2.10. LIBERATION SOUS CONDITION

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Dans la même soirée.

NICCOLO

La police nous a eus. 

C'était drastique. Alors que je voyais Andrea et les autres fourrés Eden dans une voiture garée sur le bas-côté à quelques mètres de l'Opera, les gyrophares bleus des forces de l'ordre m'ont complètement barré la route. Je n'ai même pas eu le temps d'ouvrir la bouche qu'un coup de taser m'a alité au sol.

J'ai entendu Pietro crocheter des coups avant que les tintements des sirènes résonnent lorsque l'une des voitures de police s'est décidée à suivre la Berline authentifiée par un diamant noire sur la plaque d'immatriculation arrière. Depuis que je poirote dans cette cellule insonore, le temps me parait s'évaporer sous mes pieds. 

Je n'ai aucune possibilité de savoir si Eden a été retrouvé. 

Je regarde mes chaussures que j'ai balancées sur le sol. J'en viens à me dire que le moment où j'ai constaté que me déchausser serait une bonne idée en revient à dix bonnes heures environ. Mais je ne sais même pas combien de temps j'ai dormi sans le vouloir. 

Cette cellule d'interrogatoire ne possède pas d'horloge ou autres choses qui rendraient l'espace moins ternes. J'ai laissé la chaise où elle est et je me suis avachie le cul au sol et le dos contre le mur blanc. Devant moi, j'estime avoir gagné une quinzaine de batailles de regard avec la personne qui me scrute par déçu le miroir sans tain.

Je regarde mes phalanges endolories puis lève les yeux sur ce miroir qui est imprégné par mon sang.

— Il est quelle heure ?

Nul besoin de parler italien. J'ai compris que l'inspecteur qui nous a serrés était New-Yorkais. Ils ont cette tendance à parler comme s'ils avaient la bouche pleine. Je peux pressentir un citoyen de la presqu'ile à des kilomètres à la ronde.

Aucune réponse alors que je soupire. Les dernières images me font froid dans le dos avant d'avoir perdu connaissance à coup de décharge électrique.

Eden a été emporté.

J'ai décidé sur un coup de tête d'envoyer un message à Andréa via une cabine téléphonique merdique située dans le quartier Brancaccio à Palerme.

Ça devenait trop instable dans ma tête et je doutais que dans celle de Pietro ce fût pire. On avait fait une descente au Manoir sans la trouver puis on a interrogé, et lui a tué des cinquantaines de personnes qui ont gardé leur langue pendue.

En trois mois, on a éradiqué la plantation et tué une bonne partie des hommes encore entichés sous cette foutue loi de l'Omerta. On s'est fait un nom et la télé à braquer des projecteurs sur nous.

Mais Eden était toujours introuvable. 

J'ai détesté que la police nous fasse passer pour des terroristes, mais avec cette maudite soirée... Nul besoin de regarder les informations de ce soir. Pietro a complètement perdu la raison.

Les corps brûlés et les hurlements me resteront en tête pendant un long moment.

Eden...

— Pourquoi tu n'as pas couru bon sang...

Je sais maintenant qu'Andrea l'a ramené au manoir. Au début avec Irène, elles étaient coincées dans une maison d'hôtes au fond de Taormina. C'était le temps qu'Andrea trouve plus d'hommes pour protéger sa forteresse de notre groupe. Maintenant qu'il a l'appui d'un magistrat qu'il veut élire, plusieurs nouveaux hommes le suit, et Eden est dans cette forteresse imprenable désormais. Le manoir de mon enfance. 

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