Chapitre 17 - Yaël

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Mon ancien moi n'a plus de raison d'exister.

Je m'adapte encore et toujours en cherchant la version parfaite, celle qui plaira à tous, celle qui poussera les gens à m'aimer.

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Vivre loin de tous ceux qui me connaissaient m'a permis de me réinventer. En Angleterre, j'étais quelqu'un d'autre, quelqu'un sans passé, sans parents, sans anciens amis, sans trahison.

En Angleterre, j'ai compris beaucoup de choses, notamment ce que je voulais être, et j'ai tout fait pour devenir cette personne.

Avant mon premier jour d'école, j'ai acheté en ligne des lentilles de couleur pour faire passer de bleu à vert mon œil droit, ainsi que suffisamment de produit et de matériel pour me débarrasser des boucles qui me couvrent la tête.

Pour toutes les personnes que j'ai rencontrées après ce jour, c'est à cette nouvelle version de moi que je ressemble naturellement.

Je ne sais pas si ce sont les changements que j'ai effectués, mon envie de vivre une vie différente où les gens que j'ai rencontrés, mais il ne me faut pas longtemps pour me faire des amis et une place dans ma nouvelle école.

Le temps passe vite pendant cette dernière année de lycée et je rentre en France juste pour passer les épreuves du bac. Par chance, je ne suis qu'un élève parmi tant d'autres ce jour-là et même si j'aperçois plusieurs têtes connues, aucun d'entre eux ne me remarque. Le fait que je ne ressemble plus que vaguement à celui que j'était avant aide sûrement à me fondre dans la foule.

Mes parents accueillent mon changement physique avec joie, mais sont encore plus heureux d'apprendre que je souhaite rapidement repartir à l'étranger.

Après l'Angleterre, je suis allé étudier en Italie et en Espagne. Puis un peu en manque de la culture française, j'ai décidé de revenir vivre dans mon pays d'origine, mais de rester loin de mes parents que je n'ai même pas pris la peine de prévenir de mon retour.

Choisir une ville où habiter s'est révélé plus de l'ordre du hasard que réellement du choix. Je suis parti de la liste des grandes villes de France, j'ai éliminé celles où mes parents avaient un pied-à-terre, ainsi que celle où ils avaient de la famille ou des amis proches. Ça m'a laissé quatre villes. Lille, Rouen, Marseille et Rennes. Rouen était trop proche à mon goût de la capitale, j'ai rayé également et j'ai réservé le même sort à Lille par peur du climat. Même si après mûre réflexion, laisser Rennes après avoir supprimé Lille pour des questions de météo n'était pas très logique.

Arrivé à deux possibilités, je l'ai joué à pile ou face et c'est Rennes qui a gagné.

Je n'ai pas eu trop de mal à trouver un job. Après le lycée, je me suis spécialisé dans l'informatique à usage médical, et il y avait justement une entreprise spécialisée dans ce domaine en plein recrutement.

Pour une fois que la chance me sourit, j'ai vu ça comme un signe et j'ai foncé. Il a fallu moins de deux semaines entre le moment où j'ai décidé de revenir en France et ce jour où j'ai déballé mon dernier carton dans mon nouvel appartement.

J'habite maintenant en face d'une grande place piétonne pas très loin de la Vilaine le long de laquelle je vais courir régulièrement. Habitant au dernier étage, je n'ai pas trop à me questionner sur le vis-à-vis et je peux me poser sur mon balcon pour bronzer sans gêne lorsque le temps le permet.

J'aime beaucoup cette ville, j'aime sa tranquillité et le fait qu'elle reste pour autant assez grande pour se fondre dans la masse. J'aime le fait de pouvoir aller au travail à vélo pour éviter les bouchons et que le marché hebdomadaire résiste encore aux supermarchés.

À cœurs dissimulésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant