Victoria
24 décembre.
Miami, 18h00.La neige tombait en abondance depuis trois jours déjà, recouvrant la Floride d'un manteau d'un blanc éclatant. C'était une rareté presque mythique, quelque chose d'irréel dans cet État où la chaleur régnait d'ordinaire. Les flocons dansaient doucement dans l'air, transformant le paysage en un tableau féerique. Mais ce spectacle, aussi beau fût-il, ne parvenait pas à apaiser le tourment qui habitait mon cœur.
Cette année encore, Sofía se sentait coupable de me laisser seule pour Noël. Elle partait rejoindre sa famille pendant les fêtes et revenait seulement après quelques jours. Malgré mes assurances que cela ne me dérangeait pas, elle s'en voulait toujours. Cette culpabilité la rongeait, et je la voyais dans chacun de ses sourires un peu trop forcés à l'approche des fêtes.
Elle avait des liens forts avec les siens, un amour évident et indéfectible. Moi, je n'avais plus personne, et cette pensée me mordait à chaque fois un peu plus profondément. Alors, après de longues minutes passées assise sur un banc du parc, à regarder la neige recouvrir la ville, je me levai et décidai de marcher.
Mes pas crissaient sur la neige fraîche tandis que je traversais les allées désertes. Des enfants couraient, tentant d'attraper les flocons dans leurs petites mains, leurs rires emplissant l'air glacé. Je les observais avec une envie étrange. Ils me rappelaient moi, bien avant que ma vie ne se transforme en une suite d'épreuves. Leurs rires étaient comme des lames, effleurant les plaies ouvertes de mon passé.
Je détestais cette nostalgie, cette sensation amère qui me ramenait aux souvenirs d'avant. Noël, en particulier, était devenu insupportable. Il me rappelait le jour où j'avais quitté mon pays natal, où j'avais tout laissé derrière moi. Ce jour-là, en Russie, il avait neigé aussi, comme un cruel clin d'œil du destin.
Finalement, c'est peut-être moi, le Grinch.
Depuis mon arrivée aux États-Unis, chaque Noël s'était réduit à une soirée solitaire dans un bar. Je m'y noyais dans l'alcool, entourée d'autres âmes égarées, maudissant ceux qui pouvaient encore sourire et célébrer. Les rires et les voix festives résonnaient toujours autour de moi, mais ne faisaient qu'amplifier mon isolement.
J'allumai une cigarette, la fumée se perdant dans l'air glacial. Mes talons résonnaient sur le pavé gelé tandis que je quittais le parc, marchant sans but précis. La ville, enveloppée dans une couche de verglas, semblait avoir ralenti, presque arrêtée. Le calme m'apaisait un peu. Les flocons de neige dansaient sous les lampadaires, et pour la première fois, je pris le temps d'apprécier cette tranquillité rare, loin du chaos habituel de la ville.
Je glissai légèrement sur une plaque de glace, riant seule de ma maladresse dans ce décor féerique, comme si la neige m'offrait une danse imprévue. Je ne riais pas souvent ces derniers temps, et ce moment, aussi bref soit-il, me surprit.
Je finis par entrer dans une supérette, une petite cloche tinta au-dessus de ma tête. La chanson "Rocking Around The Christmas Tree" de Brenda Lee flottait dans l'air, joyeuse, presque moqueuse.
Les rayons étaient presque vides, tristes témoins d'une fête qu'ils ne semblaient pas vraiment célébrer. L'éclairage clignotait, projetant des ombres étranges sur les murs. Je me dirigeai vers les surgelés, cherchant un plat de pâtes aux champignons, lorsque j'entendis une voix familière.
— Putain, même ici, il n'y a plus rien, râla une voix frustrée.
Je m'approchai en silence, un petit sourire au coin des lèvres.
— Tu parles du champagne, non ? lançai-je avec une pointe de sarcasme.
Ezra tourna la tête vers moi, son visage s'illuminant à ma vue. Il portait l'un de ses affreux pulls de Noël, avec un renne au nez rouge qui me tira une grimace.
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𝐀𝐥𝐥 𝐓𝐡𝐞 𝐋𝐢𝐞𝐬
Romance𝙳𝚎́𝚌𝚎𝚖𝚋𝚛𝚎 𝟸𝟶𝟸𝟶, 𝚁𝚞𝚜𝚜𝚒𝚎. 𝙇𝙖 𝙛𝙪𝙞𝙩𝙚 𝙣'𝙚𝙨𝙩 𝙥𝙖𝙨 𝙩𝙤𝙪𝙟𝙤𝙪𝙧𝙨 𝙪𝙣 𝙖𝙘𝙩𝙚 𝙙𝙚 𝙡𝙖̂𝙘𝙝𝙚𝙩𝙚́ ; 𝙥𝙖𝙧𝙛𝙤𝙞𝙨, 𝙘'𝙚𝙨𝙩 𝙪𝙣 𝙘𝙧𝙞 𝙙'𝙚𝙨𝙥𝙤𝙞𝙧. Tandis que j'errai dans les ruelles de Kazan, la neige gelée tom...