Chapitre 14

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Les jours passent, et bien que la trêve semble tenir, je ne peux m'empêcher de sentir une tension croissante dans l'air. Les progrès sont lents, et chaque interaction entre le Loup et les cochons est teintée d'une méfiance sous-jacente. Ils coopèrent, certes, mais la confiance reste fragile, comme un fil prêt à se rompre à tout moment.

Je commence à douter de notre capacité à maintenir cette paix. Les paroles de Dame Baba me reviennent sans cesse en tête : la route vers la réconciliation est semée d'embûches. Ces mots, autrefois réconfortants, commencent à peser lourd sur mon esprit. Et si tout cela échouait ? Et si le passé revenait hanter nos efforts, balayant tout ce que nous avons essayé de construire ?

Un matin, alors que je me promène seule dans la forêt pour essayer de clarifier mes pensées, je tombe sur une petite clairière que je n'avais jamais remarquée auparavant. Le sol est tapissé de fleurs sauvages, et en son centre se dresse une vieille fontaine de pierre, couverte de mousse. L'endroit est paisible, presque magique, et je m'assois sur le bord de la fontaine, laissant mes pensées vagabonder.

Je repense à tout ce qui s'est passé depuis mon arrivée dans ce monde. Les rencontres, les révélations, les choix difficiles. Chaque décision que j'ai prise m'a menée ici, mais je ne peux m'empêcher de me demander si j'ai fait les bons choix. Le Loup, malgré ses efforts pour changer, reste une créature complexe, tourmentée par son passé. Les cochons, bien qu'animés par de bonnes intentions, luttent encore contre la peur et la méfiance qui les habitent.

Et moi ? Que suis-je censée faire dans tout cela ? Suis-je ici pour les guider, ou est-ce que je me trompe en pensant que je peux les aider à surmonter ces obstacles ?

Ces questions tournent en boucle dans ma tête, alimentant mes doutes. Je ferme les yeux, essayant de trouver un peu de calme dans le bruit de mes pensées, mais c'est en vain. Le poids de la responsabilité que je ressens devient presque écrasant.

Soudain, un bruissement de feuilles attire mon attention. J'ouvre les yeux pour voir une silhouette se dessiner à l'orée de la clairière. C'est Lupin, le plus âgé des louveteaux. Il s'approche de moi, son regard inquiet trahissant qu'il a perçu mon trouble.

- Lisa-Marie, tout va bien ? demande-t-il doucement, s'asseyant à côté de moi sur le bord de la fontaine.

Je lui adresse un sourire fatigué.

- Je ne sais pas, Lupin, dis-je honnêtement. J'ai l'impression que tout cela devient trop compliqué, que je perds le contrôle de la situation.

Lupin me regarde avec une sagesse qui dépasse son âge. Il semble réfléchir à mes paroles avant de répondre.

- Mon père me dit souvent que changer est difficile, dit-il. Mais il dit aussi que c'est la seule façon de grandir. Tu nous as aidés à commencer ce changement. Nous savons que ce ne sera pas facile, mais ça ne veut pas dire que ça ne vaut pas la peine d'essayer.

Je suis touchée par la maturité de ses paroles. Malgré son jeune âge, Lupin comprend la gravité de la situation et l'importance de persévérer. Je me rends compte que si lui, un louveteau, peut avoir cette force intérieure, alors moi aussi, je dois la trouver en moi.

- Merci, Lupin, dis-je en posant une main sur son épaule. Tes mots me rappellent pourquoi je fais tout cela.

Lupin sourit, un sourire qui illumine son visage, et je sens une lueur d'espoir renaître en moi. Peut-être que tout n'est pas perdu. Peut-être que ces doutes sont simplement une partie du chemin, des obstacles à surmonter pour atteindre notre objectif.

Alors que nous retournons ensemble à la cabane, je réfléchis à la manière dont je pourrais renforcer la trêve. Les doutes sont toujours là, mais ils ne me semblent plus aussi écrasants. Peut-être que ce dont nous avons besoin, c'est de plus de communication, d'une meilleure compréhension mutuelle. Je me dis que je devrais organiser une nouvelle réunion, un moment où tout le monde pourrait exprimer ses préoccupations sans crainte de représailles.

Lorsque nous arrivons à la cabane, je vois le Loup et les cochons en pleine discussion. Leur conversation semble tendue, et je décide d'intervenir avant que les choses ne dégénèrent.

- Attendez, dis-je en m'approchant. J'ai une idée. Nous devons parler, tous ensemble, de ce qui nous inquiète. Sinon, ces tensions finiront par nous diviser à nouveau.

Le Loup et les cochons me regardent, surpris, mais ils acceptent ma proposition. Nous nous asseyons autour de la table, et je commence à poser des questions, à encourager chacun à exprimer ses sentiments, ses peurs, ses doutes.

Nifnif est le premier à parler.

- J'ai peur, avoue-t-il en baissant les yeux. J'ai peur que tout cela ne soit qu'une illusion, que le Loup finisse par se retourner contre nous.

Le Loup écoute en silence, respectant le droit de Nifnif à exprimer ses craintes. Puis, il prend la parole à son tour.

- Je comprends ta peur, dit-il doucement. J'ai moi-même du mal à croire que je puisse changer, que je puisse laisser mon passé derrière moi. Mais je veux vraiment essayer. Pour mes enfants, pour vous, pour nous tous.

Les autres cochons prennent également la parole, chacun exprimant des doutes similaires, des craintes ancrées dans des années de méfiance. Mais peu à peu, en parlant, en écoutant, je sens les tensions s'apaiser, la méfiance s'effriter.

- C'est ça, la clé, dis-je en les regardant tous. La communication. Nous devons continuer à parler, à nous comprendre, même lorsque c'est difficile.

Le Loup hoche la tête, puis prend une grande inspiration, comme pour marquer un moment de réflexion.

- Nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir, dit-il, mais je crois que nous pouvons y arriver, ensemble.

Je ressens une nouvelle énergie, une nouvelle détermination. Mes doutes ne sont pas entièrement dissipés, mais je sais maintenant que je ne suis pas seule dans cette quête. Nous avons fait un pas en avant, et je crois qu'avec du temps et des efforts, nous pourrons maintenir cette trêve, la renforcer, et peut-être, un jour, trouver une véritable paix.

La nuit tombe, mais cette fois, je me sens plus légère en me préparant à dormir. Les doutes sont toujours là, bien sûr, mais ils ne sont plus écrasants. Ils sont simplement une partie du voyage, un obstacle parmi tant d'autres que nous devons surmonter.

Et avec cette pensée, je ferme les yeux, prête à affronter un nouveau jour avec une détermination renouvelée. Le chemin est encore long, mais nous avançons, un pas à la fois.

les trois petit cochons 2Where stories live. Discover now