CHAPITRE 35 - ALICE

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Je suis si contente de ma semaine passée. Le travail m'avait vraiment manqué. Je suis plus qu'heureuse d'avoir fait ce reportage en Norvège. L'équipe était super. Pourtant, il avait une saveur particulière, car je sais que ce serait le dernier ...

J'ai pris la décision de demander un poste fixe à mon responsable.

Ma vie a tellement changée, que mes priorités sont ailleurs... Elles sont en France dorénavant : Eden et Matt. Les deux hommes de ma vie.

Matthieu m'a manqué plus que je ne l'aurais imaginé. Je ne conçoit plus mon quotidien sans être au près de lui. Après des mois monochromes, il a repeint tout mon monde en couleurs. Son sourire me manque. Sa voix me manque. Tout son être me met en manque.

J'avoue que cela ne m'était jamais arrivé d'être nostalgique de mon quotidien quand je pars en reportage : Lorsque j'ai rencontré Romain, nos priorités étaient claires : le travail avant tout. Nous sommes des passionnés l'un comme l'autre. Jusqu'à ce fameux reportage en Afghanistan...

Le directeur m'avait clairement mis en garde avant le départ : le pays est en guerre, il faut être discret et suivre les consignes des guides locaux. Seulement avec l'équipe on a mené des investigations et filmer en dehors des sites qui étaient déterminés. Nous avons bien failli ne jamais rentrer en France.

A mon retour, j'ai annoncé à Romain qu'il allait être papa. Il a été sans appel: il ne voulait plus que je parte en reportage. J'ai donc demandé un poste administratif à la rédaction de mon boulot. Je ne me suis jamais autant ennuyé et envié mes collègues qui enchaînaient les avions.

******

Vendredi soir, j'envoie un message à Matthieu pour lui annoncer mon retour demain. Je n'ai pas trop plus converser avec lui par manque de temps. Il doit tellement m'en vouloir....

J'ai hâte de le voir pour lui annoncer ma décision.

Je lui ai précisé que je passais ma journée de samedi en tête à tête avec mon fils, mais que dimanche je serais toute à lui. Il m'a juste répondu "ok"

Bon apparemment, il est un peu furax.

********

Une fois n'est pas coutume, je reçois Matthieu dans mon appartement. Ce dernier est en grand bordel, je n'ai pas eu le temps de vider ma valise. Hier j'ai profité à fond de mon fils. C'était une journée riche en émotions, il commence à prononcer ces premières syllabes. Je suis contente que les séances d'orthophonie commencent à porter leurs fruits.

On sonne à l'interphone. Son visage sur la petite caméra me donne déjà des bouffées de chaleur. J'ouvre la porte et le trouve sur le palier. Il est tellement beau ! Il porte un pantalon cargo kaki, avec un sweat à capuche noir et des baskets montantes.

Son look juvénile lui va à merveille. Je ne dis pas un mot. Je me contente de prendre les liens de son sweat pour l'attirer dans mon appartement. Je referme la porte, le plaque contre le mur, et lui prouve combien il m'a manqué avec mes baisers.

Nos mouvements sont erratiques. On ne sait plus tous les deux où poser nos mains, tellement nous sommes pressés de nous retrouver.

"Bonjour à toi aussi beauté" me dit-il contre mes lèvres

"Tu m'as tellement manqué que je voulais te le prouver maintenant et tout de suite"

"Je ne suis pas contre. C'est une entrée comme je les aime avec toi"

Il commence à promener ses mains dans mon dos, sous mon t-shirt. Je ne veux pas qu'il s'arrête de me toucher. Pourtant j'ai besoin d'avoir toute son attention pour lui annoncer une bonne nouvelle.

"Attends Matt, je dois te parler de quelque chose d'important. Allons nous asseoir"

Je vois dans son regard, que ce n'était pas vraiment le plan qu'il s'était fait de notre soirée. Il a cette moue boudeuse sur son visage, qui me donne envie de l'embrasser encore et encore.

"Voilà, mon boss m'a proposé un poste que je ne peux pas refuser : il veut que je devienne sa rédactrice sur sa nouvelle plateforme. C'est un poste permanent où je pourrais aménager mes horaires et surtout plus de déplacement à l'étranger"

"Mais.... Car je suppose qu'il y a un mais..."

"Mais, pour cela il faut que je déménage. Ce n'est pas sur Nantes. Sa demande est assez pressée, il veut que je lui rende ma réponse demain soir au plus tard."

"Qu'en penses tu, toi de cette proposition ?"

Je ne m'attendais pas à cette question. Je lui réponds en toute franchise

"Je pense que c'est une belle opportunité. Surtout pour Eden : l'hôpital sera à proximité pour son suivi, il y a une bonne école en face du travail. Et je ne supporte plus d'être dans cet appartement qui n'est pas le mien, et qui me rappelle mon passé."

Il me coupe dans ma tirade.

"Je vois que tu as déjà pris ta décision de toute façon. Ce que je pense ne changera rien, n'es pas ?"

"Non, pas du tout. Justement on discute là Matt, on communique. C'est comme cela qu'un couple fonctionne."

Je lui caresse la joue, mais je vois les traits de la colère apparaître... ou alors est-ce de la déception dans son regard ?

"A quoi bon, tes plans sont déjà bouclés. Qu'attends-tu de moi, Alice ? Que je te suive ?"

Je ne réponds pas... Je ne sais pas quoi lui répondre. Il a raison... J'ai déjà pris ma décision. C'est une occasion que je ne peux pas louper. Je pourrais enfin proposer à mon fils, un lieu loin de la ville nantaise agitée, un lieu plein de mauvais souvenirs. Je pourrais enfin prendre un nouveau départ. Et j'espérais bêtement que Matthieu voudrait faire partie de l'aventure. Mais apparemment je me suis trompée... Ou alors suis-je trop égoïste ?

"Tu penses à moi ? J'ai ouvert mon cabinet il y a moins d'un an. Je commence tout juste à me faire une clientèle. Je me suis engagé également avec la mairie pendant deux ans pour avoir ce logement au-dessus de mon travail. Mes amis sont ici également. Je ne peux pas tout plaquer en un claquement de doigts comme toi."

"Je pense avant tout au bien être de mon fils. Ce n'est pas une décision que je prends à la légère comme tu as l'air de le penser".

"Finalement, ton ex mari avait raison ..."

"Que viens faire Romain dans cette histoire ? Que t'as t'il dit ?"

"Rien, laisse tomber je suis fatigué, j'enchaîne les heures et les rudes journées. Je vais rentrer chez moi."

Il a à peine fini sa phrase, qu'il se lève déjà et se dirige vers la porte. J'ai les larmes aux yeux. Je les essuie d'un geste rageur et le rattrape par le bras.

"Matthieu, reste s'il te plait. J'ai besoin de toi. Viens allons nous coucher si tu veux. L'essentiel est que je sois près de toi."

Il ne dit rien, et va dans ma chambre que je lui désigne.

Il se déshabille de façon mécanique et se glisse sous les draps. Il ne m'adresse ni la parole, ni un regard. Il se tourne sur la gauche, le regard rivé sur la fenêtre. Je déteste la distance qu'il met entre nous. J'ai envie de le toucher, de respirer sa peau.

Je me glisse derrière lui. J'entoure sa taille avec mon bras et colle mon front contre son dos. J'essaie de retenir mes larmes, mais elles coulent silencieusement. J'embrasse son dos et lui murmure que je l'aime.

Mes mains sont contre son cœur, qui bat de façon frénétique. Je sens qu'il lutte pour ne pas se retourner.

Je ne sais pas quoi faire pour le retenir

ONCE AGAINOù les histoires vivent. Découvrez maintenant