𝕷𝖔𝖛𝖊 𝕸𝖊 𝖔𝖗 𝕶𝖎𝖑𝖑 𝕸𝖊

10

- VIOLET -

Je déteste le dimanche. La boutique est fermée, alors je ne travaille pas. Je ne vois personne. Pourtant, il y a tant de vie dehors... C'est comme si le monde entier avait décidé de se mettre en pause, laissant derrière lui un vide oppressant que je ne peux pas remplir. Pendant que les couples se promènent main dans la main, que les familles se réunissent pour des déjeuners joyeux et que même les propriétaires d'animaux profitent du soleil, je reste seule, enfermée dans mon appartement sombre et poussiéreux. C'est un jour où le silence est tellement lourd que j'entends presque les battements de mon cœur.

J'ai le cœur meurtri et les yeux perdus dans le vide, tandis qu'une immense vague de solitude m'envahit. La satisfaction que m'a procuré le bouquet de fleurs est si minime, comparé à cette sensation de noirceur qui m'habite constamment. Jackson a la capacité d'apparaître de nulle part, de me faire signe, mais de disparaitre aussitôt, comme emporté par la pénombre. Je me rends compte à quel point il m'est difficile d'accepter le bonheur et d'être patiente. Je ne crois pas que le temps permet de guérir. Si je n'arrive pas à être heureuse maintenant, quand le serais-je ?

Dans ces moments, j'oublie les sentiments positifs qui me possèdent parfois. Le temps passe et les fleurs fanent, parce que je ne les arrose jamais et ne leur donne aucune attention. Elles sont comme moi, privées de lumières, attendant désespérément qu'on s'occupe d'elle, alors qu'elles sont en train de mourir à petit feu.

Et juste au moment où je commence à perdre espoir, à me conforter dans le désespoir de son absence, Jackson revient soudainement, comme un rayon de lumière dans l'obscurité. Il tambourine à la porte, me faisant sursauter. Je n'ouvre pas, il frappe à nouveau.

- Je sais que tu es là, Violet.

Mon cerveau éteint toutes les mauvaises pensées pour me rendre ma capacité à marcher.

- Jackson..., je murmure pour moi-même.

Quand j'ouvre mon verrou, puis la porte, d'énormes bras invisibles me serrent. Un poids se libère, et je reste quelques secondes à observer ce garçon vêtu de noir, appuyé contre le mur, un sourire attractif sur ses lèvres.

- Qu'est-ce que tu fais ici ? je demande d'une voix tremblante, au bord des larmes.

- Je suis venu te chercher.

- Pour aller où ?

Je n'arrive tellement pas à y croire, que la surprise me tétanise. J'ai toujours envié les personnes assez courageuses pour quitter leur travail, ou prendre des vacances soudainement pour partir dans des endroits inconnus. J'ai déjà rêvé qu'un garçon me kidnappe pour aller pic-niquer sous une aurore boréale. Pourtant, tout de suite, je suis incapable de bouger, incapable d'accepter l'invitation.

- Tu verras, me répond-il sur un ton sec.

Mon habitude à trop poser de questions m'a toujours porté préjudice. D'ailleurs, elle me pourrit la vie. C'est à cause de ces questions que je n'arrive pas à avancer, à accepter le bonheur. Il y a toujours des "si" et des "pourquoi" qui viennent gâcher le plaisir.

- Je...

Je bégaye, garde la poignée dans ma main tremblante et baisse la tête sur mon grand t-shirt, qui ne cache que la moitié de mes cuisses. Je suis encore en pyjama, à trois heures de l'après-midi, pas douchée, pas coiffée, dans les mêmes sous-vêtements que la veille. Je me sens crasseuse face à lui, qui sent atrocement bon, et dont la peau brillerait presque tant elle est parfaite. Il est en débardeur, m'exposant ses muscles saillants et une partie de son torse imberbe.

Jackson ne paie pas de mine. Il est plutôt mince, de taille moyenne, mais son regard et son look sombre le rendent menaçant. Je suis peut-être la seule à me sentir écrasée par sa présence, mais ça me plaît. C'est comme s'il avait le pouvoir de m'obliger à faire ce qu'il veut d'un simple regard.