Chapitre 23 : Un courant des plus puissants

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Quand Gabriel se réveilla, la tête d'un homme reposait sur son torse. Un instant, il fût pris de panique ; qui cela pouvait-il bien être ? Et puis tout lui revient. L'homme allongé à ses côtés n'était autre que Jordan. Jordan Bardella. Bon sang. Il avait couché avec le Président du Rassemblement National. Mais il n'avait pas couché avec lui pour oublier ses soucis, pour évacuer la pression que lui imposait son poste de Premier Ministre, comme il l'avait fait il y a quelques jours avec d'autres hommes. Non. Il l'avait fait car il aimait Jordan. Il avait décidé de lui pardonner sa trahison, de lui pardonner le contrat réalisé avec Marine Le Pen, de lui pardonner d'avoir commencé à le voir pour l'intérêt de son parti. Il n'aurait pas cru ça possible, tant la colère qu'il ressentait envers lui était immense, mais quand il avait vu Jordan trempé par la pluie, ses larmes dégringolant sur ses joues, lui avouer l'aimer depuis toujours avec une sincérité bouleversante, il l'avait cru. Et, quelques part, il s'était reconnu dans les mots de Jordan. Comment il avait enterré ses sentiments dans le cimetière de la haine pendant des années, comment Jordan avait reconquit son coeur grâce à cette facette de lui qu'il avait oubliée à force d'être dissimulée sous des remarques désobligeantes, cet amour inexplicable qu'il ne parvenait à comprendre malgré tous ses efforts... Oui, Jordan lui avait permis de comprendre à travers ses mots que lutter contre le courant de son attirance envers lui ne servirait à rien et il était désormais en paix avec ses sentiments. Où cela les mènera-t-il ? Il n'en savait rien mais, avec l'homme qu'il aimait à ses côtés, l'avenir lui semblait radieux.

Il se leva en prenant le soin de ne pas réveiller Jordan et alla prendre une douche. Sous l'eau chaude, il ferma les yeux pour se remémorer les sensations qu'il avait éprouvé la veille : les baisers de Jordan sur sa clavicule, puis descendant lentement vers son ventre, ses mains le caressant tendrement, sa langue explorant sa bouche avec avidité...et puis leurs corps se répondant de façon si naturelle, coordonnée, comme s'ils n'avaient fait que s'attendre durant des années. Il avait laissé Jordan mener la danse, bien qu'il ne soit pas le plus expérimenté des deux, et c'était l'un des premiers moments qu'ils passaient sans s'adresser la parole mais où leur alchimie était plus forte que jamais.

Il savait, encore une fois, que les regrets auraient du l'envahir. Qu'il aurait du s'empêcher d'aller plus loin. Mais, il s'en rendait compte maintenant, l'amour qu'il éprouvait pour Jordan était plus fort que sa raison, plus fort que ses principes, plus fort que ses convictions, plus fort que son parti... Lutter contre cela le détruirait, et cette soudaine dépendance envers son éternel adversaire l'enchantait autant qu'elle l'effrayait.

Il sortit de la douche et s'habilla en vitesse. Bien que sa nuit fût idyllique, elle fût également de courte durée, et il devait impérativement retourner travailler. Une horde de journalistes l'attendait probablement en bas de chez lui et se préoccuper de son image est plus que primordial en ces temps troublés, d'autant que le Président voulait consulter les membres de son parti au plus vite pour discuter de la nomination du ou de la future Première Ministre. Il alla dans sa chambre et vit que Jordan était déjà réveillé, allongé sur ses coudes, les yeux encore engourdis de sommeil mais empreint de malice. Celui-ci lui adressa un sourire charmeur et rempli de tendresse qui fit rougir notre Premier Ministre. C'était presque gênant de regarder le Président du Rassemblement National dans les yeux après tout ce qu'ils avaient fait la nuit précédente, bien que Gabriel sache que c'était idiot ; ils étaient tous les deux consentants, majeurs et amoureux, quel mal y-avait-il à cela ?

- Tu t'en vas déjà ?, lui demanda Jordan avec un air faussement innocent. N'as-tu pas remis ta démission à Macron hier ?

C'était un subtil détail , mais Gabriel remarqua avec satisfaction que Jordan les considérait désormais comme assez proche pour le tutoyer. C'était assez étrange, aussi, comme si leurs masques d'hommes politiques venaient de fondre pour laisser place aux vrais hommes qu'ils étaient, et que la politesse n'avait plus sa place dans leurs échanges.

La Réforme de notre Amour ( Attal X Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant