Chapitre quinze

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LEYA.

L'équilibre fragile de mon esprit et de mon corps est chamboulé. Comment cet homme, malgré sa figure peu avenante, parvient-il à m'intimider au point de me déstabiliser comme cela ? Je me sens furieuse contre moi-même. D'une part, je ne devrais ressentir aucune attirance ni trouble envers lui, étant donné que j'aime profondément mon petit-ami. D'autre part, même célibataire, son comportement devrait m'inciter à m'en éloigner.
Je chasse ces pensées intrusives avant qu'elles ne m'envahissent davantage et je retourne à l'intérieur du bar. Là, je remarque Alex en discussion avec Ryder, entourés par les autres. Paniquée à l'idée que Ryder ne révèle notre dernière rencontre, je m'empresse de les rejoindre. Mais en arrivant à leur hauteur, c'est le silence total. Le stress m'envahit, me figurant le pire. La tension est palpable dans l'air.
Soudain, les garçons tirent Alex par le bras, l'obligeant à se tourner vers eux tout en lui tendant un autre verre. Je profite de cet instant de flottement pour m'approcher de Ryder.

- Qu'est-ce qui se passe ? je murmure à Ryder, apercevant Alex s'amuser sans retenue avec les autres.
- Rien, j'étais dans mes pensées.
- À quoi tu penses ?
- Que tu as vraiment des goûts de merde, caméléon.

Il est déjà deux heures du matin lorsque Alex et moi franchissons la porte de notre appartement. Épuisés, nous nous laissons tomber sur le canapé, savourant le confort de ses coussins moelleux. Je finis par rompre le silence qui s'est installé.

- Alors, tu as aimé mes amis ?
- C'était sympa, c'est vrai.
- Ça me fait plaisir, dis-je sincèrement.
- Par contre...
- Oui ? répondis-je, l'appréhension me nouant l'estomac.
- Le frère de ton amie Ashley...
- Oui ? dis-je, mon cœur s'emballant.
- Il n'a pas l'air très fréquentable. J'aimerais que tu ne le revoies plus.
- Tu le connais ?
- Peux-tu faire ce que je te demande, s'il-te-plaît ? Ne pose pas de questions et fais-moi confiance. Je sens quand les choses ne sont pas saines. Et je pense que ce mec est loin d'être sain.
- Je... D'accord.

La manière dont Alex exprimait son inquiétude m'a vraiment surprise. En même temps, avec son attitude étrange et son visage marqué de contusions ce soir, il est clair que quelque chose cloche chez Ryder. Une partie de moi brûle de désir de découvrir ce qui se cache derrière cette façade. Depuis notre première rencontre, il a éveillé ma curiosité. Mais Alex, mon petit-ami réfléchi, a sûrement raison. Ryder n'est probablement pas quelqu'un que je voudrais avoir comme ami.

- D'ailleurs, commence Alex en exerçant une légère pression sur ma cuisse, m'incitant à me rapprocher de lui.
- Oui ? murmurais-je en grimpant à califourchon sur lui, mes jambes entourant son corps.
- Je dois partir. Lundi.
- Où ça ?
- Pour le travail, poursuit-il. C'est une mission tranquille, mais inévitable.
- Combien de temps seras-tu parti ?
- Environ dix jours. Ils ont mentionné que cela pourrait être prolongé si nécessaire.
- Je vois. Tu l'as su quand ?
- Ce matin.
- Tu aurais pu m'en parler plus tôt, dis-je d'un ton faussement boudeur.
- Désolé bébé, quand tu m'as proposé de sortir ce soir, je n'ai pas eu le cœur de gâcher la soirée.

Cette nouvelle me prend de court. L'idée de me retrouver seule ici, dans cette ville sans Alex, m'angoisse quelque peu. Mais je sais qu'entre Ashley qui saura me soutenir et Noémie, ma voisine toujours présente, je ne serai jamais vraiment seule. Tout ira bien.

- Tu vas terriblement me manquer, murmure-t-il d'une voix tremblante en scellant rapidement ses lèvres sur les miennes, m'arrachant un souffle court.

Son baiser, bien que précipité, dégage une intensité palpable, comme s'il cherchait à imprimer ce moment dans nos mémoires pour les jours de séparation à venir. Mes lèvres brûlent encore de son contact lorsque je sens ses mains, habiles et décidées, glisser le long de mon chemisier. Il le remonte lentement, me libérant subtilement du tissu, le faisant glisser au-dessus de ma tête avec une dextérité qui trahit son désir. Ses yeux s'accrochent aux miens, emplis d'une envie et d'un désir brut, cherchant silencieusement mon accord dans cette danse intime. Je ressens son besoin, bien au-delà des mots, comme un courant électrique parcourant ma peau.
La vérité, c'est qu'Alex et moi partagions rarement des moments aussi intimes. Un paradoxe pour moi, autrefois si affamée de telles connexions physiques, surtout avant l'accident tragique qui a fauché la vie de mes parents, bouleversant irrémédiablement mes priorités. Depuis, mes besoins ont changé, mûris. Ce que je souhaite par-dessus tout, c'est un soutien indéfectible, une affection sincère. Le sexe, pourtant autrefois central, est passé au second plan. Alex, malgré ses propres désirs pressants, est celui qui me comprend le mieux, celui qui est resté à mes côtés, bravant mes tempêtes intérieures. Ce soir, poussé par une volonté de créer un pont entre nos désirs divergents, je le laisse prendre les commandes. Les vêtements jonchent rapidement le sol, les siens suivant le même chemin que les miens, se mêlant dans un silence complice. Chaque mouvement qu'il initie m'aspire, alors que je vacille entre l'espoir de renouer avec ce désir d'antan et le souhait sincère de lui faire plaisir, malgré mes réticences grandissantes.
Cela fait maintenant deux jours qu'Alex est parti. Sa présence, que je pensais envolée, demeure pourtant omniprésente dans chacun de ses messages, inondant mon quotidien de ses pensées, si bien que je ne ressens jamais vraiment le vide de son absence. Mes journées sont rythmées par mes cours à la fac avec Ashley et notre petit groupe. Chaque soir, un rendez-vous virtuel sur FaceTime avec Riley me permet de lui raconter en détails ma journée, elle me partageant la sienne en retour, tandis que mes doigts s'activent sur la robe qu'Ashley m'a commandée pour le week-end à venir. Les finitions me prennent du temps, mais je trouve du réconfort dans ces dernières touches créatives. Le rythme effréné de ma vie ne me laisse que peu de répit pour moi-même.
En rentrant chez moi, épuisée par une nouvelle journée harassante d'étude, j'ouvre doucement la porte de mon appartement. Je dépose mes clés avec un soupir de soulagement sur le comptoir, mon regard accrochant immédiatement une enveloppe blanche, enjambant le seuil. Sa présence, différente des courriers habituels, me perturbe. Je l'avais montée distraitement dans l'ascenseur, sans vraiment y prêter attention. Mais maintenant, elle semble imposante, inéluctable. Je la ramasse, immédiatement alertée par l'en-tête d'un cabinet de notaire. Mon cœur se serre, une vague d'anxiété me submergeant, consciente que peu de raisons justifient une telle correspondance dans ma vie actuelle.
Assise sur le canapé, je déchire précautionneusement l'enveloppe, mes mains légèrement tremblantes trahissant l'appréhension qui m'habite. Un papier épais et soigné en émerge, porteur de nouveaux bouleversants. Je commence à lire avec attention.

Échos du passé. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant