Chapitre 14 - Morpion

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Noah et Ethan ont ramené Davis dans sa cellule. Le boxeur, quant à lui, est toujours au sol, le visage ensanglanté par les coups qui lui ont été infligés. Je l'ai supplié d'arrêter, il continuait de plus belle, comme si une rage noire avait pris possession de lui. Moi qui pensais que William était ridicule à côté du gabarit du boxeur, je me suis tellement trompé. Je tremble de tous mes membres, je n'avais jamais assisté à une telle violence. Je me penche vers le boxeur.

– Je suis désolé, lui dis-je d'une petite voix, comme si tout ça était de ma faute.

Il tente de tourner la tête pour me faire face, il ne parvient même pas à ouvrir les yeux. Au loin, six matons courent dans notre direction avec une chaise roulante. Lucia est derrière eux, elle marche d'un pas déterminé. Lorsque les matons ont fini de mettre le boxeur sur la chaise roulante, ils l'emmènent à l'infirmerie. Lucia reste prostrée devant moi, les bras croisés contre sa poitrine.

– Je suppose que je dois vous expliquer ce qu'il s'est passé ?

– C'est ce que j'attendais de toi, Alexia, suis-moi, on va discuter dans mon bureau, souffle-t-elle.

Je la suis à travers le chemin que nous avions emprunté ensemble moins d'une heure auparavant. Lorsque nous arrivons dans son bureau, Lucia s'installe sur sa chaise et ouvre un tiroir pour en sortir une bouteille de Whisky toute neuve.

– Je gardais cette bouteille dans mon tiroir pour les jours difficile. Ça fait trois ans qu'elle est là, et comme tu peux le voir, elle n'est pas encore entamée. Alexia, peux-tu m'expliquer ce qu'il s'est passé ? me demande-t-elle en se servant un verre de Whisky — pour ne pas dire qu'elle vide toute la bouteille —.

– Eh bien... Moi-même je n'ai pas compris. Nous sortions pour aller en promenade, un mec m'a parlé et Davis a... Enfin, vous n'avez pas vu la scène, mais vous avez vu les résultats, dis-je gêné.

– Ce que je veux savoir Alexia, c'est pourquoi Davis a toujours été un détenu calme, et soudainement, tu arrives, il provoque deux bagarres et toujours en rapport avec toi ?

– Je ne sais pas. Je ne lui ai rien dit de particulier pourtant.

– Dorénavant, tu nous dois un compte rendu de tout ce que tu dis à Davis et tout ce que lui te dit. Je suis navré de devoir prendre des mesures aussi restrictives, mais comprends bien que je n'ai pas le choix. J'attends ton rapport toutes les semaines, dit-elle d'un ton autoritaire.

– Très bien, qu'est-ce-que vous voulez que je vous dise ? Que j'ai fait l'innocente à ne pas savoir son nom ? Qu'il m'a dit qu'il s'appelait pâté ? Et, en nom de famille oignon ? C'est vraiment ça qui vous intéresse ?, dis-je en me levant de ma chaise. Si vous pensez qu'on parle facilement avec un détenu comme Davis dans le but d'avoir des informations, allez-y vous-même !

Je fais une sortie presque spectaculaire de son bureau. Du moins, dans un film, ça aurait eu un bon effet, mais dans la vraie vie, c'est bien moins spectaculaire que ce que l'on pense. En marchant dans le couloir pour retourner aux cellules de hautes sécurités, je croise Fisher. Il a une bandelette sur le nez et un coquard se dessine autour de son œil. Je ne l'ai pas loupé. Il n'ose pas m'adresser un mot, et c'est tant mieux. Je marche d'un pas assuré à travers les couloirs et lorsque ma peau retrouve le frais extérieur, je souffle un grand coup. Au loin, Ethan me fait des signes pour que je me rapproche des cellules. J'aperçois deux autres détenus. L'un d'eux court à toute vitesse sur l'espace qui nous est réservé pour les promenades, l'autre marche simplement. Je me rapproche doucement pour profiter encore de cette fraîcheur qui m'est offerte.

– Dis donc, j'sais pas ce que tu lui as fait à Davis, mais il était en rogne ! me dit Ethan.

– Ce que je lui ai fait ? Absolument rien.

– C'est pas ce qu'il nous a dit. Il a dit que tout était de ta faute, et qu'il te déteste. Il a crié un long moment dans sa cellule, m'informe Ethan.

– Je vois... Et, l'autre, comment il va ?

– Il va passer la nuit à l'infirmerie, il reviendra probablement demain matin. Faut dire qu'il a quand même été sacrément amoché !

– Ouais, c'est sûr. Est-ce que je peux retourner dans ma cellule ? Je suis épuisé.

– Quoi, tu veux déjà rentrer ? La promenade n'est pas finie, il te reste... 20 minutes, dit-il en regardant sa montre.

– Non, je veux rentrer, s'il vous plaît.

– Bon bah, comme tu veux. Il y a Noah à l'intérieur du bâtiment, sûrement devant la porte de Davis pour lui demander de ne plus gueuler.

Je le remercie par un signe de tête et un sourire. Lorsque je rentre dans le bâtiment, j'entends Davis crier, ainsi que Noah qui lui demande de se taire.

– J'aimerais rentrer dans ma cellule s'il vous plaît, lui dis-je.

– Ouais d'accord. Tu entends ça Davis, ta protégée sera en sécurité, elle va dans sa cellule ! Alors calmes-toi ! hurle Noah.

– Ce n'est pas ma protégée ! Je la déteste ! hurle William.

Super, je suis détesté par le mec que je dois amadouer pour lui soutirer des informations, et pour couronner le tout, je n'ai aucune idée de pourquoi il me déteste tant. C'est pas gagné.
Lorsque Noah ouvre ma cellule, un dossier est posé dans le lavabo.

– Ah ouais, Lucia a fait déposer ça par un matin tout à l'heure, apparemment, il y a des feuilles blanches et un stylo. Bon bah, bonne nuit, dit-il en claquant la porte.

Lorsque j'ouvre le dossier, je vois des feuilles blanches ainsi que la dernière lettre que William a reçue hier, mais qu'il n'a pas pu lire puisqu'il est ici.

21 octobre 2022

Ez npdn yznjgz hji amzmz, e'vd mzkgjibz. Ez nvdn lpz op h'vqvdn ydo yz iz kgpn mdzi avdmz, hvdn ez iz kzps kvn h'zi zhkzxczm. Iz h'zi qzpo kvn, ydn-ojd lpz kzpo-zomz y'dxd lpzglpz ozhkn, ez nzmvdn vqzx ojd zi kmdnji. Ez o'vdhz, op hz hvilpzn.

Toujours ces fichus codes. Mais bon, ce n'est pas comme si j'avais grand-chose à faire, alors peut-être qui sait, je parviendrais à trouver ce qu'il se cache derrière ses lettres. Ce qui me saute aux yeux, c'est que sur la lettre que William avait envoyé, il y avait la date, et sur celle-ci également, il y a une date. Bien que l'on soit le 23 octobre, je ne peux m'empêcher de me dire que la date a son importance, sinon, pourquoi la mettre ? Quelle est l'importance de mettre la date lorsque l'on est en prison et que les jours passent tous aussi lentement ? Je monte dans le petit lit avec les feuilles et je me mets à réfléchir sur le sens que peuvent avoir ces lettres. Je réfléchis longtemps, j'essaye de déchiffrer, c'est long, très long... Tellement long, qu'au bout d'un certain temps, je me surprends à faire des morpions seule sur une feuille. Je ressens le besoin de me dégourdir les jambes, mais pas facile quand la cellule permet à peine de faire quelques pas. Je descends du lit par la petite échelle qui tente tant bien que mal de rester stable. Je fais quelques pas dans la cellule, ce qui a pour effet de me déclencher des fourmillements dans les jambes. Je repense à toutes ces soirées que j'ai passé à danser dans mon minuscule appartement, qui maintenant ne me paraît plus si petit que ça. Je regrette de ne pas avoir fait une dernière danse avant d'arriver à Rockhills. La danse était vraiment mon échappatoire, ma bouffée d'oxygène. J'ignore quelle heure il peut bien être, la lumière reste constamment allumée. Toutefois, la fatigue me prend de plein fouet. Je remonte dans ce minuscule lit, plongeant dans les bras de Morphée.

FBI infiltréOù les histoires vivent. Découvrez maintenant