FBI infiltré

Chapitre 12 - Voyage dans la Lune

Le reste de la journée s'est passé dans le calme. Au moment de la promenade, je suis allée dans ce coin isolé où j'avais trouvé William la veille. Évidemment, je n'ai pas été surprise de voir qu'il était absent. J'étais seule, mon cerveau et moi bouillonnant dans un tête-à-tête interminable.

Lorsque la promenade fut terminée, je rejoins Morgane dans la cellule.

– Dis Alexia, pourquoi tu t'attardes sur la situation de ce taré de Davis ? me demande-t-elle.

– Parce qu'il est humain, comme nous tous. Si on se retrouve ici, c'est qu'on a tous fait des conneries horribles. Pourquoi est-ce qu'il n'aurait pas le droit aux mêmes liens sociaux que nous tous ?

– Parce que justement, il ne veut pas de liens sociaux, Alexia. Je ne comprends pas pourquoi tu t'obstines sur son cas, lance-t-elle en se levant de son lit.

– Tu as sûrement raison, oui...

– On a une séance cinéma, tu veux venir ? me demande-t-elle.

– Il y a un cinéma dans cette prison ?

– Oula non, juste une vieille télé des années 90. Ils nous passent des films muets parfois, ça fait passer le temps, dit-elle en riant.

– Des films muets... Génial. Mais, comme je n'ai rien de mieux à faire, pourquoi pas, dis-je en me levant.

Lorsque l'on arrive dans la salle, une minuscule télé est accrochée au mur, plusieurs chaises sont placées en rangées devant celle-ci. Contrairement à ce que j'aurais pensé, il y a beaucoup de mondes et évidemment, les premières rangées sont déjà prises. Nous nous installons à l'arrière avec Morgane. Lorsque j'entends les bruits environnants, je réalise que ces moments sont une source d'excitation pour les détenues, comme si c'était la meilleure chose qu'ils avaient de façon occasionnelle. Je sens une masse s'asseoir à ma droite, je distingue très clairement qu'il s'agit de Francesca. Je me sens comme la fille aigrie des transports en commun, lorsqu'il y a plusieurs places disponibles et qu'un parfait inconnu vient quand même s'asseoir à côté de moi.

– Pas mal, pour une brebis égarée, murmure-t-elle.

– De quoi tu parles, dis-je en chuchotant.

– Les deux garces ont peur de toi maintenant. Ça fait trois ans que je suis dans leurs cellules, et elles n'ont pas autant de respect envers moi. En une journée, tu as réussi à faire en sorte que ces deux garces te respectent, dit-elle d'une voix à peine audible.

– Je n'ai rien fait, c'est William qui leur a tabassé la figure, lui dis-je.

– Tu as William dans ton camp, tu inspires le respect à tout le monde, conclut-elle avant de se lever pour s'asseoir ailleurs.

Mais de quoi elle parle ? Je n'ai personne dans mon camp, je n'ai jamais demandé à William de me défendre comme si j'étais une petite chose fragile.

– Qu'est-ce qu'elle te voulait ? me demande Morgane.

– Je ne sais pas, lui dis-je.

Un maton arrive dans la salle et fait des gestes afin d'obtenir le silence.

– Aujourd'hui, nous allons vous passer la cassette "Le Voyage dans la Lune" de George Méliès.

– Quoi ? Ils ne passent que des films de moins de vingt minutes ?

– Ouais, mais c'est vingt minutes en moins d'ennuis, me dit Morgane avec un clin d'œil.

Le film commence, il n'y a plus aucun bruit dans la salle. Bien que je ne sois pas une fan des films muets noir et blanc, je dois bien reconnaître que pour les années 1902, c'était un exploit de réaliser ce genre de chose. Quand je pense qu'il y a encore quelques jours, j'étais posée dans mon canapé, à regarder Stranger Things sur mon écran plat. Ma vie pourrait littéralement faire un film de comédie. Je me surprends à rire de mes propres pensées, je me prends alors une vague de « chut ». Les conditions de vie dans les prisons sont loin d'être celles que j'imaginais. Ou plutôt, loin de ce que la série Orange is the new black m'avait fait imaginer, bien que sur certains points, on s'en rapproche. Une fois le film terminé, l'agitation reprend. Nous aidons les matons à ranger toutes les chaises dans un local et, à nouveau, retour case cellule.