négociation délicate

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Les trois hommes prirent place dans les sièges en face d’eux. Jordan les fusilla du regard, surtout l’avocat qui arborait un air prétentieux.
- Nous avons discuté de quelle proposition nous pourrions vous faire. Mais déjà, je tiens à m’excuser auprès de vous pour le tort que nous vous avons causé, commença le directeur de la chaîne. Ensuite, comme vous le savez, même si nous supprimons ce documentaire, des copies ont sûrement déjà été faites depuis hier. Cependant, nous pouvons vous proposer de vous accorder une interview sur notre plateau afin de tout remettre au clair. Le but serait de que vous regagniez vos réputations ou alors un reportage sur votre quotidien de parlementaire et vous, de Premier ministre.
Jordan écouta attentivement avant de répondre avec fermeté.
- J’entends votre proposition, Monsieur, mais je vois surtout que ça vous permettrait en quelque sorte de vous racheter auprès de nous et des Français qui nous soutiennent, tout ça en vous remplissant les poches, encore une fois grâce à notre image. Donc qu’est-ce que vous êtes prêt à négocier afin de réparer le préjudice commis ?
Un silence de plomb s’installa autour de la table, comme s’ils ne s’attendaient pas à ce que Jordan soit aussi intelligent.
- Eh ben… euh…, le directeur chercha ses mots.
Jordan ne lui laissa pas le temps de finir et reprit de plus belle.
- Si vous n’avez pas d’idées, moi j’en ai plusieurs. Premièrement, nous souhaitons être dédommagés pour les pertes que nous avons subies. Soit une demande de mariage annulée. Ensuite, comme vous nous avez fait subir de la haine via les réseaux sociaux en faisant véhiculer de fausses informations sur notre dos, impactant directement les élections législatives, vous nous paierez l’entièreté de notre voyage de noce. Ce qui, je pense, ne serais même pas à la hauteur de ce que nous pourrions vous demander lors d’un procès.
Les trois hommes en face d’eux était soucieux, ils avaient perdu leurs sourire. Puis l’avocat prit la parole, d’un ton calme et posé mais avec un soupçon d’amertume.
- Nous avons pris note de votre demande. Nous devons en discuter, nous revenons dans un petit moment.
Les discussions allaient de bon train, cherchant à tout prix une solution viable pour satisfaire les lésés mais en y gagnant un minimum, parce que leur business était primordial.
- Mais enfin, Maître, ils ne peuvent pas nous réclamer autant.
- Malheureusement, oui, Monsieur. Ce que vous avez fait n’est pas légal, vous n’aviez aucune autorisation de publier un tel documentaire. Vous devriez vous estimer chanceux qu’ils ne nous aient pas traînés en justice car ils gagneraient facilement et les frais seraient bien au-delà de leur demande. De plus, cela entacherait la réputation de la chaîne, et le Conseil d’administration vous mettrait à la porte si cela devait se savoir.
- Mais enfin, Maître, comme vais-je justifier une telle transaction ? On parle ici de pas moins de dizaines de milliers d’euros.
Le directeur se tourna vers le comptable, l’air choqué.
- De combien parle-t-on exactement ? Demanda-t-il.
- Eh bien, je n’ai pas de chiffre précis, mais leur demande en mariage, avec ce restaurant 5 étoiles, je dirais dans les 5 milles. Par contre, concernant le mariage, avec leur importance dans le pays et avec tous leurs entourages, on devrait avoisiner les 50 à 60 milles euros. Ce n’est pas grand-chose pour nous, nous pourrions les camoufler dans divers frais de tournages.
- En revanche, Monsieur le directeur, je vous propose de faire un réel geste envers eux et d’ajouter la lune de miel. J’ai cru entendre qu’ils souhaitaient faire un tour du monde. Cela nous permettrait de mieux négocier et de pouvoir rapidement oublier cette histoire. Même si nous comptons plus de 100 milles euros, cela n’arriverait pas à la moitié du coût d’un procès.
Les deux hommes continuèrent de discuter, leurs voix résonnant faiblement dans le bureau feutré. Pendant ce temps, Jordan faisait les cents pas, ses talons martelant le sol en un rythme nerveux, tandis que Gaby, imperturbable, était tranquillement sur son téléphone, lisant quelques lignes du débat que Valérie avait mené récemment.
- Ils en mettent du temps, râla Jordan, une veine palpitant sur sa tempe.
- Arrête un peu, tu me fiches le tournis. Je pense surtout qu’on leur a bien fichu la trouille et qu’ils doivent discuter d’une solution adéquate. De toute façon, ils n’auront pas d’autre choix que d’accepter
- Tu es bien sûr de toi, demanda Jordan, arrêtant son manège pour fixer Gaby.
- Tu crois que c’est la première fois que j’ai affaire à ce type de situation ? C’est mon job de trouver des solutions et de coincer mes adversaires. Je crois que tu en sais quelque chose.
Gaby regarda Joran avec un air malicieux, Jordan se calma un peu, prenant une profonde inspiration. Les trois hommes revinrent 15 minutes plus tard avec une tête d’enterrement.
- Très bien, Messieurs, nous avons bien réfléchi à la situation et nous acceptons vos termes. De plus, nous vous offrons votre lune de miel. Cependant, nous aurions une requête.
- Nous vous écoutons, répondit Jordan, croisant les bras.
- Nous voudrions diffuser en direct votre mariage.
Jordan et Gaby se regardèrent et explosèrent de rire.
- Un peu comme un mariage princier ? plaisanta Gaby, ses yeux pétillants de malice
- Oui exactement, confirma le directeur, se redressant légèrement.
- Mais vous êtes au courant que nous ne sommes que des politiciens et non des membres de la famille royale.
- Des politiciens dont la vie amoureuse intéresse toute la France et bien au-delà de nos frontières. De plus, on vous surnomme le prince de la République et le prince du RN.
Gaby sourit, appréciant l’ironie de la situation.
- Nous acceptons, mais ce sera selon nos règles. De plus, nous acceptons cette interview, je pense qu’il est nécessaire d’éviter de faire des préjudices à nos partis respectifs.
Les 5 hommes se quittèrent plus calmement que lors de leur arrivés. Jordan et Gaby rentrèrent chez eux, l’adrénaline retombant peu à peu.
- Je ne sais pas toi, mais cette journée m’a épuisé. Tu veux prendre un bain ? proposa Jordan, se massant les épaules.
Gaby regarda Jordan et sourit.
- Tu n’arrête donc jamais. Va pour un bain, ni plus ni moins.
Les deux hommes passèrent un long moment à discuter de tout et de rien, planifiant les questions pour l’interview de demain. L’eau chaude et le parfum apaisant des huiles essentielles les enveloppaient, offrant un moment de répit bienvenu.
- J’espère que tout se passera bien demain, murmura Gaby, la tête posée sur l’épaule de Jordan.
- Ça ira, on gérera ça ensemble, comme toujours.
Alors qu’ils se préparaient à se coucher, Jordan reçut un message de Marine :
« Demain, 8h00 au Café Bleu, sois discret, c’est urgent. »

Et si on reprenait au début Où les histoires vivent. Découvrez maintenant