Chapitre 3 : une courtoisie des plus étonnantes

386 16 6
                                    

Le souvenir se dissipa et Jordan revint petit à petit dans la réalité. L'alarme continuait de sonner à tue-tête et Gabriel était en proie à de violents tremblements. Celui-ci se précipita dans la toilette pour vomir une nouvelle fois et revint près de l'évier pour rincer son visage passé au verdâtre.

Jordan s'inquiétait de sa santé. Sincèrement. Quand le Premier Ministre s'écroula au sol, pris de vertiges, Jordan n'hésita pas un instant avant de se précipiter à ses côtés et de passer ses bras sous ses aisselles pour le remettre debout et l'aider à rester stable.

Quand ses mains rentrèrent en contact avec celles de Gabriel, un courant électrique sembla passer entre eux, comme si un feu incandescent s'allumait brutalement sous leur épiderme. Elles étaient si froides, mais aussi d'une douceur inattendue, et le plus jeune entremêla ses doigts aux siens pour le maintenir debout. Jordan ne savait pas si c'était réciproque, mais cette soudaine proximité lui brouillait l'esprit et lui donnait chaud dans son élégant costume, sans parler de ces frissons qui le parcouraient de la tête au pied. Le Premier Ministre entendait-il son coeur s'étant mis à battre la chamade ? Leurs regards se croisèrent sans plus vouloir se lâcher, et le temps se figea l'espace d'un instant, pour ne laisser plus place qu'à eux.

Jordan savait que Gabriel songeait, tout comme lui, à cet après-midi de septembre où le Président du RN avait retrouvé le comédien en herbe enfermé dans la salle de répétitions. Les deux situation étaient fort similaires et, à la fois, fort différentes. À cette époque, Jordan rêvait de devenir joueur de foot professionnel tandis que Gabriel vivait pour le théâtre et la scène. Aujourd'hui, l'un était le Premier Ministre de France et l'autre, le Président de l'un des partis politiques les plus influents du pays. Un instant, Jordan eût la sensation que rien n'avait changé entre eux et qu'ils étaient encore ces deux amis inséparables, bien que rien ne soit pareil.

Gabriel Attal mit pourtant fin à ce moment rempli de nostalgie en se dégageant des bras de Jordan avec brusquerie. Une fois le contact rompu, ils se permirent tous les deux de respirer et de reprendre leurs souffles, qu'ils avaient retenus sans même s'en rendre compte. Gabriel s'asseya sur le sol, ferma les yeux et lança avec lassitude :

- Toujours aussi galant, à ce que je vois.

Ces mots auraient pu sonner comme un compliment dans la bouche d'un autre, mais dans celle de Gabriel, cela résonnait comme une accusation.

Alors qu'il s'apprêtait à répliquer, Gabriel le devança en lui lançant, sans même ouvrir les yeux :

- Laissez-moi, Monsieur Bardella. Nous en avons encore pour quelques temps avant que l'on vienne nous ouvrir alors ne faisons pas un débat avant même que le vrai n'ait commencé.

Il laissa donc Gabriel seul avec ses pensées et s'apprêta à scroller sur son téléphone avant de s'apercevoir qu'il n'y avait pas de réseau dans cette pièce exiguë. Il soupira. Cette soirée promettait d'être plus longue que prévu.

***

Des coups frappés avec force sur la porte tirèrent Gabriel de son sommeil éphémère. Il ouvrit les yeux et vit Jordan Bardella tripoter sa montre. Il se leva et cria par dessus la porte en bois :

- Oui, nous sommes ici !

Il entendit des pas précipités et des gens qui s'agitaient. Lorsqu'il essaya de se relever, sa tête lui fit horriblement mal et des frissons le parcoururent de la tête au pied. Il avait froid dans son costume et malheureusement pour lui, Jordan le remarqua.

Celui-ci ôta sa veste et la tendit à Gabriel. Avant qu'il n'ait eu le temps de décliner son offre, Jordan le devança en lui lançant avec autorité mais également avec une légère douceur :

La Réforme de notre Amour ( Attal X Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant