi plaisant de lui parler et de me faire chouchouter. Je ne suis pas habituée à tant de marques d'attention, alors il est normal que je sois si flattée. L'ayant eu pour compagnie, la soirée d'hier a été plutôt reposante. J'étais plus calme et plus optimiste en ce qui concerne l'état de mon fils. Cependant, je n'ai pas arrêté de demander des informations auprès des médecins pour savoir quand il se réveillera, mais rien. Nous devons juste être patients, ont-ils dit.

Ayant raccroché, je me retourne pour jeter un coup d'œil à l'intérieur de cette chambre VIP que nous a trouvée Guillaume, mais mon regard se pose sur un visage que je n'aurais pas souhaité revoir de si tôt. Flore.

— Qu'est-ce que tu fais là ? Lui demandé-je aussitôt.

Alors que je suis encore sous le choc, elle s'avance et me prend dans ses bras, sans que je ne m'y attende. Je n'ai même pas le temps de la regarder entièrement, ni de comprendre pourquoi elle se trouve là. Surprise, je reste de marbre pendant qu'elle me serre affectueusement. Ma cousine semble avoir oublié que nous ne sommes plus aussi amies qu'il y a vingt ans.

— Qu'est-ce que tu fais là ? Je lui demande encore d'une voix qui se veut ferme, mais c'est sans compter sur mon idiote de conscience.

Calmement, elle me lâche et me sourit. C'est alors que je remarque des larmes au coin de ses yeux légèrement tirés par les rides qui s'y dessinent déjà. Elle n'a pas vraiment changé. Pour une femme qui vient d'accoucher, elle est plutôt belle et fine dans sa petite robe noire. En dix-huit ans, je suis toujours plus grande de taille et plus claire qu'elle.
Inconsciemment, je me retrouve à me comparer avec elle physiquement, ravie d'avoir plus de points de ce côté là au moins. Cependant, socialement, ça doit être tout le contraire. Elle est mariée, avec au moins deux enfants et avec une situation économiquement stable. Cela se voit aussitôt à son habillement simple mais élégant, sans parler de son teint noir luisant et bien entretenu... C'est fou comme je l'envie au simple regard... 

— Comment tu vas ? J'ai appris ce qui s'est passé. Je suis vraiment désolée. Il va mieux ?

— Qu'est-ce que tu fais là ?

— Lynn... Je sais que tu ne t'attendais pas à me voir là, mais je ne pouvais pas rester en retrait en sachant ce que tu traverses.

— Qui t'a dit où me trouver ? Je demande alors qu'elle hésite à répondre. C'est ta fille je suppose. Elle sait que tu es là ?

— Tu peux te calmer juste un peu et t'asseoir pour qu'on discute ?

— Et de quoi ? Je n'ai pas de temps et d'énergie à perdre, alors tu ferais mieux de retourner d'où tu viens.

Pendant une minute, elle me fixe droit dans les yeux en silence. Je l'interpelle, mais sans réussir non plus à détacher mes yeux des siens. Elle prend mes mains et ferme les yeux. Je la laisse faire, sans savoir pourquoi. Ma cousine commence ainsi à formuler une prière sans tenir compte des regards des passants de l'hôpital.

— Seigneur je te rends grâce, parce que tu es merveilleux et tes œuvres sont les plus belles. Merci pour tous tes bienfaits dans nos vies, alors même que nous ne les méritons pas. Je te remercie d'avoir exaucé mes prières même après des années. Merci de m'avoir permis de pouvoir à nouveau serrer ma sœur dans mes bras après presque une vingtaine d'années. Qu'à présent les choses aillent d'un bon train, selon ta volonté et que la paix revienne définitivement dans notre famille. Que l'amour soit plus fort que la rancune et les remords. À présent nous te confions cet enfant innocent, notre enfant, ton enfant Seigneur. Pose sur lui ta main céleste afin qu'il soit guéri de toutes ses blessures et qu'il se rétablisse rapidement. Donne à sa mère et ses proches la force de le soutenir. Toi qui mieux que tout autre médecin, sait panser les cœurs, apaise les nôtres et celui de ma sœur en particulier. Nous remettons tout entre tes mains, Père Éternel. Sois béni. C'est au nom de ton fils Jésus-Christ que nous avons prié.

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