Chapitre 9/ LES FIANÇAILLES

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Au pied de la falaise que nous avions vue, il y avait un immense lac alimenté par une cascade. Un vrai joyau entouré de roseaux et de saules pleureurs. Il y avait des canards, des oies, des hérons, des aigrettes blanches, même un couple de cygnes qui avait élu domicile sur une petite île. C'était un endroit idéal pour moi, et Pierre partageait mon avis : il espérait pouvoir se remettre à la pêche. Je me suis dévêtue en riant et j'ai plongé dans l'eau fraîche. Pas de souci, il y avait du poisson. Bien sûr, Pierre m'a suivie. C'était un moment extraordinaire que je voulais garder gravé dans ma tête. Nous savions exactement où construire notre maison, et nous avons commencé à imaginer comment elle serait, en pensant à nos enfants qui joueraient dehors en riant, et aux soirées où nous regarderions ensemble les étoiles, assis sur une balancelle sous la véranda.

Nous avons passé la nuit à la belle étoile, sans besoin de bulle de silence autour de nous. Nous nous sommes endormis après l'amour, blottis l'un contre l'autre. Je fus réveillée par le soleil qui jouait à travers les branches d'un arbre et par le chant des oiseaux. Une odeur de poisson grillé flottait dans l'air. J'ai ouvert les yeux pour voir le sourire de Pierre, ses yeux pleins de rires et d'amour. Il m'a embrassée :

« Alors, ma petite sorcière paresseuse, tu n'as pas faim ? »

J'avais plus que faim ; je dévorais les poissons que Pierre avait pêchés bien avant mon réveil. Je mourais de faim.

Je regardais Pierre avec insistance, ne sachant pas trop comment faire pour le tester. Malgré tout l'amour que j'avais pour lui, je devais le faire pour la sécurité des humains. Il finit par me demander ce que j'avais, inquiet :

« Ça ne va pas, mon ange ? Ce sont les petits ? Le poisson ? »

Je finis par me lancer :

« Pierre, je m'inquiète pour toi. Je ne suis pas sûre d'avoir bien agi en te changeant. Tu es en train de muter. »

« Ça, je le sais, j'ai vu mes yeux. Ça commence à se voir, mais j'apprécie qu'on ne puisse plus entendre mes pensées à cause de toi, ma petite sorcière. Et puis, c'est sympa de marcher près de toi sans souffler comme un phoque. »

« Je marche si vite que ça ? »

« La moyenne pour un humain est de sept kilomètres par heure. Toi, tu dois faire dans les 15 ou 20 kilomètres à l'heure sans te presser. Maintenant, je marche comme toi, sans souffrir. »

« Tes yeux changent, mais pas tes cheveux. J'ai besoin de savoir. Pour moi, ça s'est fait en une nuit ; je me suis réveillée mutée. Mais toi, ça fait plusieurs jours... »

« Peut-être que ça se fera plus tard, ou plus lentement ? Ou alors que je ne muterai pas complètement. C'est grave ? »

« Grave, peut-être pas. Je n'en sais rien, je n'ai pas de point de comparaison. Je n'ai jamais fait muter personne. Mais ça m'inquiète. Je sais qu'il y a des mutants qui n'ont pas le même point de vue que nous par rapport aux humains. J'ai peur que tu changes, que tu ne sois plus toi... j'ai peur de te perdre. »

« Les mutants sont le reflet de ce qu'ils étaient avant de muter. Regarde-toi : tu aimes les gens, l'humanité. Tu as une vision très claire de ce qu'il faut faire pour qu'ils soient heureux, et tu suis ton idée dans ce sens. La preuve : tu as construit tout un monde et tout un village, et tu oublies ta propre maison. Tu les fais passer avant toi et avant ta sécurité. Tu étais déjà comme ça avant de muter ; j'en ai parlé à ton père. Tu as toujours eu envie d'aider les plus faibles, les plus fragiles. »

« Oui, mais tu fais quoi de Bruce ? »

« Bruce a eu la chance d'avoir une bonne maman. S'il avait été élevé par quelqu'un de mauvais, il aurait appris à être mauvais, même s'il a un bon fond. »

le cycle des protecteurs -1er tome :le voyage de mèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant