Shanarielle
Tiphen s'approche de nous, le visage préoccupé. Malgré l'expression sombre qui obscurcit ses traits, elle est magnifique. Grande, élancée, vêtue d'une robe rouge, identique à la couleur du mouchoir de Noah.
L'avaient-ils fait exprès ?
Une infinie tristesse me serre la gorge. J'ai horreur de me retrouver au milieu d'eux. Je donnerais n'importe quoi pour ne pas être celle à l'origine du chamboulement du dynamisme de ce groupe hors du commun.
— Elle est affaiblie, je l'amène à une salle d'eau, lui explique le garde.
— Très bien. Allons-y, et toi, dit-elle en me pointant du doigt, arrête de te plaindre. J'ai toujours demandé à Crown de me porter comme une princesse et ce bougre a toujours refusé, alors ne geins pas, estime-toi heureuse et apprécie ce moment.
Crown fait un clin d'œil à Tiphen.
— Au moins, avec elle je ne risque pas de m'écorcher. Toi, en revanche, t'es bourrée d'épines, un vrai plaisir...
— Oh mais tais-toi donc et avance ! exige-t-elle avec un demi sourire amusé tout en lui tapant l'épaule d'un geste amical.
Cet échange me tire un léger sourire.
Nous arrivons enfin, et je chancelle, bien qu'il me pose au sol avec délicatesse. Tiphen ouvre une fenêtre, laissant un courant d'air envahir l'espace. J'inspire les effluves printanières avec gratitude.
Elle s'affaire, remplit un verre en carton mis à disposition sur le lavabo et me le tend. Je prends appui sur l'évier et bois lentement quelques gorgées fraîches, qui me font un bien fou. Mes nausées s'apaisent un peu tandis qu'elle me câline le dos dans un geste de sympathie.
De toutes les favorites, elle est celle avec qui j'ai le moins sympathisé ces derniers jours, non par choix, mais parce qu'elle est un peu plus sauvage que les autres. Pourtant, la savoir à mes côtés en cet instant me gonfle d'un sentiment de réassurance incroyable. Je ne saurais dire pourquoi. Même si elle n'est guère plus qu'une inconnue, je me rattache à ce bien-être passager comme si ma vie en dépendait.
— Comment te sens-tu ? me questionne-t-elle en étudiant ma silhouette.
— Honnêtement ? Je suis épuisée et la cérémonie n'a même pas encore commencé.
— C'était peut-être un peu trop tôt, tu es toujours convalescente.
— C'est beaucoup trop tôt.
Ma voix tremble. Toute mon angoisse ressurgit en un éclair sans que je ne puisse la contenir pour préserver les apparences.
— Tu as peur ?
Quelle question. A quel moment a-t-elle trouvé que je me comportais sereinement ? C'est ridicule. Toute cette foutue situation est ridicule. Peu importe ce que j'en pense, si je veux tenir ma sœur en sécurité, je dois accepter ce qu'il m'arrive. Pour la première fois depuis que j'ai atterri dans ce palais, je m'offre cette interlude pour me montrer sincère et déverser mes inquiétudes.
— Non, c'est pire que ça. Je suis terrorisée.
Ma voix se brise et je lève les yeux au ciel, espérant vainement que ce geste retienne les larmes qui me brouillent la vue.
— Pourquoi ? me demande-t-elle calmement.
Je garde le silence. Elle fait signe au garde qu'elle prend le relais et il nous laisse seules sans discuter. Je suis étonnée de son obéissance, mais après tout, Tiphen est l'une des favorites. Nul ne doit ignorer qui elle est. Je ne sais pas quelle est sa place dans la meute, mais ce qui est certain, c'est qu'elle a une influence non négligeable ici. Peut-être pourra-t-elle me sortir de ce guêpier. Alors je reprends :
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Sur les traces d'une Oméga - L'appel de la Louve (Tome1)
WerwolfMon monde s'est effondré. Lors de ma naissance, ma famille a trouvé refuge auprès des humains, se fondant dans la masse à la perfection. Évoluant à leur côté, mes parents ont caché leur véritable nature, même à leurs propres enfants. J'étais loin...