7- Bonté divine

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Maxine

Le bruit assommant de la perceuse du voisin me fait grincer les dents. Deux jours. Deux foutus jours depuis mon retour qu'ils tapent, percent, arrachent les pans des murs. C'est bien, ils rénovent et remettent en état les logements, mais bordel, ils font un tapage d'enfer. J'aurais bien squatté chez la perche, mais celui-là est parti en mission pour un temps, et Tobias à catégoriquement refusé que je crèche chez lui.

Je m'allume une cigarette en me faisant couler un café. La semaine, je ne travaille pas avant le jeudi, et là, on est mardi. Ils n'arrêtent pas. Je souffle en récupérant ma tasse, puis me dirige derrière mon écran. Un épisode d'une série en fond sur un site de streaming. Je mets mon casque sur les oreilles, tente de canaliser ma frustration sur la donzelle qui se fait troncher par son frangin. Et elle aime ça en plus. Pathétique.

Plongé dans l'obscurité pour atténuer mes migraines, je joue avec mon pique-cheveux entre les doigts. Le boucan dans le couloir est insupportable. J'augmente le volume de mon casque et me concentre sur les dialogues de la scène. Ma tasse se porte à mes lèvres, laissant le café couler dans ma bouche. Il se renverse sur moi en me brûlant la poitrine quand ma porte se fait défoncer.

— Putain, ragé-je, on ne peut pas être tranquille !

Je me retourne, le débardeur tâché. Dégoulinant et fusille Franck du regard. Croisé sur le palier deux jours plus tôt, il regarde ses mains avec peur et les relève ensuite sur moi, surpris. Je saute sur mes pieds pour lui faire face.

— Ça m'a échappé, je... je... bégaie-t-il voulant s'excuser.

— Vous êtes complètement flingués ma parole, je hurle après lui.

Mon pique-cheveux tourne nerveusement dans mes doigts. Je me retiens fortement de lui transpercer le crâne avec. Ce couillon avec son frère imaginaire fout le bordel. Je suis épuisée. Les pas si reconnaissables de Gertrude cognent dans l'escalier. Manquait plus qu'elle.

— Qu'est-ce qui se passe ici ? proteste-t-elle avec Rex dans les bras.

Mes yeux se lèvent au plafond. Je rétorque cependant, la mâchoire serrée :

— Vos nouveaux locataires n'ont aucun respect pour les autres.

Gertrude se met à rire, moqueuse en entendant ma phrase.

— Et vous avez du respect vous quand vous fumez votre saloperie dans les escaliers ?

Elle marque un point, la bourrique. Mais je ne démords pas et croise les bras sur ma poitrine.

— Entre fumer dans l'escalier et défoncer ma porte, il y a une différence large là, fulminé-je.

— Il m'a échappé des mains, je vous prie de m'excuser, se plaint le Franck en se massant l'arrière de la tête.

Je soupire. Il lève son regard sur moi et se fige. Bah quoi ? J'ai d'la merde sur le visage ou quoi ? Son regard descend. Je suis sa direction. Mes yeux s'écarquillent d'horreur. En dehors, je me couvre la plupart du temps pour passer inaperçu, mais chez moi, c'est une autre histoire. Mes tétons pointent sous mon débardeur et je suis en petite culotte en dentelle noire.

— Diantre !

Et, pour rajouter de l'huile sur le feu, une troisième voix se rajoute :

— Bonté divine !

Je redresse la tête et rencontre enfin le frère imaginaire. Mais, qu'est-ce qu'il fout là le prêtre ? Il a les bras chargés de carton, transpirant sous son t-shirt crème avec son col romain toujours autour du cou. Ses yeux se portent sur le meuble ayant détruit mon entrée, puis se baissent sur ma tenue. On pourrait dire que je suis rouge de honte, non. C'est la colère qui afflue dans mes veines. Et le caniche qui me reluque en levant les babines. Lequel des quatre, je bute en premier ?

Game of Shadows - en coursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant