La mélodie du bonheur

Chapitre 8

"La famille ne doit pas être parfaite, elle doit être unie quoi qu'il arrive." Citation anonyme

Point de vue de West

Quand je passe l'entrée du Nouna, drapée de son silence, je soupire de satisfaction. Enfin la paix. Ma mère et ma frangine ensemble, très peu pour moi. Elles sont aussi têtues l'une que l'autre et l'ambiance devient insupportable lorsqu'elles cherchent à avoir le dernier mot. La tension était telle que Ty met tout le monde d'accord en se tapant une crise de pleurs. Il sait attirer l'attention sur lui et parvient à ramener un semblant de paix. Quant à moi, j'en ai profité pour m'éclipser sans un mot.

Il faut qu'elles trouvent un terrain d'entente, sinon... Je secoue la tête et préfère ne plus y penser. Je dépose mes clés sur le comptoir et décide de me détendre. Une guitare sèche en main, mes doigts volètent sur les cordes, balayant mes préoccupations du moment. Les yeux fermés, je joue un morceau de ma composition en un rythme lent. Le plaisir au bout des lèvres, j'improvise une mélodie plus cadencée. Tout s'enchaîne avec fluidité, comme si je faisais plus qu'un avec l'instrument.

J'imagine la voix de Nouna m'accompagner. À travers son grain de voix grave aux notes aériennes, elle captivait quiconque l'écoutait. Moi le premier. Quand la dernière note retentit, je me rends compte à quel point elle et ses conseils me manquent. Elle aurait su gérer sa fille et sa petite-fille. Je suis arraché à ma nostalgie par un applaudissement. Mes yeux se rivent sur la silhouette colorée d'Ellie, adossée au bar. Elle me sourit comme si ce jam la rendait heureuse pour moi.

― T'es vraiment bon. Nouna aurait adoré.

Elle me connaît mieux que personne.

― C'est un morceau que j'ai imaginé pour elle.

― Je le savais ! réplique-t-elle en me dédiant un clin d'œil.

Elle fredonne ma composition, puis me rejoint en balançant son corps dans un rythme lent, presque sensuel. Elle s'assied sur ma cuisse, un bras autour de mes épaules.

― Et je vais te répéter ce que Nouna aurait dit, me déclare-t-elle en se raclant la gorge. "Tesoro, je vais appeler mon amico, Lenny. Il va te signer !

Ellie joint son imitation aux gestes. Elle encadre ma mâchoire de ses doigts, puis enchaîne :

― Et cette fois-ci, tu vas accepter pour ta Nouna."

Je secoue la tête en me marrant, puis j'embrasse sa chevelure aux reflets bleutés.

― Dans le mille.

C'est vrai, j'adorais me joindre à elle lors de ses tournées. Je l'accompagnais soit à la guitare, soit à la contrebasse. Les fins de soirée étaient toujours suivies de jams en petit comité de passionnés. Même si c'est l'improvisation qui dicte la performance, l'univers du jazz est avant tout une écoute pour s'adapter aux autres musiciens.

― Nouna continue à vivre en chacun de nous, me confie-t-elle avec tendresse. Alors compte sur moi pour te faire changer d'avis.

― Quand je joue de mes compositions, c'est uniquement pour lui rendre hommage, pas contre du fric.

― C'est honorable de ta part, mais ne gâche pas ton talent. Compose pour d'autres groupes ou chanteurs. Tu pourrais te faire un paquet de fric. Parce que...

Elle balaye sa réflexion d'un geste de la main.

― Non, laisse tomber. Comment ça se passe à la maison ?

J'émets un soupir désabusé.

― Notre mère fait des efforts, mais son inquiétude met tout le monde à cran. Kristen reste la plupart du temps sur la défensive.