Chapitre 20 - Yaël

6 0 0
                                    

Plus je passe du temps avec Karim et moins je calcule ce que je dois dire ou faire pour lui plaire. Ce n'est pas pour autant que mon envie a changé. Plus que jamais, je désire qu'il m'apprécie. Et plus encore.

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -

Karim boit une gorgée de sa bière puis m'explique comment ils ont refait l'électricité, la plomberie et le chauffage en remettant tout aux normes. J'ai l'impression de retrouver le Karim du lycée, passionné par les connaissances qu'il pouvait engranger.

"- Pas trop dur d'apprendre tout ça ? J'imagine qu'il faut pas mal s'y connaître pour tout remettre en état.

- J'ai eu un peu de mal avec certaines notions d'électricité, mais une fois qu'on est dedans, c'est bien plus simple que ça n'y paraît. Et puis c'est toujours cool d'apprendre quelque chose de nouveau."

Je hoche la tête et sans vraiment réfléchir, je questionne.

"- Tu es toujours en contact avec le petit groupe de Tristan depuis que tu as fini le lycée ?"

Encore une fois, je vois le visage de Karim se crisper et je regrette ma question même si je dois avouer que sa réaction m'intrigue d'autant plus. Je sais qu'on a promis de ne pas parler du lycée, mais là ce n'est pas exactement la même chose. Ou alors c'est moi qui joue avec les mots ?

"- Non... Mais c'est pas plus mal, on n'étaient pas du même monde.

- Désolé.

- Pourquoi tu t'excuses cette fois ?

- À toi de choisir..."

Karim affiche un petit sourire timide et même si je sais que ma question l'a troublé, je suis heureux de ne pas l'avoir fait fuir. C'est déjà une victoire.

"- Et toi ? Tu revois des personnes du lycée ?"

Je pouffe de rire face à sa question et son petit sourire en coin. On sait tous les deux que même si j'ai changé, mon passé, lui, ne changera jamais et que pour tous ceux du lycée, je resterai celui que j'étais à cette époque.

"- Je m'en passe bien. J'évite aussi de revoir mes parents.

- Et ta sœur ?"

Cette fois, c'est à mon tour d'être perturbé par une des questions de Karim. J'évite de penser à Marie-Dominique. Même si en soi, elle ne m'a jamais rien fait de mal, elle n'a jamais non plus été mon allié.

"- Ma sœur a toujours été parfaite aux yeux de mes parents, et être comparé à elle toute ma vie n'a pas aidé à améliorer mon amour-propre. Elle semble aimer sa vie telle qu'elle est et je ne lui en veut pas... Je pense juste qu'on n'a rien en commun.

- Pourquoi tu penses toujours que tes parents la préfèrent ?"

Je remarque une inquiétude dans le regard de Karim. Je ne saurai pas dire s'il est inquiet que je réagisse mal à sa question ou si son inquiétude se porte plus sur ma relation avec mes parents et le traumatisme que ça m'a causé. Dans les deux cas, j'apprécie cette inquiétude, peu de personne l'on eut pour moi.

"- Ce n'est pas ce que je pense, c'est un fait. Mes parents ont toujours détesté mes défauts et n'ont jamais cherché à me le cacher.

- Tes défauts ?

- Mes yeux dépareillés, mes cheveux bien moins lisses que les leurs ou ceux de ma sœur, le fait que je n'étais pas comme les autres garçons de mon âge à vouloir jouer à la bagarre...

- Je ne vois pas en quoi tout ça sont des défauts. Perso, j'aime bien tes yeux et tes cheveux bouclés, ça te rend unique. Et si tout le monde se ressemblait, la vie serait bien triste.

À cœurs dissimulésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant