15. Sous le masque

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Esteban,

Une heure plus tard dans la clairière,

Je suis assis sur le tronc du chêne mort qui nous sert jusqu'à présent de confessionnal. Nos petites réunions nocturnes improvisées auront raison de nous. Bon, il ne fait pas encore nuit. Je ne donne pas vingt minutes à Meredith pour foutre le camp et me balancer sa plus belle gifle au visage, lorsque je lui aurai dit : « ton mec et ton meilleur ami sont potentiellement les traîtres ».

Ce fumier d'Archibald va tomber ! Mais Aïden... Ce n'est pas possible. Je n'y crois pas.

Tiraillé entre révéler ce que je sais à Meredith et la peur qui me menace de jour en jour, mes mains posées sur mes genoux tremblent. D'ailleurs, sous ces tremblements, mes jambes ont la bougeotte.

T'as envie de faire pipi ? Non, parce que tu me stresse là !

Mes soupçons ne sont pas fondés et je crains de semer un bordel monstre si j'accuse à tort les deux personnes les plus proches de mon amie. Elle ne me pardonnera pas...

Je me retrouve dans une situation inconfortable et je me sens coupable d'être revenu dans sa vie. Jusqu'à présent, j'y ai semé le désordre, en commençant par son couple. Je n'apprécie pas Archibald et c'est réciproque. Ce tordu voulait carrément se battre et...

Le souvenir de cette soirée me tranche la boyasse, mon estomac se noue et un haut le cœur me pousse à grimacer.

T'aurais dû lui déboiter la mâchoire ! Il n'est pas trop tard.

Un crépitement de feuilles écrasées et de petits branchages secs qui se cassent me font sortir de ma torpeur. La main de Meredith se pose sur mon épaule. Je frémis. J'ai peur de sa réaction. J'ai peur de lui dire. Je ne suis pas très courageux.

J'suis désolé si j'ai été brusque tout à l'heure au téléphone... se disculpe Meredith dès son arrivée avant de s'asseoir près de moi et de déposer un baiser sur ma joue.

Ce soir, je suis en compagnie de la tendre, Meredith, loin des piques et de la taquinerie. Ça me va, je ne suis pas d'humeur à plaisanter. C'est sans compter ma petite voix déchainée qui accroît mes émotions.

Coucou, jolie perruche...Grahou... J'ai besoin de... me détendre. J'ai besoin de te mordiller le lobe, de glisser ma langue le long de ton cou...

Je me mords l'intérieur de la lèvre. Comment peut-elle penser à ça ? J'en suis incapable.

T'en fais pas, Mere'. C'est ma faute. C'est moi qui t'ai demandé de venir et qui t'inquiète pour sans doute pas grand-chose...

Qui est mon serpent ?

J'ouvre la bouche, prêt à balancer les deux noms, mais aucun son ne sort. Je bute sur des « euh, hum » et d'un vieux raclage de gorge. J'ai l'impression d'avaler des lames de rasoirs, ma salive me brûle la gorge. Je sens l'angoisse monter, mais je lutte pour garder mon calme. Je ne supporterai pas de perdre mon amie une nouvelle fois.

Este' regarde les papillons... me murmure Meredith en se collant contre mon épaule et en pointant du doigt les Thècle qui passent d'une fleur à l'autre.

Mes yeux se concentrent sur les lépidoptères et je me sens presque apaisé. Meredith a vu que je commençais à paniquer et au lieu de m'incendier sur mon silence, elle contrée le problème.

Il y en a plus qu'avant... Tu crois qu'ils se sont enfin reproduits dans leur nouveau milieu naturel ou c'est toujours le projet scolaire du professeur Solas ? questionné-je en me rendant compte qu'ils sont de nombreux individus ce soir.

Thècle [DARK ROMANCE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant