Chapitre 16 : Maé

2 1 0
                                    


— Ah ! Mais je ne vais pas m'en priver, ma chère, ricané-je sans pouvoir me contrôler en la voyant trembler de tous ses membres alors qu'une petite brise s'est invitée dans l'habitacle.

Elle qui était si heureuse que nous soyons arrivés à destination, la voilà à ne plus pouvoir esquisser le moindre geste tant elle est glacée. Je fais un signe au cocher et il m'apporte un manteau de fourrure que je dépose sur ses épaules. Une fois sûre qu'elle est réchauffée et bien isolée du froid, je me redresse et me dirige vers la sortie. Je descends les marches du véhicule et la neige craque sous mon poids. Je me retourne et tends ma main vers l'intérieur de l'habitacle, invitant Rose à me rejoindre dans le froid hivernal. Elle s'en empare sans hésitation malgré son air boudeur absolument adorable et sors de notre voiture.

Elle se fige, décontenancée par la nature, son calme et ses bruits. Le vent s'engouffre entre les épines des hauts conifères millénaires. Les chants qui s'échappent des groupuscules d'arbres s'harmonisent en une douce mélodie mélancolique. Les flocons valsent en rythme. Tous ensemble. Pour finalement venir s'échouer sur la robe immaculée du sol sous le regard bienveillant de la pleine lune. Un petit chemin se détache sur ce magnifique tableau, seulement illuminé par les rayons de l'astre nocturne. Au bout de ce lacet de terre battue recouverte de pierres, un chalet rustique, mais à l'air confortable, se dresse, fier et fort, contre les rafales hivernales.

Je raffermis ma prise sa main fine et douce pour la tirer à moi. Elle s'arrache à cette toile de maître et son regard est aimanté au mien. Mes lèvres charnues s'étirent et je lui vole un baiser, puis me détourne, heureux de la surprise créée en elle, en direction du chalet qui nous appartient pour un mois. Les doigts de Rose ont quitté les miens, mais la neige qui craque dans mon dos m'indique qu'elle me talonne toujours.

Je cri alors que quelque chose s'est abattu sur ma nuque et se glisse à présent sous mes vêtements. Je me débats pour m'en débarrasser, mais le moindre de mes mouvements la fait encore plus dégringoler le long de mon échine et m'arrache une myriade de frissons. Je jure comme un malfrat et bondis dans tous les sens pour éloigner le gel de ma peau.

Pouf !

Je soupire, soulagé, et m'immobilise alors qu'une chair de poule hérisse tous mes poils. Je me frictionne les bras pour tenter de me réchauffer et lorgne vers le trou qui s'est formé dans le manteau de neige alors qu'un rire de clochettes titille mes oreilles. Je plisse les paupières et me tourne lentement vers Rose. Elle est pliée en deux devant la scène que je lui ai offerte. Des larmes roulent sur ses joues. Elles pourraient geler à tout moment au vu de la température extérieure, surtout si la lune continue sa course dans le firmament nocturne. Mais avec le petit tour qu'elle vient de me faire, je m'en fiche pas mal. Un cri de guerre sort d'entre mes lèvres et je me jette sur elle avant qu'elle ne puisse m'échapper. Malgré sa surprise, elle m'esquive de justesse et s'éloigne au petit trot en riant sous mes tentatives d'assaut. Aucune des boules de neige que je lui envoie ne l'atteint. J'enrage d'autant et lui provoque une nouvelle crise de fou rire.

— Je déclare forfait ! dit-elle à bout de souffle en plantant ses pieds dans le sol blanc.

Je l'ignore et continue de la bombarder de mes missiles glacés, les sourcils froncés par la concentration.

— Maé ! Arrête !

Lorsque j'arrive à sa hauteur, je lui saute dessus et la plaque au sol. Nous roulons dans la neige et nos éclats de rire viennent se mêler à la symphonie de Gliocas.

— Vengeance ! répété-je en boucle en malaxant la neige, un sourire taquin aux lèvres. Vengeance !

Comment ça se fait que je ne l'aie pas sentie en attraper et que je n'aie même pas pensé à la possibilité qu'elle fasse ça ?

Après plus d'une dizaine de minutes de rires, d'eau gelée volant dans tous les sens et de bousculades, j'immobilise Rose. Je plonge dans son regard océan et m'y perds pendant de longues secondes. Mes yeux dérivent vers sa bouche rouge et, sans même lui demander son avis, je scelle nos lèvres. Un moment s'écoule, puis elle enroule ses bras autour de mon cou et me rend mon baiser comme si c'était le dernier.



Blood & Flowers 2 - Rose & ThomasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant