Nano.

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— Allez viens, pose toi et mange un vrai truc ou tu vas finir par te momifier... Il sera encore là dans trente minutes, juré.

Cheveux attachés et torchon à l'épaule par-dessus son t-shirt estampillé Social Distortion, Ayden signa sa promesse d'une croix tracée du bout du doigt sur son cœur, le regard entendu. Il indiqua ensuite à Séra la passoire remplie de pâtes, tout juste posée par ses soins sur le bord de l'évier.

De la vapeur s'élevait de cette dernière, faiblement attirée par la hotte silencieuse qui s'éteignait doucement au-dessus de la plaque vitrocéramique, et transportait jusqu'aux narines sensibles de la jeune femme une subtile odeur de sel et d'huile d'olive.

La soirée bien avancée, elle avait espéré trouver la pièce vide pour y faire un raid éclair, visant un dîner à emporter composé de cookies et de jus de pomme. Force était de constater que son plan venait d'être habilement et facilement déjoué. Elle traîna donc des pieds sur le parquet de la cuisine beige, aux comptoirs blancs et accents de rotin, histoire d'affirmer sa rébellion. Mais elle capitula sans grande résistance devant le pot de pesto tout neuf qu'il lui proposa, une fois leurs deux assiettes servies. Il avait même préparé un verre de jus de pomme.

Et il n'avait pas tord après tout. Ils se cachaient dans ce cottage isolé au nord-ouest de Birmingham depuis un peu plus de trente-six heures et durant ce laps de temps, Dante n'avait émergé que deux fois, puis replongé dans l'inconscience presque aussitôt.

À leur arrivée la veille, en milieu de matinée, elle l'avait installé dans l'une des chambres du rez-de-chaussée. Celle avec la charpente apparente et la vue sur le lac, parce qu'elle lui donnait un sentiment de calme et d'apaisement. Depuis, elle n'avait cessé de le veiller. Elle restait à son chevet même pour dormir, dans le fauteuil qu'elle avait tiré près de son lit, s'éclipsant seulement pour ses besoins primaires et lorsqu'Ayden venait prendre son relais, pour ce qu'il appelait sobrement : "les soins".

Car si Séra avait passé son coma entourée de technologie de pointe et vêtue d'une combinaison de retraitement des fluides corporels, ce n'était pas le cas de Dante. En voyant son état dans la camionette, le scientifique s'était empressé de communiquer une liste à la femme qui semblait être le leader de l'équipe envoyée par Astrid et Virgile. Poche de nutrition parentérale, pompe à perfusion, compresses, tubulure, seringues, alaises absorbantes... Il avait prévu large, envoyant sans sourciller tout ce petit monde subtiliser le matériel adéquat dans des locaux médicaux dispersés aux alentours.

Puis il s'était occupé de panser les blessures à demi guéries du grand brun et de lui faire régulièrement sa toilette, même si pour ça il s'équipait de protections des pieds à la tête. Pourtant Séra s'était portée volontaire, étant désormais la seule à ne rien risquer à son contact, mais il l'avait écartée. Pour "préserver son intimité" avait-il dit. D'abord blessée dans sa fierté — c'était avec elle que Dante était le plus intime ici après tout — elle avait fini par comprendre l'attention à leur relation naissante cachée derrière le geste, et l'avait laissé faire.

Elle devait beaucoup à Ayden, elle s'en rendait bien compte.

Alors, luttant contre l'envie grandissante de retourner à son poste de surveillance, elle s'attabla avec le scientifique qui parlait sans difficultés pour deux, et laissa un instant ses yeux errer sur leur nouvel environnement. D'un côté de la cuisine ouverte sur la salle à manger, une grande baie vitrée épousant les pans du toit s'étendait du haut plafond jusqu'au sol. Derrière, dans la pénombre de la nuit tombée, elle distinguait une forme solitaire assise dans une chaise à bascule sur la terrasse en bois, près d'un brasero allumé.

Malgré ses cheveux nouvellement parés d'une teinte caramel, elle reconnut sans difficultés la silhouette élancée de Lev, sa cigarette rougeoyante s'agitant comme une luciole entre ses doigts tandis qu'il s'étirait de tout son long dans l'air frais.