When everybody is working against you

Chapitre 31: Cinq questions

Chay essayait de paraître le plus calme et le moins troublé possible. Cependant, il savait à quel point cette façon de penser était hypocrite : il s'attendait à ce que Kim dévoile toutes ses émotions devant lui, et le plus jeune se cachait derrière un mur d'indifférence. Chay se reprocha mentalement d'être si effrayé par la conversation mais ne put empêcher son corps d'essayer de se protéger de la possibilité d'être rejeté.

Il passa une quinzaine de minutes dans le fauteuil, grignotant quelques amandes grillées au lieu de ses ongles. Enfin (ou plutôt tristement), la porte de la salle de bain s'ouvrit et Kim en sortit, vêtu de la tenue la plus simple que l'on puisse sortir d'un placard, ses cheveux dégoulinant encore sur ses épaules, rendant la chemise blanche transparente à certains endroits. Le chanteur tenait sa trousse de toilette d'une main et de l'autre peignait les mèches indisciplinées pour mieux le voir.

Au cours des derniers mois, Chay avait été témoin d'un certain nombre d'émotions sur le visage de Kim. L'aîné avait eu l'air furieux, en colère, effrayé, déçu, heureux et soulagé depuis qu'il avait trouvé Chay dans la cabane en Norvège il y a quelques mois. En ce moment, il avait l'air un peu effrayé, mais pas comme lorsqu'il avait cru que Chay était en train de mourir. On aurait dit que son corps essayait de l'éloigner de Chay, comme si le fait de s'approcher trop près du plus jeune pouvait entraîner un désastre. La diffusion d'une bombe fut la première pensée que le cerveau de Chay enregistra. Le plus âgé avait l'air d'avoir été chargé de toucher un objet qui devait causer une destruction totale. Chay ? Dangereux ? Pff, souffla-t-il en désignant la chaise à bascule.

- Je ne mords pas, assieds-toi.

A pas feutrés, dans ses chaussettes duveteuses, Kim se dirigea vers le meuble en question, jetant un coup d'œil à l'enveloppe jaune qui se trouvait toujours dans le compartiment de son couvercle en polyester. Mais comme un chien réprimandé, il n'osa pas prendre d'autre chemin que le plus court pour atteindre la destination qu'on lui avait indiquée. Il laissa donc l'enveloppe dans la valise. Chay voulait voir si Kim ferait le premier pas. S'il commencerait à parler. Mais... il ne le fit pas. Le plus âgé resta silencieux, presque recroquevillé sur lui-même, se faisant tout petit entre les coussins et les couvertures de la chaise.

Chay se souvient d'un cours de physique à l'école. Son professeur leur avait posé une question à laquelle il aurait dû être facile de répondre s'ils avaient lu le texte du cours. Mais aucun des camarades de Chay ne connaissait la réponse. Et au lieu de leur crier dessus ou de leur donner la bonne réponse, leur professeur était resté complètement silencieux. Les bras croisés devant sa poitrine, il attendait que l'un d'entre eux lève la main. Chay n'en était pas sûr, mais il avait dû s'écouler plus de cinq minutes avant qu'une fille ne demande timidement la permission de parler et n'avoue qu'elle n'avait pas fait ses devoirs.

Ce souvenir s'était gravé dans le cerveau de Chay, et il était sûr que son professeur de physique serait fier de son jeu de regard silencieux. Il attendait que Kim parle, bouge, fasse quoi que ce soit. Et il était clair que l'aîné n'était pas habitué à ce traitement. Au début de leur relation, Kim avait été le silencieux (et l'était toujours), et Chay avait été celui qui parlait à tort et à travers. Aujourd'hui, avec l'inversion des rôles, il semblait que Chay avait réussi à pousser Kim dans un coin où il se sentait très mal à l'aise.

Lorsque la posture du mannequin n'eut pas d'effet, Chay fit un petit mouvement que l'on pourrait prendre pour une tentative de quitter la chaise. En réalité, il allait seulement chercher quelques amandes grillées supplémentaires, mais c'était plus que suffisant pour que Kim revoie ses priorités.

- Attends ! Cria-t-il, paniqué, comme si le départ de Chay était la pire chose qui puisse arriver. Le plus jeune se calma et se détendit à nouveau sur sa chaise.