Le trajet jusqu'au château fut très cahoteux.
Le comte n'était guère habitué à autant de rusticité et d'austérité. Le confort semblait tout simplement être un concept abandonné ou ne pas s'appliquer au transport. Le conducteur avait l'air d'être soit un domestique soit un paysan (sans doute un peu des deux) ; il avait le teint hâlé, les bras puissants, la voix bourrue et le caractère assorti. Si à tout cela, Pol ajoutait une brutalité manifeste dans la conduite de l'attelage, on avait là un tableau pastoral réaliste de la condition paysanne de Déméter.
—Il t'a dit quand on arriverait?, demanda le comte en grimaçant, alors qu'un autre nid de poule lui déplaça une vertèbre.
—Non, il ne m'a pas plus parlé qu'à toi, répondit simplement le mercenaire, en regardant le paysage, évasif.
—Je vois, marmonna Pol en tentant de se masser le dos. Je suis en train de découvrir des parties de mon corps dont je n'avais même pas connaissance jusque là.
—L'expérience est donc enrichissante, commenta Nass, absent.
—Arrête, c'est pas drôle.
—Vous vous plaignez sans cesse. Endurez l'inconfort et profitez de ce merveilleux paysage, Comte. Je n'en avais jamais vu de tels.Pol se sentit rougir de honte. Décidant de supporter stoïquement les meurtrissures de son fessier et de ses muscles dorsaux, il suivit l'impérieuse suggestion de son compagnon.
Il en fut bien inspiré. Tout en se demandant pourquoi le mercenaire n'avait jamais vu des champs cultivés et des collines verdoyantes, il ne put qu'admettre que l'endroit était paisible, reposant et recelait la beauté de la bête apprivoisée.
Déméter était un caillou, mais entre les collines, les rochers et les canyons, la terraformation avait permis de créer de magnifiques petits vallons herbeux, des coteaux ensoleillés et d'aménager de grands espaces de terres arables. Les céréales ondoyaient sous la légère brise avec un doux bruissement.
Quel ennui... Que vais-je faire dans ce trou perdu?
⭐⭐⭐
Au bout d'une interminable torture, ils arrivèrent enfin à destination du château de la demeure de l'administrateur du district.
Non, le seigneur de céans, se corrigea Pol.
Il était important de maintenir une certaine image auprès des gens et même si la plupart des nobles n'étaient pas complètement dupes des choix de terminologie, ils s'étaient tout de même pris au jeu du paraitre. Et c'était encore plus vrai pour les gens du commun.
La demeure tenait plus de la villa que du château. Il fallait tout de même bien reconnaitre que la pierre de taille faisait tout de suite forte impression. La plupart des habitants du village s'étaient déjà rassemblé pour voir arriver le médiateur impérial.
Pol remarque toutefois que la technologie n'était pas totalement absente du décor. Certains engins, des appareils et quelques habitations laissaient penser que la modernité n'avait pas été complètement rejetée.
Le soulagement fut réel.
Un homme se tenait en haut des marches du perron, droit et altier, drapé dans une froide dignité et une cape rouge. Pol se surprit à envier cette tranquille virilité et cette condescendance toute aristocratique dont l'homme faisait preuve en l'attendant en haut.
C'était à lui de monter. Ce n'était pas très protocolaire, mais le jeune noble ne s'en offusqua pas.
Il ôta son gant et lui tendit sa main moite.— Salutations. Vous devez sans doute être M. le duc de Beauvallon. Je me présente, je suis le comte Eusèbe Apollonius de Barcueil. Enchanté de faire votre rencontre après un si long voyage.
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Chroniques Spatiales
Fiksi IlmiahEre post-colonisation spatiale, antépénultième chapitre de l'Histoire. Pour sauver toute une galaxie, un bon samaritain devra trouver le moyen de déjouer un complot à l'échelle interplanétaire à l'aide d'alliés hétéroclites. Mais les ressources man...