Prologue

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- Jade -


Du sang...

Je ne vois que du sang...

Sur mes mains, sur mes vêtements, tout autour de moi. Sur les murs, sur les rideaux de la fenêtre, sur ce lit...

Et ces corps en sang... Mon souffle se coupe face à l'ignoble scène. Je porte une main qui n'a rien d'humain à mon front, étalant certainement un peu ce rouge sur mon visage. Qu'ai-je fait ?

Les corps... nus... qui ne bougent plus... Est-ce un gémissement que j'entends sortir de la bouche de Sofia ? Est-ce une respiration qui gonfle le torse d'Antoine ?

Je recule d'un pas. Mes pieds trébuchent sur des vêtements. Dans ma précipitation et ma peur, je glisse, me fracassant sur le sol. De nouveaux cris proviennent des corps. Des yeux s'ouvrent, un regard s'illumine, puis s'agrandit. Ce que j'y lis. La peur, la terreur, l'angoisse... Sofia me voit, telle que je suis en réalité.

La bouche entrouverte, aucun bruit ne sort de ma gorge alors que je tente de parler.

Je suis désolée. Ne me regarde pas. Je suis désolée. Je suis un monstre !

C'est le cri de Sofia qui me sort de ma léthargie.

Cri de peur, de terreur, d'angoisse ! Je n'ai jamais entendu quelqu'un hurler d'une telle force.

Je suis un monstre !

À quatre pattes, je fuis et sors par la porte grande ouverte. Des jambes reculent à mon passage. De nouveaux cris. Ils ne résonnent pas autant que les battements de mon cœur dans ma poitrine. La pression dans les oreilles est telle que mon crâne risque d'exploser.

Je suis un monstre !

Je dévale les escaliers, mes pattes crissent sur le parquet. Arrivée de la porte, j'essaie d'actionner la poignée, mais en vain, je panique.

— Va-t'en, sale bête ! lance une voix.

Un verre en plastique rempli d'un liquide nauséabond se fracasse sur mon dos. Je me retourne, et montre les crocs, prête à bondir, prête à attaquer. Les personnes attroupées autour de moi m'en dissuade. Une issue ! Je dois trouver une issue au plus vite. Mes yeux scannent mon environnement et mon nez perçoit un filet d'air. La porte-fenêtre ! Sans réfléchir, je déguerpis en direction du jardin. Ma rapidité innée me permet de courir avant que quiconque ne m'attrape.

Je traverse une étendue herbeuse, puis prends mon élan pour sauter la barrière.

Pour m'enfuir. Pour m'échapper. Pour ne pas à assister à cette terreur.

Je suis un monstre. Et tous ceux que j'aimais viennent de le découvrir.

Lune ArdenteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant