Chapitre 1 : un repos des plus mérités

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La pluie qui tombait lentement sur le toit et rebondissait sur la rigole donnait à Gabriel une furieuse envie de dormir. Les nuages s'accumulaient dans le ciel et déversaient sur Paris une fine bruine continue, obligeant les passants à se munir d'un parapluie, alors que le soleil aurait dû illuminer la grande salle de réunion à cette période de l'année. Gabriel ne pouvait s'empêcher de penser que la météo allait de pair avec son humeur, plus morose que jamais ces derniers jours.

Voilà plusieurs heures que le Premier Ministre s'entretenait avec le Président de la République, Emmanuel Macron, ainsi qu'avec les autres membres de son parti politique. Trois semaines et demi s'étaient écoulées depuis que le Président avait annoncé la dissolution de l'Assemblée Nationale en direct à la télé et Gabriel n'avait pas vu le temps passer, avec tout le travail dont on l'avait chargé. Ses heures de sommeil étaient plus courtes que jamais face aux nombreux préparatifs, interview et débats et la pression des prochaines élections pesait sur ses frêles épaules.

Naviguant entre les réunions, discussions stratégiques et préparations aux futurs débats, il avait la sensation que cet interminable mois de juin ne se terminerait jamais. La campagne des élections Européennes avait été éprouvante pour lui, défendant le programme de son parti presque entièrement à la place de leur candidate, Valérie Hayer, mais il pensait pouvoir se reposer sur ses lauriers après la fin de celles-ci. Que nenni. Après l'explosion de l'extrême droite dans les urnes et un taux de participation plus faible que jamais, voilà que le Président avait provoqué de nouvelles élections législatives, déclenchant une nouvelle bombe médiatique dans le paysage habituellement morne de la politique et obligeant le jeune homme de 35 ans à repartir en campagne. Alliance des gauches, trahison d'Éric Ciotti, prise de positions controversées de célébrités, en quelques semaines, la politique Française était devenue une véritable téléréalité géante où tous les coups étaient permis. Et il était, pour changer, de nouveau au centre de ce trépidant feuilleton, sa carrière jetée, comme tant d'autres, dans le poker incertain de la démocratie.

Alors que ses paupières étaient sur le point de se fermer pour la vingtième fois en une matinée, la voix impatiente du Président le tira de son sommeil imminent.

- Gabriel, tu es encore avec nous ?, lui demanda-t-il avec inquiétude.

Le Président n'était pas dupe ; le premier Ministre était exténué, tout comme lui, ces terribles cernes noires sous ses yeux en était l'une des nombreuses preuves. Mais à l'approche du premier tour des élections, ils ne pouvaient pas se permettre de ménager leurs efforts, son Premier Ministre moins encore.

Lorsqu' Emmanuel Macron avait choisi Gabriel Attal pour remplacer Elizabeth Borne au poste de Premier Ministre, il y a quelques mois de cela, il savait que le tâche serait loin d'être simple pour ce jeune homme constamment enjoué et doté d'une intelligence remarquable. Néanmoins, il pensait que sa vigueur et sa jeunesse lui permettrait d'assurer au mieux ses fonctions et de consolider les relations d'Ensemble envers les autres partis. Pourtant, plus les mois défilaient, plus sa bonne humeur s'était muée en une désinvolture alarmante et en un acharnement au travail inquiétant. Sa rupture avec le député Stéphane Séjourné ne l'avait probablement pas aidé à aller mieux et, à l'approche des Jeux Olympiques et des prochaines élections législatives, le Président le sentait sur le point de craquer et s'inquiétait sincèrement de son état.

Avant que Gabriel n'ait eu le temps de lui répondre, Emmanuel décida de lui donner sa journée. Il devait être en forme pour le débat de ce soir en présence de leur plus grand adversaire, Jordan Bardella, et une bonne sieste lui ferait le plus grand bien. Gabriel quitta la pièce avec un bâillement et remercia le Président d'un regard.



Jordan Bardella, quand à lui, était plutôt confiant pour le débat de ce soir. Cela faisait à peu près deux heures qu'il était en facetime avec Marine le Pen, qui ne cessait de lui faire répéter ses arguments et ses discours et, pour une fois, il se sentait sûr de lui.

Non pas qu'il manque de confiance ou d'estime de lui lorsqu'il défendait son programme et ses convictions sur un plateau télévisé. Loin de là, même. Il était Jordan Bardella, ce jeune et charismatique Président du Rassemblement National de seulement 28 ans, et sa présence à elle-seule provoquait émeute et adoration. Sa fulgurante ascension en politique, son habile manière de dédiaboliser ses idées d'extrême droite au travers d'un ou deux Tik Tok, ce côté bon-vivant, tout cela lui créait une couverture politique plus épaisse à chaque instant, et derrière laquelle les membres de son parti pouvaient aisément se dissimuler. Était-il vraiment intéressé par ses idées, par son rôle de député Européen, par ses obligations en tant que Président du RN ? Les gens s'en souciaient peu, seul comptait ce qu'ils voulaient bien voir, et ce qu'ils voulaient bien entendre.

Cependant, il se faisait souvent ridiculiser par la presse pour son manque de tact lors des soirées entres représentants politiques et, à la suite d'une cuisante défaite face à Manon Aubry et François- Xavier Bellamy lors de la dernière soirée télévisée consacrée aux élections Européennes, sans parler de son débat complètement raté face au Premier Ministre et Manuel Bompart la semaine dernière, il avait demandé à sa mentor de l'aider dans son argumentation. Bien que Marine lui avait fait apprendre certaines phrases dont il ne comprenait pas lui-même le sens et certaines avec lesquelles il n'était pas tout à fait d'accord, il ne se plaignait pas : tant qu'il avait le dessus sur Olivier Faure ainsi que sur le Premier Ministre et qu'il les empêchait de le ridiculiser une nouvelle fois sur le plateau, peu lui importait de ne pas comprendre un traître mot de ce qu'il racontait, il espérait simplement que les Français ne se rendraient compte de rien devant leurs écrans.

Gabriel Attal. Toutes ses pensées le ramenaient inévitablement vers lui. Le Premier Ministre était un adversaire redoutable, bien que Jordan ne l'admette jamais à voix haute, et il était bien malgré lui toujours un peu angoissé avant de l'affronter lors d'un débat. Peut-être était-ce à cause de ses arguments implacables, ou bien des vestiges de leur amitié, ou encore de ces petits sourires narquois que Gabriel Attal ne manquait jamais une occasion de lui lancer, mais il lui était difficile de rester concentré et sûr de lui en présence du plus âgé, bien qu'il n'en montre rien. C'était d'ailleurs également en partie pour cela qu'il cherchait à améliorer ses performances auprès de sa mentor : pour ne plus risquer de se faire humilier par son rival politique, et de se retrouver démuni face à ses répliques implacables.

Quand il en eût assez des conseils redondants et de la voix monocorde de sa professeure, il mit un terme à leur échange en lui assurant qu'il se sentait prêt et s'allongea dans son canapé pour regarder le match diffusé en direct sur son écran géant.

Jordan pouvait renoncer à beaucoup de choses dans sa quête du pouvoir mais pas à sa tranquillité et en l'occurrence, moins encore à ses tournois de foot.
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Un court chapitre pour commencer, la véritable trame dans les pages qui suivent...et la première interaction Bardattal 👀

Au début, je mettais une loooongue intro dans laquelle je vous rappelais que cette œuvre relève de la fiction et puis je me suis dit que, si vous êtes arrivés jusqu'ici, c'est que vous avez déjà un humour supérieur à la moyenne et que vous faites partie de ceux qui passent leur temps à lire des ff Bardattal donc....👀🎀🤝

Je rappelle tout de même que je n'écris évidemment pas cette fanfiction dans le but de faire de la propagande pour un quelconque parti, mais simplement pour surfer sur une tendance qui me fait hurler de rire, et loin de moi l'idée de dédiaboliser le RN ou de me moquer de l'homosexualité de Gabriel Attal, et moins encore de faire passer le RN comme un parti lgbt-friendy, tolèrent et "cool", comme j'ai beaucoup entendu parler. Faisons la différence entre ce que l'on nous promet, ce qu'on lit et ce qu'on entend, et retenons toujours cette phrase, que je trouve plutôt belle :

"Quand nous perdons le droit d'être différent, nous perdrons le privilège d'être libre."

Sur ce, des bisous,

J.C 🎀

La Réforme de notre Amour ( Attal X Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant