Chapitre 4 : Un jeu d'enfant

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Je pose mon vélo dans l'entrée pour l'emmerder et m'assois près de lui. Il est silencieux encore, et moi ça commence à m'agacer ce jeu du chat et la souris. J'allume la télé mais il l'éteint aussitôt et se tourne vers moi.

- Pourquoi tu as dit ça ?

- Quoi ? L'appel ou la litière ?

- L'appel.

- J'étais nerveux et j'ai fini par paniquer... Un poids se fait sentir dans mon ventre et remonte lentement vers ma gorge. Je suis incapable de bouger ni de parler alors que Glenn s'en va et claque la porte de sa chambre. D'un côté, il n'avait pas tort : Pourquoi ai-je voulu appeler ce type ?

Qu'est-ce que je n'ai pas compris dans ses deux années de lycée de souffrance ?

C'est Sa faute ! Absolument ! Tout est sa faute, c'est à cause de Glenn que j'ai dû me faire éjecter du campus ! Dès qu'il est dans les parages, il m'arrive toujours quelque chose et jamais quelque chose de bien... Merde, j'aurais dû m'écouter ! Je me lève de la causeuse et disparaît avec mon vélo sous le bras. Il n'y a rien de mieux que l'air de la nuit pour se rafraîchir les idées...

Je le chevauche et me balade dans les sentiers de Central Park. Je finis par me poser sur un vieux banc en pierre près de mon vieux vélo appuyé contre un arbre. L'air est frais et le ciel est sombre, assez pour observer les étoiles. C'était mon truc... ça l'a toujours été. Être coupé du monde, les yeux rivés dans les étoiles, me détendre et parfois m'endormir ainsi. Personne pour m'emmerder, personne pour m'énerver, personne pour me faire du mal.

Je mets mon téléphone en silencieux, je me sens libre... ailleurs et détendu, faisant le vide dans ma tête, essayant de me rappeler que des bons moments passés mais les mauvais souvenirs reviennent toujours et se répètent comme un cercle vicieux. Me retrouver dans cette cage d'escalier c'est comme retourner en enfer. Me retrouver face à ses yeux bleu gris et ce regard intense. Cet aspect arrogant et fier dans son groupe, il ressemblait à un enfant agité en sautant partout, riant à gorge déployée, courant comme un fou dans les couloirs avec sa bande d'abrutis et criant dans les couloirs comme une poissonnière un jour de marché. Les professeurs qui n'osaient pas l'engueuler ou même le reprendre. Toujours entouré de filles bruyantes et parfois aguicheuses.

Chacun avait son clan, son groupe d'amis donc. Moi, c'était Nathan et Dan. Des amis que j'avais rencontré par hasard dans la bibliothèque du lycée. Ils étaient en couple avant mais j'ai rapidement perdu contact avec eux... Je suivais Dimitri partout où il allait, incapable de me lasser de lui. Un trou noir qui m'avait engloutit sans douleurs au début... c'est en première que les chose se sont gâtées. Je n'avais, et je n'ai toujours, pas compris ce qu'il s'était passé pour qu'il entre dans une rage noire ni pourquoi ça devait être moi qui devait prendre pour tout le monde.

J'avais beau crier, pleurer, supplier, il ne s'arrêtait jamais. Puis cette violence s'est déportée à l'école où je me faisais harcelé, parfois lynché, ou même agressé. Dimitri me regardait avec hauteur, assurance, je le craignais puis je l'ai haïs. Ces cicatrices sur mon corps sont la preuve de son passage dans ma vie, il y prenait un malin plaisir à me voir suspendu la tête en bas et laissait ses " Amis " me jeter des pierres ou même des morceaux de verre. Il m'obligeait souvent de coucher avec ses amis et parfois des inconnus. Quand cela arrivait, il me jetait une liasse de billets comme pour se moquer de moi. Dimitri... j'ai gravé son visage en moi de sorte que je puisse le reconnaître au fil des ans.

Je le hais tellement que je pourrais le tuer. Mais je me déteste aussi d'avoir cru chaque jour, qu'il pourrait changer, redevenir le Dimitri enfantin, souriant, taquin que j'ai aimé. Je m'accrochais à ces souvenirs mais j'ai bien vite compris que c'était impossible et que je devrais vivre avec sa marque. J'ai dû faire de la chirurgie réparatrice mais le coût m'a endetté. Heureusement, j'ai pu trouver du travail rapidement et le salaire est assez généreux.

- Silver Scarlett ! Je renverse ma tête en arrière, agacé d'être interrompu dans mes songes.

- Silver ! Tout en soupirant, je me lève et attrape mon vélo, l'enjambe et me remets à pédaler. Si il me veut tant, il n'a qu'à venir me chercher ! Je pousse sur mes jambes pour accélérer la cadence puis cesse de pédaler pour laisser les roues me guider. J'entends encore la voix de Glenn au loin qui continue de m'appeler avec une certaine instabilité dans sa voix. Je suis finalement rentré à la maison où je sais qu'il ne me cherchera pas. Je ne suis plus aussi docile qu'avant, c'est moi qui suis décidé de devenir chiant, froid, arrogant, égoïste, un véritable connard. Ainsi, je croyais que personne ne viendrait vers moi, en devenant un monstre acharné du travail, strict et sans morale.

Je m'affale sur mon lit, il est plus de 2h du matin et je bosse demain soir. Je vais devoir supporter encore cet imbécile un moment, le temps que mon appartement se libère, heureusement que j'ai dit que je partais en séjour avec ma classe sinon la propriétaire me tuerait.

Je me réveille soudainement, quelque chose était apparu sous mes yeux, quoi, je ne sais pas mais ça me fixait. Quelque chose de sombre, de brumeux, de dangereux. Mes jambes flageolent mais refusent de bouger, mon cœur bat à cent à l'heure et mes mains ne cessent de trembler. Même ma respiration est difficile... Ce que j'ai vu... c'était atroce. Froid et lugubre. Noir. Mon corps en frémis encore... Je rapproche mes jambes pour les blottir contre moi, j'avais l'impression que quelque chose m'observait, un regard pervers et sans vie. Un arrière-goût désagréable me parcourait le long de ma gorge... un goût métallique et sucré que je reconnaissais avec fureur mais aussi stupeur. Conduisant le bout de mes doigts tremblant sur mes lèvres, ma conscience se rassure quand je constate qu'il n'y a rien.

Je me lève, soulagé, et m'avance vers la porte de la chambre. Mes jambes flageolent et j'ai l'impression que le sol tremble. Je regarde l'horloge sur ma table de chevet, il est onze heure et demie. J'y remarque un papier, un mot qui m'est destiné.

"Faudra qu'on parle dès ce soir."

J'en avais aucune envie. Une fois le déjeuner prit, je vais dans le couloir. Pas de vélo ? En panique, je vais dans sa chambre et la retourne. Pas de vélo. Pas non plus dans la cuisine ni dans la salle de bain. Une rage folle me mène sur le campus, j'attrape Glenn qui joue au football américain avec ses potes sous le regard hagard des filles qui se repomponnaient entre elles et l'attire loin des regards curieux de sa troupe.

- Mon vélo, connard.

- Ça peut pas attendre ce soir ?

- Non, je bosse, Moi !

- Y a le bus, me fais pas chier pour un vélo. Incapable de lui répondre tellement j'étais fou furieux, je m'en vais. Puisqu'il veut une discussion ce soir, il n'aura qu'à se la mettre là où je pense ! Arrivé à l'immeuble, j'attrape ses vêtements et les fourre dans un sac poubelle que je balance sur le trottoir, j'y vois mon vélo que je récupère expressément et que je range dans son armoire. La voilà, ma vengeance !

In The Name Of Our Love //🔞//Où les histoires vivent. Découvrez maintenant