𝕷𝖔𝖛𝖊 𝕸𝖊 𝖔𝖗 𝕶𝖎𝖑𝖑 𝕸𝖊

20

(Me revoilà. Pour me faire pardonner, je vous fais découvrir un groupe français.)

- VIOLET -

Je n'arrive toujours pas à réaliser ce qu'il vient de se passer, ce que j'ai accepté de faire. Je ne contrôle pas ces émotions positives qui me traversent. La peur et le dégoût essaient de remonter à la surface, mais sont très vite bloqués par ce sentiment de liberté qui me consume. Je ne peux pas blâmer Jackson pour ce que nous avons fait parce que j'en suis la responsable. C'est moi qui ai décidé de redescendre dans la cave alors que j'aurais pu m'enfuir en courant. Je cours vite, il ne m'aurait jamais rattrapée. Cependant, l'adrénaline n'est jamais venue. Le danger m'a appelée comme des bras réconfortants. J'ai ressenti une violente vague d'excitation et mon cerveau s'est déconnecté, comme si Jackson avait un contrôle total sur mon esprit et mon corps. Il m'a mise face à mes pensées sombres et je me suis laissé manipuler comme une poupée. Lâcher prise m'a offert du plaisir, ce sentiment éphémère que je cherche chaque jour pour résister à l'envie de partir dans l'au-delà. Dans ces instants, je me sens vivante, désirée, utile.

J'ai décidé par moi-même d'écarter les jambes devant cet homme mort. Jackson l'avait sûrement torturé avant que j'arrive et pourtant, son regard faiblissant ne m'a procuré aucune empathie. Du dégoût, bien sûr, mais Jackson a su faire remonter des sensations plus enfouies, comme le désir. J'ai perdu toute morale en me laissant emporter par mon appétit sexuel, plutôt que d'agir comme une personne normale et avertir la police après avoir fui. De toute façon, je ne suis pas normale. Je l'ai compris il y a bien longtemps. Le monde fait semblant d'aller bien et rejette les déchets de la société comme moi. Je ne vaux rien. Enfin, c'était le cas avant Jackson.

J'étais venue discuter avec lui de ses penchants meurtriers, afin de mettre un terme à notre relation. Je sais qu'elle est malsaine et je ne savais pas vraiment si je préférais vivre avec son secret ou qu'il me tue pour le connaître. Là, tout de suite, je n'ai pas cette envie violente de mourir. Toutefois, si cela devait arriver, je voudrais mourir de ses mains. Je ne veux mourir seule, dans l'anonymat et que ma vie sur Terre n'ait absolument servie à rien. Je veux être sa victime, son jouet, son plaisir à lui. C'est ainsi que je veux vivre, désormais.

Et puis, d'un autre côté, je ne veux pas qu'il se lasse de moi. Je veux sentir ses mains sur mon corps, son sexe en moi et entendre sa voix menaçante éternellement. Je veux encore rêver de lui, que cela soit réel ou non. Serait-il capable même de tuer la seule personne qui m'est chère, comme je l'ai imaginé la dernière fois ? Est-ce qu'il tuerait Zoey ? Ma meilleure amie qui ne sait même pas ce qu'il se passe avec moi. Après l'avoir réveillée par mes cris, elle s'est recouchée et nous n'avons jamais reparlé de ce que j'avais vu pendant la nuit. Je ne pouvais pas lui expliquer, au risque qu'elle me prenne pour une folle. Dans la journée, elle est partie rejoindre son petit ami. J'étais tellement désespérée et seule que je me suis rendue devant cette maison abandonnée. Je savais que je trouverais Jackson ici. Il m'a ouvert la porte des enfers et après y avoir passé du temps, je ne veux plus goûter au paradis. Les ténèbres me conviennent.

- Veux-tu m'aider à enterrer Richard ?

Je sors de ma rêverie en clignant frénétiquement des yeux. Puis, je le regarde avec incompréhension. Pourquoi est-ce que je suis encore étonnée de ses propositions ? Pourquoi est-ce que j'hésite, aussi ? Et surtout, pourquoi j'ai envie d'accepter ? Quand il retire le ruban adhésif de ma bouche, il lève un sourcil.

- Alors ?

- D'accord...

- Gentille fille.

Ce que j'aime quand il me dit ça ! Ces louanges me mettent sur un piédestal, comme si j'étais gratifiée de mon obéissance. Je n'ai jamais eu cela de mes parents, que des critiques. Encore plus quand j'ai tenté de leur expliquer mon mal-être. Pour eux, c'est de la comédie. Jackson s'en fiche, lui. Il ne s'en préoccupe pas vraiment. Au contraire, il essaie de me distraire et de me faire oublier mes démons, tout en les remplaçant par d'autres. En me détachant, je présume que je peux me revêtir, mais son bras qui me retient me rappelle que Jackson ne fait rien comme personne.

- Non. Reste comme ça.

- D'accord...

Jax détache le monsieur à son tour. J'imagine que son poids mort est encore plus lourd qu'avant, parce qu'il a du mal à le maintenir sur ses épaules. Il gémit d'effort et se trouve essoufflé après seulement quelques pas. C'est pour cela qu'il repose une partie de son corps au sol et agite sa tête en direction de ses pieds pour me demander :

- Prends ses pieds.

J'obéis, non sans un air de dégoût. Après tout ce que j'ai déjà vécu, je ne pensais pas que toucher un mort me gênerait à ce point. De plus, c'est un homme nu, vieux et gras. Son sexe est poilu et tout ramolli. Je n'y avais pas prêté attention avant mais en remontant les marches avec Jackson, je suis obligée de le voir. Curieuse, je n'arrive pas à détacher mon regard. Ses poils sont épais, ondulés et grisonnants comme ses cheveux. Sous son énorme ventre cisaillé, son sexe paraît minuscule. Il rebondit sur ses jambes à chaque marche.

Dans le jardin, je découvre un amas d'outils contre le mur arrière de la maison. Je n'ai aucune compétence en jardinage, mais je remarque très bien que l'herbe est plus fraîche à certains endroits, qu'il y a même encore quelques amas de terre. Des corps ont été enterrés ici, partout sous nos pieds. Combien de personnes Jackson a-t-il tué ? Y'a-t-il encore de la place ? Et si nous creusions et que nous découvrions un autre mort ? Allons-nous devoir jeter ce corps par-dessus ?

Richard est à peine froid. Ses yeux fermés marquent son sommeil éternel. Hormis le sang qui a commencé à sécher sur sa coupure horizontale, il ne ressemble pas à un mort. Sous cette terre, il y a sûrement des os, de la chaire dévorée, des vers... Je n'ai jamais vu ce genre de cadavre et ça me terrifie autant que ça m'intrigue. La mort est un sujet très mystérieux. Rien ne dit que ces âmes ont trouvé la paix, ni même que je la trouverai en m'ôtant la vie. Cette incertitude m'a tenue en vie assez longtemps pour voir la mort sous un autre jour.

Après avoir déposé lourdement le corps de Richard par terre, Jackson attrape une pelle et me la tend. Je la prends d'un mouvement très lent et hésitant.

- Creuse, m'ordonne-t-il d'une expression neutre, habitué à ce genre de pratique.

Je ne réplique pas. J'obéis. Je suis encore dans cette euphorie qui booste ma confiance, j'ai envie de lui plaire, de satisfaire ses envies et d'être la fille qu'il attend. Il ne veut pas d'une pleureuse qui voit le monde en noir. Jackson a besoin de quelqu'un qui sait ce qu'elle veut et qui se bat pour l'avoir. Puisque c'est lui que je veux, je fais ce qu'il me demande. Voir ce sourire sur ces lèvres est ce qui m'importe le plus à ce moment-là.

Quand je creuse, je sens mes seins et mes fesses s'agiter selon mes mouvements. C'est amusant et, dos à lui, je l'imagine me regarder. J'aime cette étrange activité, elle éveille d'autres fantasmes en moi, des images qui me raccrochent à la vie parce que je ne veux pas mourir avant de les avoir assouvis. Je me demande alors si Jackson m'enterrera de la même manière, dans l'inconnu, sans que personne sache que je repose ici. Ou bien me laissera-t-il dans un coin de forêt, sans se retourner, comme sa précédente victime ? Je l'ai vu faire. Jackson n'a aucun remord. Je l'envie d'être si détaché de ce qu'il devrait normalement ressentir. J'aimerais être capable de ne plus penser aux conséquences de tous mes actes.

- C'est bon, déclare-t-il en faisant claquer sa langue contre son palais. On va le plier un peu, il devrait rentrer.

Il me tend la main pour m'aider à sortir du trou. Ensemble, tordons le corps de Richard pour ensuite le pousser dans sa tombe anonyme. Il rentre parfaitement. C'est Jackson qui le recouvre, me laissant tout le temps de regarder et de regretter mes choix. Mais très vite, mon regard est attiré par lui, par ses bras et ses muscles contractés. Il met beaucoup de force et de vigueur dans ses gestes, comme s'il voulait en finir au plus vite. Son regard fixe me montrent une grande concentration. Soit il veut faire ça bien, soit lui aussi, il se bat avec des démons intérieurs.

Quand il termine, il s'essuie le front avec le bas de son débardeur, m'exposant quelques secondes ses abdos saillants. Enfin, appuyé sur le manche de sa pelle, il me regarde. Est-ce qu'il me trouve belle, comme ça ? Ou est-ce qu'il m'a obligée à rester nue pour me dégrader encore plus et m'empêcher de fuir ? Si seulement je pouvais arrêter de me poser toutes ces questions et me laisser désirer.