Maxine
Assise dans mon lit, je regarde et regarde la vidéo du panneau publicitaire sur mon ordinateur portable. En tailleur, le coude sur le genou et le menton appuyé sur ma main, je scrute, image par image, la demoiselle avec sa tête de chien. Pas de signature, rien. Pourtant, ça correspond bien au genre de Snake.
Trois jours que je suis dessus à l'analyser de fond en comble. Perdant le sommeil, enchaînant les clopes, me gavant de caféine et de chips. J'ai bien tenté de me mater une série ou d'emmerder la vieille du rez-de-chaussée, mais non. Il m'obsède.
Je regarde l'heure au coin de mon écran et vois qu'il est quatorze heures. Je souffle. J'attrape mon paquet pour m'en griller une nouvelle. Vide. Je prends mes mains dans mon visage en râlant. Or un son me sort de mon énervement. Je redresse la tête. Un E clignote au milieu de la vidéo.
Je fronce des sourcils. Il se manifeste. Il n'avait rien fait depuis samedi soir. Plusieurs lettres s'affichent sur mon écran : tu as vraiment de la merde dans les yeux, et ça se dit tueuse.
Je serre les poings. Une flèche clignote sur le point du i de chienne. L'image zoom sans que je fasse quoi que ce soit. Sa signature était ici depuis le début. Mes jointures blanchissent. L'image recule et zoom de nouveau sur la petite culotte en dentelle rose, pointant un petit diamant que j'avais pris pour une fantasy. Or, un serpent se mord la queue avec sa lettre gravée sur la pierre.
— Purée ! Pétard de pétard. ragé-je en frappant mes poings sur le matelas.
Je n'ai pas osé montrer la vidéo à Tobias. Il les aurait repérés en un instant. Plus sérieusement, il se serait foutu de ma gueule plusieurs semaines après ça. Déjà, qu'avec les croquettes, c'était limite, mais là, il a dépassé les bornes. L'image se recule. Il continue d'écrire. La barre clignote sous mes yeux. Il semble réfléchir. Il joue avec mes nerfs. Fixer cette barre me rend dingue. Mon esprit se perd, m'imaginant que cette barre est une corde balançant Elder au bout, m'en servant de punching-ball pour y passer mes nerfs. Le torturant en laissant la vieille bourrique lui lécher les pieds... Il écrit.
« Accepte le contrat et je te fous la paix. Refuse, et la descente ne sera que plus rude. »
Un rictus se forme. Il s'est dévoilé. Il me surveille, mais ne s'était pas encore totalement mis à nu. Maudit, sois-tu, Elio. Un espace avec oui et non est affiché. Me laissant libre de lui répondre. Il peut toujours s'enfoncer la croix de son seigneur au plus profond de son cul, je n'accepterai jamais de bosser pour un prêtre. Je lui réponds comme il se le doit en face de la case non :
« Va te faire foutre ! »
L'écran s'éteint. Il a compris. Mon téléphone vibre. Je glisse mon regard dessus. Un appel. La perche. Je ne réponds pas. Il insiste. Je lève les yeux au plafond. Je décroche :
« En plein ébat ? » demande-t-il souriant.
— Non, je vais me chercher des clopes, je suis à sec.
« Je suis arrivé, chez moi ou chez toi ce soir ? »
Je regarde l'état de mon studio. C'est le bordel. Cendrillon se demande comment je fais pour qu'au bout de quelques jours mon taudis ressemble à une déchetterie. Je souffle. Je voudrais bien voir sa tête quand « la fille » de Ginette va se pointer. Je regarde l'heure et réponds à la perche :
— Chez moi, mais faut que je demande à Cendrillon de m'aider.
« Laisse-le se reposer, m'informe-t-il, je vais le faire à sa place. Tu n'auras plus qu'à me remercier. »
Je devine sans mal son sous-entendu et cela fera une belle transition pour ce que je lui prépare.
« J'arriverai vers dix-sept heures, désencombre en attendant. »
VOUS LISEZ
Game of Shadows - en cours
Roman d'amourElle, c'est Maxine, une ombre insaisissable, allant d'un contrat à l'autre. Elle travaille dans un bar en banlieue de Paris jusqu'à ce qu'on pose sa carte sur le comptoir pour des services beaucoup plus particuliers. Aux yeux des hommes qui l'emploi...