5. DARIO

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Cette fille s'est pointée au Catania le mauvais jour.

C'était si compliqué pour ce barman de lui ordonner de dégager de cette table ?

Je la maintiens contre sa chaise, parce que désormais nous devons rester très calmes et ne pas attiser les braises d'un règlement de comptes imminent.

J'espère qu'elle aura un peu de jugeote.

Gabriele, Lorenzo et Livio me rejoignent autour de la table pendant que nos ennemis réduisent la distance jusqu'à nous.

Ils se pavanent dans le restaurant comme si de rien n'était, mon flingue me démange.

Puisque nous sommes en pleine journée et que les lieux sont plein, nous allons faire le maximum pour rester civilisés.

Mais il n'y a aucune garantie que la Bratva se tienne à carreau.

Je garde ma paume sur la cuisse de la fille et pose l'autre sur mon arme à ma ceinture. La chaleur de la peau de ma voisine contraste avec le froid du métal.

Le regard de Lorenzo passe d'elle à moi et sa méfiance est tangible.

Elle a scellé son sort en restant à cette table, ce n'est pas faute d'avoir essayé de l'écarter.

Pour les russes, elle est l'une des nôtres.

D'autant plus avec ma main possessive sur elle. J'aurais dû la retirer, mais je n'ai aucune confiance en elle.

Et j'avoue apprécier le contact de son épiderme lisse. Fait surprenant compte tenu de la situation, elle ne tremble absolument pas et s'est immobilisée. Tétanisée ?

J'observe brièvement son profil. Ce n'est pas la peur qui l'empêche de bouger, elle parait hors d'elle, prête à sauter à la gorge de chacun d'entre nous.

Mais elle devrait plutôt avoir peur, je ne comprends pas.

L'un des trois russes fait un pas devant notre table, son regard glisse un instant vers la fille.

—- C'est Dimitri qui vous a envoyés ici ? leur demande Lorenzo en croisant une cheville sur son genou d'un air nonchalant. Vous savez qu'il vous a conduit droit vers la mort ?

Deux d'entre eux perdent leur air suffisant, mais celui du milieu nous scrute, fier, sans doute parce que son chef lui a confié cette mission d'aller rencontrer le boss en personne de la mafia italienne.

Je réprime un rire moqueur. A côté de moi, un spasme traverse la jambe de la fille. Reste calme.

Personne d'autre n'a pu entendre le début de notre conversation. C'est pour ça que nous avions besoin de cette table : elle est à l'écart des autres et est surtout la plus proche de la sortie.

Si ça dégénère, nous formerons rapidement un barrage entre les russes et les clients pour limiter les dégâts.

— On est là juste pour délivrer son message, nous dit celui du milieu.

C'était évident que nous organisions cette rencontre avec ses hommes dans un lieu qui nous appartient.

— Alors abrège pour qu'on puisse plus voir vos sales gueules, gronde Lorenzo.

— Il veut négocier un nouvel accord avec vous sur le partage du contrôle du port de marchandises.

— Il a perdu le droit de négocier quoi que ce soit quand il a fait exploser six de mes hommes parce que l'ancien accord ne lui plaisait pas. On est pas des sauvages, nous.

Je jure entendre un très léger ricanement là où se trouve notre intruse blonde.

— Ça le rend fou d'avoir le code mais pas le container, hein ? lance Gabriele.

TREASON OF A HEARTOù les histoires vivent. Découvrez maintenant