10 - Les noms des coupables

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      Alors que nous roulons, Max me déclare :

     — Je suis content que tu me fasses confiance.

     — Ne t'emballe pas. J'ai surtout des questions à te poser. Pour quel gang travailles-tu ?

     — Il n'a pas de nom, sauf celui du boss : Paolo Serrone.

     — Connais pas.

     — Je ne suis pas étonné. Il fait profil bas tant qu'il débute.

     — C'est un Italien ?

     — Un Français d'origine italienne. Sa famille avait des attaches avec Francis le Belge.

     Le fameux parrain de la mafia marseillaise est mort en 2000. Depuis, Marseille est la proie de gangs rivaux et ultraviolents. La sauvagerie est montée crescendo depuis 2010.

     — Quel est son but ?

     — Le même que pour tous les autres, mettre la ville en coupe réglée. Mais Serrone sait que le trafic de drogue est tenu par les gangs des cités. Aujourd'hui, c'est presque impossible de rivaliser avec eux. Alors il s'est replié sur le racket, qui est sa principale source de revenus. Il étend aussi ses vues sur les jeux d'argent, les boîtes de nuit, le trafic d'armes. Il est en train petit à petit de s'élever, pendant que Yoda et DZ Mafia se massacrent pour le contrôle des points de deal.

     — Et toi, quel est ton rôle ?

     Max ne répond pas et se gare devant une entreprise. Je lis : « location de box » sur la façade. Il descend de voiture et je le suis jusqu'à l'intérieur du grand hangar. Max sort une clé de sa poche et ouvre un des box, où les particuliers entreposent des affaires qu'ils ne peuvent garder chez eux. J'ai le même pour les peintures de mon père... Max prend une boîte qui repose sur le sol et l'ouvre. Je me penche pour voir le contenu : un pistolet. Je sais faire la différence : sans barillet, c'est un pistolet, pas un révolver.

      — Voilà l'arme qui t'a blessée, annonce Max d'une voix neutre.

     Je reste silencieuse, le ventre noué. Je me refuse à toucher cette horreur.

     Max, du reste, ne me le propose pas. Il referme la boîte.

     — Je te donne l'arme. C'est pour te montrer que je suis sincère. Je prends un risque aussi en te faisant confiance. Maintenant, tu peux me faire arrêter, si tu veux. Tes amis flics sauront faire le lien entre l'arme et la balle que tu as gardée. Mais si tu veux poursuivre, tu dois me faire confiance.

     Il me tend la boîte et je la prends.

      — Mon rôle, poursuit Max comme s'il ne s'était pas interrompu, ne va pas te plaire : j'ai tué des gens pour Serrone. Notamment les quatre dont tu as lu les noms sur les coupures de journaux.

     Je le regarde avec horreur.

     Je me remets doucement de la révélation de Max. Ce n'est pas une surprise, mais c'est quand même perturbant de savoir que j'ai un tueur de sang-froid en face de moi.

     — Comment passe-t-on d'employé de banque à tueur ? demandé-je en me contraignant à rester calme.

     — Je n'étais pas un employé normal. C'était un job temporaire que Serrone m'avait demandé de prendre pour préparer le braquage. Tu as bien compris que l'objectif n'était pas l'argent.

     — Non, c'était l'enveloppe dans le coffre 14-18.

     — Tu te souviens du numéro, ça ne m'étonne pas. Est-ce que tu sais pourquoi le chef voulait te voir morte après ça ?

Que vengeance soit faite (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant