CHAPITRE XIII - PARTIE II

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Hello !! A la fin de votre lecture, prenez une seconde pour lire la recommandation de lecture à la fin de ce chapitre et la note de l'auteur, merci 🤍



















Jeudi 31 octobre 1940, Vorselanges.

















Un silence abyssal règne sur la place de l'hôtel de ville, silence seulement rompu par le martèlement sinistre des bottes allemandes sur le goudron. Louise, qui nous a rejoint à la fin du repas pour fêter mon anniversaire, s'accroche à mon bras, un soutien émotionnel nécessaire pour assister à l'exécution. Entre deux foulées à l'écart de Marcel et Marie, j'ai pu lui souffler à l'oreille que l'opération serait dirigée par Hans alors je sens bien qu'elle essaie de m'apporter un réconfort qu'elle seule est en capacité de m'offrir.

Et ce réconfort est le bienvenu après les annonces des deux résistants à propos de l'action à mener pour protéger les camarades. La consigne tourne en boucle dans ma tête, mélodie lancinante et dévastatrice. Je ne sais pas si je suis capable de commettre un tel geste, non pas que je ne puisse pas le faire puisqu'Hans travaille tous les jours, là n'est pas le problème.

On parle ici d'une trahison, c'est ce dont il s'agit selon moi parce que je ne pourrais plus me regarder dans une glace si je venais à fouiller dans les affaires de l'officier alors que nous menons une relation sous le signe de la confiance mutuelle. La situation est déjà bien assez compliquée au regard du contexte sans qu'il faille rajouter cela. C'est sûrement de ma faute, je n'aurais jamais dû dire à mes amis que je logeais ces hauts gradés, cela dit ils auraient peut-être finis par le découvrir.

Et puis, à l'époque, je n'étais pas amoureuse de cet homme. Que de complications et de nœuds au cerveau. Je l'aime, mais il est allemand, un ennemi de ma patrie et si j'effectue cet acte, c'est dans l'optique de sauver mon pays.

Il est allemand... mais je l'aime, j'ai beau tourner le souci dans tous les sens possibles, la solution miracle n'existe pas. Et que pourrai-je dire à Marie et Marcel si je ne fais pas ce qu'ils m'ont demandé ? Ils se douteraient de quelque chose. Bon sang...Foutue guerre !

Je suppose que je dois faire ce qui me semble juste, facile à dire en temps normal. Advienne que pourra...

Retour sur la place de l'hôtel de ville, Marcel et Marie, se tiennent droit, leur regard sévère est rivé sur l'esplanade, maudissant chaque Allemand qui passe devant nous.

La foule des vorselangeais est présente, on se toise avec pudeur dans les rangs et l'atmosphère créé une drôle d'ambiance comme si cette exécution renforçait le fossé entre les occupants et les opprimés que nous sommes. Une solidarité muette se tisse entre les habitants du village ici présents et je ne saurais dire si cela me réconforte ou me met mal à l'aise au vu de ma position.

Le ciel s'est mué en une toile grise recouvrant le village comme les ténèbres s'abattant sur les pauvres gens. Le vent n'est qu'un souffle sempiternel à l'image des respirations d'agonie qui terrassent les personnes mourantes. Il s'immisce dans les pans de mon imperméable mal noué et s'infiltre à travers les mailles de mon gilet en laine, me glaçant jusqu'à l'os. C'est à peine si j'ose respirer.

Soudain, les portes de la Kommandantur s'ouvrent au loin, chacun retient son souffle alors qu'une horde de soldats casqués se ruent au pas de course sur la place. Les bottes claquent violemment sur le goudron, elles n'ont plus rien d'un son supportable, je ressens un mal-être profond se loger au creux de mon estomac. Comment puis-je jongler avec tous ces sentiments contradictoires...

Tels des marionnettes sans âmes, les bourreaux se rangent en ligne, fusils à la main, ils doivent être dix tout au plus, mais faut-il autant d'hommes pour en abattre un seul ?

À Ceux Qui Nous Ont OffensésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant