43 - Sous le feu de l'ennemi

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 Je regarde Max, bouche bée, n'en croyant pas mes yeux, puis je comprends qu'il était en haut. Depuis le toit, il a sauté dans la chambre, les pieds en avant, et il a explosé la vitre. Alors qu'il se relève, je vois du coin de l'œil la poignée de la porte s'ouvrir.

    Nos adversaires veulent profiter de cette diversion. Je pivote vers l'entrée et je tire une fois sur l'homme qui apparaît dans l'entrebâillement. Je ne me demande pas de qui il s'agit. Peu importe.

    La silhouette saute sous l'impact et recule précipitamment avec une exclamation. Mon cœur fait un bond dans ma poitrine : j'ai atteint la cible ! J'identifie la voix qui crie de douleur, c'est Mallard que j'ai touché et blessé. Je m'en félicite aussitôt.

    Max est près de moi en une seconde.

    – Bien joué !

    Il dégaine son Glock et annonce calmement :

    – Maintenant, je gère.

    Je le mets au courant des derniers événements en quelques phrases hachées :

    – Berettini est dans le couloir. Mallard est avec lui. Peut-être d'autres, je ne sais pas. Un certain Rachid en bas.

    – Rachid est mort, personne d'autre pour l'instant, déclare Max avec un sang-froid que je lui envie.

    C'est à cet instant qu'Ariane sort de sa cachette et nous rejoint au centre de la chambre. Elle aussi a l'air parfaitement flegmatique. Avec un détachement qui me surprend moi-même, je me dis que nous formons une équipe soudée au milieu de la tempête.

    Une voix s'élève de derrière la porte.

    – Max ? C'est bien toi ?

    Max sourit largement.

    – Salut Serge. Tu viens de buter ton boss ? Depuis le temps que tu en rêvais !

    – Sors de là, Max. Tu ne peux pas fuir et tu le sais.

    Max se tourne vers nous.

    – Partez par le toit. C'est faisable, je vous le promets.

    Ariane va à la fenêtre, se penche au-dessus du vide puis se tourne pour regarder vers le haut.

    – Tu es dingue ! Moi je n'y arriverai jamais.

    – Mais si. Tess te poussera pour que tu agrippes la gouttière. Puis j'aiderai Tess.

    Sa voix encourageante n'a aucun effet sur Ariane qui se contente de secouer la tête. Max se colle contre la porte pour la maintenir fermée. Il vérifie que, hélas, il n'y a aucun verrou, et me demande :

    – Combien as-tu de balles encore ?

    – Quatre.

    Je m'étonne que ma voix ne tremble pas en annonçant ce chiffre si ridicule. Max me fixe intensément.

    – Va-t'en, Tess, tant que tu peux. Moi je les retiens.

    Horrifiée, je secoue la tête, refusant son sacrifice. Je n'accepterai pas qu'il meure pour protéger ma fuite.

    La porte contre l'épaule de Max tremble et s'ouvre un peu. Je me précipite pour ajouter mon poids contre le chambranle.

    Des tirs d'armes à feu retentissent. Deux balles traversent la porte, nous frôlent et vont se planter dans le mur du fond. Ariane crie, sous l'effet de la surprise et de la peur.

    Instinctivement, j'ai reculé.

    La porte s'entrouvre.

    Max se tient devant la porte à son tour et tire une fois à travers, sur un assaillant ou dans le vide. Lui-même l'ignore probablement. Il avance, sort la tête dans le couloir, puis me lance :

    – J'y vais !

    – Mais...

    Il s'élance hors de la chambre tout en actionnant son arme. Il est fou ! Pas question que je reste en arrière. Pas question que je le vois mourir. Je le suis, et je tire mes dernières balles par-dessus son épaule, vers le bout du couloir où deux silhouettes battent en retraite.

    Ils ne sont que deux : Berettini et Mallard.

    Je vois de larges gouttes de sang sur le sol : celui de Mallard sans doute. J'espère qu'il est atteint grièvement.

    Max cesse de tirer et lance à voix haute :

    – Tu te sens seul, Serge ? Tous les autres sont morts !

    La voix de Berettini vient de plusieurs mètres devant, au niveau du palier.

    – Tu es mort toi aussi, Max ! Si tu comptes sur ta copine pour te sauver, tu délires !

    Je baisse le bras après avoir entendu un clic. Plus de balles, je suis désormais impuissante. C'est la fin cette fois.

    Je pense à Ariane. Berettini se débarrassera des corps et ne laissera aucune trace. Ses trois victimes seront portées disparues pour toujours. Mélina restera seule sans jamais comprendre ce qui nous est arrivé.

    Il y a un instant de silence, un temps de respiration, avant l'hallali.

    J'entends alors un bruit de voitures, le rugissement des moteurs, le crissement des pneumatiques. Je suis envahie d'un fol espoir, pensant que la police débarque après mon appel affolé. Puis la raison reprend le dessus ; c'est trop tôt. J'ai certes l'impression qu'il s'est écoulé une éternité, mais je sais bien que ce n'est qu'une illusion : quelques minutes à peine. Les véhicules de patrouille sont encore garés devant le commissariat...

    Le gravier devant la maison crisse sous les voitures qui stoppent. La voix de Berettini s'élève, triomphante :

    – Voilà mes renforts, Max. C'est fini.

    – Tu crois ça ?

    Max a utilisé un ton tellement ironique que je me penche pour écouter. Mes jambes tremblent. J'essaie de calmer mon cœur qui résonne dans ma poitrine, car il étouffe les sons montant du rez-de-chaussée. Des exclamations et des bruits de pas se font entendre et percent le brouillard de peur qui m'enveloppe.

    Berettini a mentionné des renforts. Cependant, un cri strident de gyrophare recouvre le reste.

   

Que vengeance soit faite (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant