Le premier jour, on a fait trente kilomètres avant d'arriver à l'étape du soir. À midi, on ne s'est pas arrêté. Je me suis dit qu'il fallait en faire le plus possible avant qu'ils commencent à râler, et j'avais raison. On a fait sortir les moutons, ils ont bu au ruisseau et mangé comme si de rien n'était. Ceux qui ne gardaient pas ont nourri les bêtes et préparé un repas froid pour tout le monde. Après, je leur ai conseillé de dormir le plus possible. On a organisé des tours de garde, et la nuit s'est passée tranquillement.
Au matin, on a rentré les moutons dans la bétaillère, ramassé nos affaires et on est repartis, après avoir vérifié que tout le monde était là. Même ordre que la veille, sauf que les gardes traînaient la patte. La distribution des casse-croûtes fut chaotique, tout le monde réclamait un arrêt et râlait ferme. J'étais trop concentrée sur mon système d'alarme qui commençait à teinter. J'ai envoyé Pierre leur dire de se taire et de se préparer à se battre. La colonne s'arrêta. Ils allaient l'avoir, leur étape, mais restait à savoir combien allaient survivre.
Isabelle envoya son bouclier sur le troupeau et les chariots ; les femmes et les enfants à l'intérieur étaient à l'abri. Bruce et moi, on a rejoint les autres. J'avais encoché une flèche, prête à voler vers sa cible, mais je gardais mes yeux sur les formes de vies qui approchaient. Une vingtaine d'individus, armés et d'apparence sanguinaire, dans le style des écumeurs, arrivaient par devant. J'envoyai un signal d'alerte vers Luc : une dizaine d'autres arrivaient à revers.
Pour l'instant, ils se cachaient, se demandant pourquoi nous nous étions arrêtés. Ils évaluaient leurs chances et trouvaient amusant de nous voir si peu nombreux. Dans leurs pensées, je pouvais lire "facile". Bruce lisait les mêmes choses que moi, et je l'entendais laisser échapper un petit rire sarcastique. Que savait-il que j'ignorais ?
Mon fils me regardait, les yeux pétillants de malice :
« Regarde ce qu'on sait tous faire, maman, regarde et fais comme moi. »
Il avait déjà aveuglé les cinq plus proches de nous, qui se mirent à hurler de terreur. Je découvris en moi la même capacité et envoyai un message aux autres "blancs". Bientôt, ce ne fut que hurlements de terreur autour de nous. Pierre hurla à son tour pour se faire entendre :
« Qu'est-ce qui se passe ? »
« Ne t'en fais pas, c'est nous. On a trouvé un moyen. Je te raconterai après. Fais repartir la colonne ; on les retient ici le temps que vous preniez de l'avance, et on vous rejoint. »
Pierre exécuta mes ordres, et Isabelle resta avec eux pour les protéger en cas de besoin. Les "blancs" qui restaient suffisaient largement à maintenir les écumeurs à distance, plus préoccupés par leurs yeux aveugles que par les chariots qui s'éloignaient.
Je voyais dans leurs esprits le désir de tuer celui qui les avait rendus aveugles, et leur volonté de poursuivre les chariots pour massacrer tous ceux qui étaient dedans, par pure vengeance et soif de sang dès qu'ils retrouveraient la vue. C'était des images ignobles, pires que celles des animaux. Bruce me regarda :
« Ils ne sont plus humains, maman. Ils ne veulent que tuer, ils ne savent même plus ce que sont les mots. »
Luc intervint à son tour :
« Tu crois qu'on peut effacer leurs mémoires ? »
Je réfléchissais à toute vitesse. Si on leur rendait la vue, ils poursuivraient la colonne. Effacer leur mémoire, c'était possible à trois, mais nous n'aurions pas le temps de leur reconstruire une histoire. Ils avaient suivi le fil de mes pensées et étaient déjà d'accord. Ils commencèrent à effacer la mémoire des écumeurs qui sombraient un par un dans l'inconscience, les laissant à la merci du moindre danger. Bientôt, le silence régna autour de nous : il ne restait plus que nous. Les pirates ne se réveilleraient pas ; ils étaient tous plongés dans le coma. Leur violence était telle que, même avec la mémoire effacée, ils n'avaient qu'une idée : tuer. Les garçons n'avaient pas eu d'autre choix. Luc était bouleversé, pensant que son père aurait pu devenir comme ça si nous n'avions pas reconstruit sa mémoire. Bruce le rassura, mais n'en était pas certain. Quant à moi, les bras ballants, je n'osais rien dire.
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le cycle des protecteurs -1er tome :le voyage de mère
ParanormalCathy, survivra t-elle a la fin du monde ? elle devras se battre pour atteindre son but, dans une France détruite comme le reste du monde. elle fera face à de terribles dangers, tout au long de son chemin, elle se fera des amis mais surtout elle dev...