36 -La sorcière de l'Ouest (2/2)

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Nolwenn Mistigri —anciennement Pumkin — écarquilla les yeux comme si le roi des elfes en personne lui avait rendu visite.

— Rory ! souffla-t-elle, les larmes aux yeux. Mon petit écureuil des bois. Entre, entre, il fait froid dehors.

Si ni Roxanne, ni Rayman ne furent conviés, ils n'hésitèrent pas à emboiter le pas du jeune sorcier, très mal à l'aise devant sa génitrice. La jeune sorcière ne put s'empêcher alors de ressentir un pincement au cœur devant cette différence qu'elle n'osait cacher.

Les murs de la maison étaient peints en jade et blanc, aux couleurs du drapeau de la région de l'Ouest et ne présentaient pas la moindre trace de salissure. Les Pumkin n'avaient plus cette chance depuis qu'Arthus avait appris comment tenir un crayon et qu'il s'était amusé à refaire la décoration, ou encore depuis que Rondin s'était lassé des canapés pour aiguiser ses griffes.

A voir la propreté de la demeure de sa mère, Roxanne devinait qu'elle n'avait pas accueilli enfants ou animaux depuis bien longtemps.

— On dirait le palais des fées, admira Rayman qui ne se gêna pas pour fouiller des yeux chaque étagère. Tout à sa place et rien ne déroge.

Bien que la maitresse des lieux fit mine de ne pas l'avoir entendu, Roxanne discerna, dans le reflet d'un des somptueux miroirs du hall, ses lèvres s'arrondirent de fierté. Elle proposa à Rory un siège et adressa enfin la parole à sa fille, d'un air désinvolte.

— Je n'ai pas de jus de fruits. Ton père va me reprocher quelque chose si je te sers de l'hydromysie ?

— Moi j'en prendrais volontiers, intervint Rayman, ce qui lui valut un regard noir de la part de la cheffe d'état.

Boisson de fête, l'hydromysie appartenait à la même famille que l'ambroisie, la nectalys ou le vinesye. Enivrantes à fortes doses, ces boissons étaient préparées à partir de poussière d'étoile, de plantes enchantées et d'une longue macération dans des tonneaux de bois.

— Sans doute, répondit Roxanne qui n'en avait jusqu'alors jamais goûté —du moins, rien de plus qu'y tremper les lèvres— je vais prendre de l'eau.

— Oh non, non, non. Tant mieux ! Si ça peut énerver ton père, je t'en sers un verre. Deux même.

Elle déboucha la bouteille et remplit trois coupes de nectar argenté avant de les tendre à son fils chéri et à sa fille.

— Et moi ? grommela Rayman qui louchait sur le verre de Roxanne.

— Toi, tu raccompagneras Roxanne chez elle si elle se sent mal au second verre. C'est ça ou Dehors !

Elle porta ensuite une coupe à ses lèvres et la vida d'une traite, à moitié assise sur la table. Bien que Roxanne ait hérité de ses cheveux roux, ceux de sa mère étaient lisses, soignés et  ordonnés dans un chignon guindé tandis qu'elle bataillait régulièrement contre les frisottis de sa crinière, et les boucles inégales.

— Alors, qu'est-ce qui vous amène chez moi en ce jour de fête, loin de votre père et de Bécassine ? s'enquit-elle, une lueur malicieuse dans le regard.

Sans doute espérait-elle des critiques à l'égard d'Alissa ou de leur père, ce que ni Rory , ni Roxanne ne lâcheraient, même pour tout l'or du monde.

— Elle s'appelle Alissa, rugit Rory, agacé. Et ça fait plus de huit ans maintenant, il serait temps de te comporter en adulte et de passer à autre chose. Je te rappelle que tu as demandé le divorce...bien avant leur rencontre.

Les doigts de la sorcière se resserrèrent autour du pied de sa coupe.

— Ça ne m'empêche pas de la détester, fit-elle d'une voix posée mais trahissant son mépris. Elle m'a volé mon fils.

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