Chapitre 10

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Harry se figea. Les yeux grands ouverts. Son esprit parti en vacances, alors que ses mains commençaient à trembler. Il tenta de remonter le fil des événements qui l'avait amené de 'il faut qu'on parle', aux lèvres de Draco sur les siennes.

- Il faut qu'on parle.

-D'accord.

Mais Harry n'avait pas bougé. Il suivait les courses des gouttes de pluie sur la vitre, une feuille qui volait, et tout ce qui lui donnait une excuse pour éviter le regard de Draco, ou d'avoir une véritable conversation avec lui.

-Tu sais que généralement, on est deux pour avoir une conversation ? Et même si j'avoue avoir merdé en beauté tout à l'heure, c'est aussi ton cas. Alors j'aimerai autant ne pas être le seul à faire mon mea culpa. Arrête tes enfantillages, et viens t'asseoir.

Le brun soupira, mais obéit. Il voulu s'installer le plus loin possible du blond, et maintenant une distance de sécurité, mais entre les tailles des bancs, et le froid, il se retrouva à frôler son épaule de la sienne, de façon bien trop régulière à son goût.

-Je suis désolé.

Draco passa une main impatiente dans ses cheveux, pour chasser les mèches blondes trempées qui ne cessaient de tomber sur son front.

-Pour tout à l'heure. Et la fois d'avant. Et les dernières années. Tu sais, je comprends que tu ne me fasses pas confiance. Je ne me ferais pas confiance non plus. Et si je suis complètement honnête, en dehors de Blaise, je ne fais confiance à aucun Serpentard. Alors je sais que ce doit être difficile de te demander de me faire confiance. Et ça n'arrivera pas comme ça, du jour au lendemain. Mais j'aimerai au moins que tu essaie. Même si ça doit te prendre du temps.

Harry l'observait du coin l'oeil.

-Pourquoi ?

-Pourquoi quoi ?

Draco tourna la tête, et ils se regardèrent réellement pour la première fois. Finalement, il décida que la position était inconfortable, et passa sa jambe de l'autre côté du banc, faisant clairement face au Gryffondor. Ce dernier l'imita quelques secondes plus tard.

-Pourquoi est-ce que tu veux devenir mon ami ? Je ne comprend pas. Tu es un mangemort, ton père veut me tuer, je cherche à tuer ton patron, qui vit chez toi. Rien qu'en étant assit à côté de moi, si ça se sait, tu risques ta vie. Alors je ne comprends pas pourquoi, après des années à me détester, tu aurais soudainement changé d'avis. Je ne peux m'empêcher de penser que c'est un plan quelconque, et que quand je vais baisser ma garde, tu vas en profiter.

Le blond était visiblement blessé par ce qui venait d'être dit. Cependant, il savait qu'il ne pouvait pas lui en vouloir. Alors, il tenta d'expliquer au mieux ce revirement de situation.

-Au début, c'était le plan. T'isoler le plus possible. Que tu penses être complètement seul, sans aucun allié. Tu-sais-qui aurait été drôlement fier de moi. Mon père aussi. J'ai passé deux mois à faire en sorte que tu sois complètement seul. Puis, j'ai vu les marques. J'ai toujours pensé que tu étais un petit prince. Tu sais, dans les livres que je lisais quand j'étais petit, tu étais dans une grande maison, protégé par tout l'Ordre, avec tous les jouets et les livres que tu voulais. Et je me demandais toujours si tu avais des enfants avec qui jouer. 

Harry l'écoutait. C'était assez étrange de savoir que les personnes avec qui il vivait désormais avaient grandis en écoutant des histoires qui parlaient de lui, et du genre d'enfance qu'il devait avoir. Il ne pouvait s'empêcher de se demander combien de personnes il avait déçu en étant simplement lui-même.

-Je voulais déjà être ton ami quand on est arrivé. Mais quand tu m'as rejeté. Enfin, je me suis dit que c'était moi qui te rejetais et non pas l'inverse. Et puis, de toute façon, je pense que dès que tu as été envoyé à Gryffondor, tout le monde s'attendait un peu à ce que ce soit la guerre entre nous. Alors j'ai fait ce qu'on attendait de moi, comme toujours.

Draco eut un sourire triste. Il regardait désormais le banc, sans vraiment le voir, les yeux et l'esprit perdu dans ses souvenirs.

-Tu dois vraiment me détester pas vrai ? Après tout, tu n'étais qu'un gamin. Et maintenant que je sais tout... Je n'ose même pas imaginer ce que tu dois ressentir... Je ne comprends même pas que tu sois encore assit là à m'écouter. C'était ridicule de vouloir devenir ami.

La main d'Harry se retrouva sur la sienne. Il tenta un sourire chaleureux, mais se sentait quelque peu ridicule.

-Je dois vraiment te rappeler que, toi aussi, tu n'était qu'un gamin ? On t'avait bercé d'illusion sur qui j'étais, je ne peux pas vraiment t'en vouloir d'avoir été déçu par la réalité.

-Non ce n'est pas-

-Je sais. Ce n'est pas ce que tu voulais dire. Mais je comprends quand même tu sais. Quand à ce que j'ai vécu. Personne ne le sait. Même pas Dumbledore. Ils ont peur de moi je suppose. J'ai eu un peu de répis mes premières vacances après Poudlard. J'ai même eu droit à une chambre ! Mais Oncle Vernon a vite appris que je n'avais pas le droit de faire de la magie en dehors de l'école, et encore moins devant des moldus. Alors c'est devenu pire. Mais j'ai pu garder la chambre, alors je suppose que ce n'est pas si mal. Et puis j'ai quelques minutes de répis. Juste avant de monter dans le train. J'ai trouvé un endroit où je peux être seul, réellement. Où je suis juste moi. Ca fait vraiment du bien.

A chaque parole, à chauqe pan de son passé qui se révélait, Draco devait serrer la mâchoire pour ne pas se mettre à pleurer. Il n'osait même pas demander où il vivait avant d'avoir droit à sa chambre, et pourquoi il ne l'avait pas eu depuis le début si elle était si facilement accessible. Il n'osa pas non plus demander ce qu'il s'était passé quand son oncle avait appris qu'il n'avait pas le droit d'utiliser la magie. Le sentiment avait dû être terrible après autant de temps sans le toucher. Il priait silencieusement pour que Harry arrête de parler. Non pas qu'il ne veuille plus l'entendre, mais il n'était pas certain de pouvoir supporter longtemps les récits si horrible de son passé.

-Parfois, mon placard à balais me manque. C'était tranquille, un petit cocon. Et même si je ne pouvais pas me cacher quand il venait m'y frapper, au moins, il n'avait pas la place de bouger librement, et il ne donnait pas de coups aussi fo-

Harry se figea. Les yeux grands ouverts. Son esprit parti en vacances, alors que ses mains commençaient à trembler. Il tenta de remonter le fil des événements qui l'avait amené de 'il faut qu'on parle', aux lèvres de Draco sur les siennes.

Draco, lui, sentit son coeur battre la chamade, alors que la chaleur transmise par les lèvres d'Harry l'envahissait tout entier. Il voulait qu'il arrête de parler, et le réconforter. Bizarrement, il avait pensé que c'était la meilleure solution.

Il recula. Son regard plongea dans celui de son ami.

Il en voulait plus. Encore plus de baiser. Il pouvait sentir des fourmis dans ses mains, alors qu'il avait envie de le toucher, découvrir sa peau. Il se demanda un instant si elle était aussi glacée que la sienne, ou si elle le ferait fondre.

Draco s'avança une nouvelle fois.

La main sur son torse le stoppa net dans son élan.

-Arrête.

Le tonnerre gronda, alors que le vent fit claquer la porte. La pluie s'engouffra par l'ouverture, et les murs tremblèrent sous la tempête.

Une branche vola, éclatant le verre d'une fenêtre déjà abîmée par les années.

Tourner le dos à la vérité [Drarry]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant