Chapitre 17: Alienor

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Terrifiée à l'idée que Lena aille tout raconter à sa famille, j'avais très mal dormi. Je m'étais réveillée à de nombreuses reprises, pensant entendre les soldats venir me chercher. Si je devais à nouveau fuir, je n'avais aucun endroit où aller. Je ne lui avais pas tout dit, et pourtant j'avais déjà trop parlé. J'étais tout de même soulagée qu'elle sache une partie de la vérité.

Les journées défilaient toutes de la même façon depuis mon retour au palais. Izie ou Mathilda me réveillait et m'aidait à m'habillait. Ensuite, le docteur passait une fois dans la matinée et une fois dans l'après-midi, vérifiant inlassablement ma fine cicatrice rosée. Je n'avais aucune idée de la raison de cette guérison rapide, j'avais pour une fois dit la vérité à Lena. Afin de m'occuper, cette dernière m'avait apporté des livres en tout genre. Malheureusement aucun ne parlait de magie, je me contentais donc de lire des contes ou des romances.

La matinée s'était écoulée lentement. J'espérai avoir de la visite dans l'après-midi pour que le temps passe plus vite. Assise dans un fauteuil vert, un livre à la main, les rayons du soleil pénétraient dans ma chambre me réchauffant doucement le visage. Mon esprit se perdit dans la contemplation de l'extérieur. Des enfants couraient dans les jardins, riant aux éclats, sous l'œil désabusé de leurs nounous. Un peu plus loin, se promenant dans les allées, je reconnus Lena. Un jeune homme la dépassant de deux têtes marchait à ses côtés. Le blond presque roux de ses cheveux me rappela Armand. Je me levai de mon fauteuil afin de m'en assurer. J'en étais maintenant sûr désormais, je reconnaissais sa façon de marcher. Il avançait d'un pas souple et fluide, donnant l'impression de seulement effleurer le sol.

Je ne savais pas qu'ils se connaissaient. De quoi pouvaient-ils bien discuter ? Armand était là, à parler avec elle, alors qu'il n'avait même pas pris la peine de venir me voir. Le sentiment que j'éprouvais en ce moment m'était bien trop familier. Je savais qu'aucune attirance ne pouvait exister entre eux, mais j'avais l'habitude d'être celle avec qui ils parlaient le plus. Que se passerait-il s'ils préféraient la compagnie l'un de l'autre ? Je me retrouverais encore une fois au second plan.

Cette situation me fit remonter des souvenirs très désagréable. J'adorais mon frère mais je ne supportais pas l'intérêt que tout le monde lui portait, tout particulièrement mon père pour qui je n'avais pas existé avant la mort de mon jumeau. Quand il passait nous voir, il demandait toujours les progrès de Nathan mais jamais les miens. Nous nous étions beaucoup disputés à sujet, notamment quand il se plaignait de la pression que notre père lui infligeait. J'avais mis trop longtemps à comprendre que l'attention que mon frère recevait n'était pas de l'amour. J'avais lutté des années contre ce sentiment de toujours passer après Nathan.

Aujourd'hui encore, il me fallait affronter ce ressenti, cette petite voix dans ma tête me répétait sans cesse que je n'étais pas assez bien, pas suffisante. Je décidai de m'éloigner de la fenêtre afin de ne plus voir cette scène et me replongeai dans ma lecture.

Plusieurs heures après, j'entendis toquer à ma porte.

- Alienor, c'est moi, Armand, je peux entrer ?

Je poussai un grognement en guise de réponse, qu'il interpréta comme un consentement pour rentrer.

- Tiens, tu n'es plus avec Lena ? Tu t'es enfin décidé à passer me voir ?

- Mais qu'est-ce que tu racontes ? J'ai juste voulu te laisser le temps de récupérer.

Les bras croisés, refusant de le regarder, il poursuivit d'une voix tremblante :

- Je me suis fait beaucoup de soucis pour toi. Je voulais seulement demander à Lena comment tu allais et si je pouvais te rendre visite. J'en ai profité pour lui poser des questions sur l'attaque. Je ne voulais pas t'assommer avec toutes mes interrogations.

La première magicienneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant