Chapitre 5 : une invitation des plus suspectes

314 17 5
                                    

Gabriel avait étonnement passé une belle semaine. Il ne l'avait pas vu passer, entre les interviews, les rencontres avec le peuple Français et les préparatifs toujours plus exigeants des prochains Jeux Olympiques, et était fier du travail de son parti. Le premier tour des élections avait lieu demain et il se sentait confiant, pour une fois. Ils n'avaient pas ménagé leur efforts et n'avaient pas compté leurs heures pour assurer la victoire d'Ensemble ou, du moins, la défaite du RN, et, bien que leur campagne fût fort critiquée sur les réseaux sociaux, beaucoup les accusant de critiquer le programme des autres sans mettre en valeur le leur, il était persuadé que son parti allait envoyer valser tous ces piètres sondages. Il quitterait probablement son poste à la fin des élections, personne n'était dupe, mais peut-être avait-il encore une maigre chance de ne pas le léguer à un membre d'extrême droite. NFP, certainement, mais il était moins réticent que son Président face à l'alliance des gauches.

Cet après-midi, il s'était donc rendu chez sa sœur qui venait d'aménager dans une belle maison de campagne avec son compagnon et ils avaient discuté autour d'un barbecue pour oublier le stress qui montait sous un ciel bleu sans nuages, le premier de la saison. Sa soeur avait toujours de bons conseils à lui donner concernant ses apparitions publiques et ses discours et le Président lui avait permis de s'échapper loin de ses responsabilités l'espace d'une journée.

Il s'apprêtait à partir quand il reçut un mail venant d'un journaliste. Celui-ci lui demandait de l'interviewer à propos de ses impressions sur les prochaines élections législatives cet après-midi même dans un café branché de Paris. Gabriel était sur le point de refuser, mais il était d'une excessive bonne humeur à cause des verres de champagne que lui avait servi son beau-frère en guise d'encouragement pour dimanche et décida d'accepter ; rassurer les électeurs de son parti était toujours une bonne initiative.

Il s'en alla donc après une dernière étreinte à sa sœur et donna l'adresse du rendez-vous à sa chauffeur, Anna. Arrivé sur place, il rentra dans le bar chic, le genre de cafés peu fréquenté qui lui permettait de laisser ses gardes du corps à l'extérieur, et se dit que c'était un drôle d'endroit pour une interview. Comme personne ne lui fit signe, il s'assit à une petite table et commanda un verre de vin rouge, bien qu'il soit déjà bien éméché.

Quize minute plus tard, le Premier Ministre était toujours seul dans le bar. Alors qu'il songeait à s'en aller, la porte s'ouvrit brutalement et quelqu'un entra. Il pensait voir un ou une journaliste entrer, mais non.

Seul un jeune homme élancé, frôlant le mètre quatre-vingt dix, vêtu d'un simple col roulé noir et d'un manteau chic, venait de franchir le pas de la porte. Ses cheveux étaient humides et légèrement ébouriffés, conséquence probable d'une douche récente, et sa nonchalance n'avait d'égal que son élégance. Ses yeux rieurs balayèrent le bar à la recherche de son invité, et son regard finit par se poser sur celui du Premier Ministre.

Celui-ci soupira. Encore lui...

- Je n'étais pas sûr que vous viendrez, Monsieur Attal, lui dit Jordan Bardella en s'avançant vers lui, un sourire narquois étirant ses lèvres.

- Je suppose que c'est vous, le journaliste, lui dit Gabriel, les lèvres pincées.

- En effet, c'était le seul moyen que j'avais pour que vous veniez sans vous poser trop de questions continua le plus jeune en s'installant face au Premier Ministre, lassé.

- Vous souhaitez me voir en dehors des débats, maintenant, Monsieur Bardella ? Être enfermé ensemble dans des toilettes ne vous a pas suffi ? Puis-je en avoir la raison ? Non, laissez-moi deviner ; vous voulez que je vous donne des conseils à propos du poste de Premier Ministre, que vous obtiendrez la semaine prochaine ?

La Réforme de notre Amour ( Attal X Bardella)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant