Chapitre 17 : Une bête au cœur d'homme

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Poema se réveilla et soupira en regardant son fiancé.

Il n'y avait pas de doute possible, c'était bien Blake. Elle n'avait pas rêvé.

Elle vit sur l'une de ses griffes une bague en or rose similaire à celle que le prince lui avait offerte. Ce ne pouvait pas être une coïncidence : si elle avait encore des difficultés à y croire, la bague confirma ce que Poema pensait. Son amant était devenu un animal. Elle ne s'était pas trompée. Trop fatiguée pour réagir, elle s'était endormie, mais maintenant qu'elle était bien réveillée, elle avait encore plus de peine à le regarder.

Partagée entre la tristesse et le soulagement de l'avoir près d'elle, la sirène caressa sa douce fourrure noire afin de l'apaiser. Profondément endormie, la bête respirait lentement, calmée.

La bague que Blake portait...

C'était bien la même que celle de Poema (mais sans la perle de nacre). Le prince en avait confectionné deux identiques afin d'avoir un lien physique avec sa bien-aimée. La sirène n'était pas au courant de l'existence de la seconde bague. Pourquoi ? Tout simplement parce que Blake eut l'idée de la créer bien après avoir offert le premier anneau à Poema ! Il avait terminé sa propre bague juste avant l'enlèvement de Poema. Alors que sa création était enfin parfaite, il s'apprêtait à la montrer à sa fiancée au matin à son réveil, mais son amante avait déjà disparu. Et le soleil ne s'est jamais levé.

Ainsi, quand Poema vit l'anneau, elle comprit qu'il s'agissait forcément de l'œuvre de Blake. Il était le seul à avoir pu réaliser un travail si méticuleux et si parfait, surtout que la bague était assortie à la sienne, c'était sa copie à un détail près (comme vous le savez déjà, la perle de nacre).

Quand le prince se sentait anxieux et seul, il aimait tourner sa bague, cela lui rappelait Poema. Les deux objets étaient faits en or rose très rare, aussi brillants que des étoiles, "aussi lumineux que les yeux de ma fiancée" pensait-il à chaque fois.

Quand la sirène vit l'animal bouger, elle recula instinctivement. Il se réveillait enfin.

Mais à sa grande surprise, Blake ne semblait pas la reconnaître !

Son regard paraissait ensanglanté, tel un monstre.

Il était vraiment terrifiant, là, dans la noirceur de la cellule.

- Blake...? C'est toi ? demanda-t-elle, effrayée.

Non, ce n'était pas lui. Ou plutôt, ce n'était plus lui.

Il avait changé, il s'agissait d'une toute autre personne, remplie de colère et de haine.

Ce n'était pas Poema qu'il voyait. Le prince regardait à la place une atroce illusion : le vieux mage en train de rire et de poignarder son amante devant ses yeux.

Poema lut la peur, la douleur et la haine dans le regard du loup.

Il fallait qu'elle fasse quelque chose, mais quoi ?

Elle n'eut pas le temps de réfléchir à une idée que le monstre la plaqua au sol.

Le sang de la blessure de Blake (qu'il s'était faite pour marquer sa face de loup) coulait sur la joue de la sirène, terrifiée, alors qu'il la serrait de ses griffes. Il ressemblait à cet instant à un demi-loup aux affreux yeux de sang. Cette apparence était bien plus hideuse que quand il devenait un "simple" loup. Un véritable monstre aux longs crocs et à la fourrure plus sombre que la nuit faisait face à Poema, mais elle ne se laissa pas tromper.

Son apparence, elle s'en moquait : c'était Blake.

Pas un monstre.

Elle retira sa bague et la mit sur l'une des griffes du prince, puis posa sa main sur le cœur de la bête. Elle ne sentait pas la douleur des griffes de Blake, mais elle sentait son cœur qui la blessait : Poema n'arrivait pas à regarder son fiancé dans cet état, cela lui faisait trop mal.

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