37 - Phoebe : Cause you make me feel alive

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Je fixe mon ordinateur. Il n'est même pas allumé — et la vérité, c'est que je ne l'ai même pas déverrouillé.

Non, j'en suis incapable. Voilà une heure que mes yeux scrutent le vide. Ma dispute avec Connor se rejoue en boucle dans ma tête, comme un vieux disque rouillé.

« Si tu ne te bats pas pour nous, si tu ne vois pas autant d'avenir dans cette histoire que dans ton diplôme, alors nous perdons tous les deux notre temps. »

« Je préfère te perdre ici et maintenant que peu à peu, douloureusement, dans quelques mois. L'issue sera la même, de toute façon. »

« C'est pas grave, Phœbe. Tu es grande, tu fais tes propres choix. Tu peux partir — ils le font tous. J'ai simplement fait l'erreur de penser que tu étais différente. Mais j'arrête, maintenant, c'est bon. »

Chaque mot me fait l'effet d'une gifle, j'en sens encore la marque sur ma joue. Un sanglot s'échappe du fond de ma gorge, et tout mon estomac se contracte douloureusement. Mes mains se plaquent devant ma bouche, mais c'est trop tard. Voilà que les larmes coulent à nouveau.

Qu'ai-je fait qu'ai-je fait qu'ai-je fait —

je tente d'inspirer profondément, une, deux fois ; mais d'autres sanglots me secouent, et je suis incapable de les retenir.

À quoi cela aura servi, cette dispute, hein ? Et moi qui croyais qu'être avec Connor me distrairait trop... me voilà incapable de faire quoique ce soit rien qu'à l'idée de le perdre. Merde, je l'ai déjà perdu.

Je dois me mordre les lèvres jusqu'au sang pour m'empêcher de m'écrouler définitivement, ici et maintenant.

Je me hais. Pourquoi suis-je incapable de ne pas trop réfléchir, de ne pas douter, de faire confiance ? Connor mérite mieux, il mérite mieux que cet esprit détraqué.

Peut-être que c'est pour le mieux, souffle alors une voix en moi. Peut-être qu'il est mieux sans toi.

Cette pensée me fait l'effet d'un coup de poing, et l'espace d'une seconde, je suis incapable de respirer. Ma main agrippe ma gorge. Respire, Phœbe. Respire.

Oh mon dieu, est-ce que j'ai perdu l'homme de ma vie ?

Ma joue heurte une surface dure, et je gémis tandis que la douleur se répand dans tout mon visage. Ma vision est floue à cause de mes larmes, mais je parviens à distinguer le parquet du pont : je suis tombée. Mon bras tremble tandis que je me relève doucement. Je frotte doucement mon visage, mais je comprends vite qu'il s'y trouvera un bleu, demain.

Ting.

Le bruit d'une notification sur mon téléphone me ramène sur Terre. Péniblement, je me relève et me rallonge sur le canapé du pont. D'un mouvement mécanique, je saisis mon téléphone. C'est un message de Noah, envoyé sur le groupe.

« Nous sommes de l'autre côté des gradins, à l'opposé des tentes des athlètes. Nord-Ouest de la plage. »

Mon cœur tambourine tandis que les mots de mon ami me reviennent en tête : « Souviens-toi ». Je sais à quoi il fait référence. Je n'oublierai jamais sa confession à propos d'Emy : « Une part de moi est terrifiée à l'idée d'être passé à côté de la femme de ma vie... alors je t'en conjure, Phœbe. Dis-lui. Dis-lui le plus vite possible. »

Je lis une nouvelle fois le message. La localisation est précise — je peux presque visualiser exactement où mes amis se trouvent.

Un deuxième « Ting » retentit, et je manque presque de lâcher mon téléphone tandis que je découvre un nouveau message — de Noah, à nouveau. Mais cette fois, j'en suis l'unique destinataire. Je clique dessus.

Follow your fireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant