Chapitre 9

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Atmosphère : Falling - Trevor Daniel

Maintenant qu'on est là, je n'ai plus envie d'abandonner. Le souffle court, je me relève et marche jusqu'à la fenêtre en question. Quelques gouttes de sang perles sur le grand carreau de verre brisé. Son sang...

Une nouvelle vague de remords s'empare de moi. Je suis si irritée que pour manifester ma colère, je donne un violent coup de pied dans la vitre cassée. Ce qu'il reste de la fenêtre vole en éclat et se repend dans l'atmosphère comme une délicate poussière.

Je sens le regard de mes amies me brûler l'échine. Je sais, je déçois mais franchement, maintenant, toutes ces futilités me passent par-dessus la tête. J'en ai marre d'être celle que les gens souhaitent que je sois. De changer pour recevoir le mérite de personnes sans intérêt. Si je dois me cacher, je le ferai, mais en restant moi-même.

En tendant l'oreille, je réussis à déterminer où se situe cette fichue chose. A gauche de l'ouverture. Il me faut donc me baisser pour me mettre à plat ventre afin de passer tout le haut de mon corps à l'extérieur. Je bloque mon regard pour éviter de découvrir dans les détails, le corps de ma meilleure amie défunte vue du haut. Sans façon.

Je me suis penchée si vite qu'il me fallut quelques secondes avant de respirer normalement. Le son continuel s'intensifie et me donne rapidement mal à la tête. Je continue tout de même, je ne m'arrête pas de ramper. J'ai mal aux coudes et aux avants bras, j'agrippe mes mains à un rebord solide et avec un peu de détermination, je réussis enfin à être assez avancée pour pouvoir me tourner vers la gauche.

Puis tout se relie une nouvelle fois dans mon esprit.

Et je me sens surtout sacrément peu perspicace pour m'être fait berner comme ça.

Un drone.

Ce n'est qu'un putain de drone qui m'a fait faire des cauchemars telle une gamine de 6 ans parce qu'en plus d'être pathétique, je suis naïve. Un magnifique portrait, dis-donc !

Je fixe l'appareil qui lévite dans l'atmosphère face à moi. Je n'avais encore jamais vu de drone aussi élaboré que celui-ci : la plateforme principale était recouverte d'écrans reflétant l'environnement autour du drone, sûrement un mécanisme qui a pour but de dissimuler l'appareil dans des endroits sans qu'il soit visible (en tout cas de loin) par les victimes. Je retrouve bien sûr les deux petites lumières blanches que j'avais prises pour des yeux, la dernière fois. Au-dessus du boitier principal était fixé un petit cercle noir strié de rayures, c'est donc par-là que sort le son flippant qui ressemble à celui d'un animal enragé.

Soudain, je sens des mains brûlantes m'agripper les chevilles, je ne perçois pas de violence dans ce geste mais je suis tout de même interpellée par ce dernier. Je prends aussitôt conscience que ce peut être un organisateur et qu'il n'est pas question que ma mort soit causée par un mec comme eux.

Alors, je me retourne avec vitesse – je suis donc désormais sur le dos – et décoche un coup de pied des plus puissant sans vraiment savoir où. Sûrement dans sa figure car j'ai pu apercevoir une silhouette accroupie à mes pieds et mon coup était plutôt bien centré. Je me cramponne à de nouveaux rebords au-dessus de ma tête pour faire basculer mon poids vers mon adversaire et glisser jusqu'à lui. Je me remets sur pieds en quelques secondes et, alors qu'il tentant de se relever, je le plaque au sol, m'aplatissant de toute mes forces sur lui.

Mes mains sont plus rapides que mes yeux et elles sont déjà enfermées sur son col que j'empoigne avec détermination. C'est bien-sûr après avoir commencé à l'étrangler que je me rends compte que je me trompe de camp.

- OK, donc t'es vraiment complètement dingue ! Souffle Tyler en grimaçant de douleur.

J'ai beau être en faute, je ne peux m'empêcher d'être agacée envers lui et son comportement qui par moment, n'a pas de sens.

Je me redresse à califourchon sur Tyler et détache mes mains de lui petit à petit sans le quitter des yeux, comme si j'avais peur qu'il ne s'attaque à moi. C'est à cet instant que je comprends que je suis en train de perdre confiance en toutes les personnes qui sont de mon côté. Je voudrais effacer cette sensation mais je ne parviens pas à la bannir de mon organisme, j'en suis imprégnée et souillée tout autant.

Mes prunelles sont plongées dans les siennes depuis une bonne minute, je refuse de siller alors je ne cligne pas des paupières, si bien que je commence à ressentir de forts picotements aux yeux. J'ai l'impression que le temps s'est arrêté et qu'il n'y a plus que cette étrange alchimie entre lui et moi que je refuse de prendre en considération chaque fois qu'elle émerge entre nous.

Puis je remarque que la lueur qui illumine habituellement ses grands yeux clairs, a changée. Elle a l'air de dissimuler un secret en premier lieu, puis la seconde d'après, de discerner quelque chose mais dans mon regard, cette fois. J'essaye pourtant de rester impassible face à lui mais je commence à me perdre dans cet océan de nuances bleutées envoutantes.

Sans prévenir, Tyler avance sa main avec une infime précaution vers mon visage, mais je suis paralysée et me laisse faire. Sa paume bouillante passe le long de ma joue glacée tandis que son pouce caresse mon épiderme avec douceur. Qu'est-ce qu'il fait, bon sang ?!

Ses lèvres se mettent à articuler quelque chose, mais aucun son ne sort de sa bouche, comme si ça le dépassait. Ou peut-être que ça me dépasse, moi.

Avec un peu de concentration, je parviens à déchiffrer son langage inaudible :

- Je sais. Je sais pour Rose.

Mon cœur fait un bond dans ma poitrine, une nouvelle fois. Je serre les lèvres pour m'empêcher de perdre mes moyens. Je dois être forte. C'est ce que j'ai toujours voulu que les gens voient à travers mon air sarcastique. Mais, certaines fois, je me demande si je ne suis pas simplement lâche et sans cœur. Parce que oui, il y a une différence entre être forte et faire mine de l'être. L'un est bien trop épuisant et je m'épuise de jouer ce rôle à la con, pour le peu de reconnaissance ou de gratitude que je parviens à récolter. Je passe pour une peste égoïste et dépourvue d'émotions, mise à part la haine que je ressens pour les trois quarts des gens qui m'entourent, sans raison valable, qui plus est. Non franchement je ne sais pas ce que je vaux, mais sûrement pas grand-chose.

A suivre...

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