Chapitre 13 le Procès

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Je finis par prendre la parole :

« C'est vrai, on doit poser des règles, pour le but que nous nous sommes fixé de protéger les humains. La protection ne doit pas se limiter qu'au danger physique. Et nous leur faisons aussi prendre des risques mentaux. »

Pierre reprit :

« Tu permets, mais pour les risques mentaux, je suis le mieux qualifié pour en parler. Je ne vois pas où nous pouvons être sources d'inquiétude. »

Bruce intervint à son tour :

« Mais ça fait rire les enfants quand je le fais devant eux, ça ne leur fait pas peur. »

Nicolas dit :

« C'est vrai, mais il n'y a pas que des enfants sur le plateau. Parfois, je ressens la peur d'un adulte quand je m'approche. »

Sophie s'y mit à son tour :

« En tant qu'humaine modifiée, je n'ai plus peur, mais avant, oui, donc je comprends ce que dit Éric. Mais c'est à vous de trouver les bonnes règles. Lui et moi ne pouvons que vous dire si elles seront bonnes ou pas pour les humains. Et je ne suis même pas sûre que nous soyons les mieux placés pour ça. »

Nous avons passé la nuit à chercher des règles qui ne s'appliqueraient qu'aux protecteurs, présents ou à venir. Ce ne fut pas si simple. La première règle était : plus de transformation au village, sauf cas d'extrême urgence. Nous devions prévoir, en dehors, une zone de transformation hors de vue. Nous devions entrer en tant qu'humains dans les zones humaines.

La deuxième règle n'en était pas vraiment une. Il s'agissait de la création d'un sanctuaire, hors de portée des humains. Un endroit pour apprendre et s'amuser à nos jeux. Mais où le construire ? Pas sur le plateau ni le haut plateau. Il faudrait aller encore plus haut.

Nous devions aussi rechercher d'autres humains dans le monde d'en bas, ceux-là n'avaient pas Nicolas pour les guider, mais il devait toujours y avoir un d'entre nous sur le plateau. Éric semblait satisfait de notre façon d'envisager les choses, autant pour nous que pour les humains. La réunion prit fin avec les premières lueurs de l'aube. J'étais triste. Les décisions prises étaient nécessaires, mais elles établissaient aussi deux tribus, deux races différentes. Je revoyais les bûchers de l'inquisition qui brûlaient dans la tête des fous de Dieu, en redescendant chez moi. J'avais demandé un délai pour réfléchir et donner mon accord. J'allais dans mon bureau en arrivant, claquant la porte sans m'en rendre compte. Assise à mon bureau, face à la vue sur le lac, je me mis à sérieusement réfléchir. Je ne vis pas le temps passer, je ne me rendis pas compte de la venue de la nuit, ni du jour qui se levait. Je réfléchissais encore.

Le deuxième soir, Pierre vint frapper à ma porte. Personne ne m'avait vu, ni n'avait pu rentrer en contact avec moi depuis deux jours. En claquant la porte de mon bureau, je m'étais enfermée dans mes pensées. Je me servais de ma propre barrière pour m'isoler du monde. Pourtant, je l'entendis frapper ; il portait un plateau recouvert de nourritures et d'une carafe d'eau. Je réalisai que j'avais soif.

Mon corps engourdi, j'avais du mal à bouger. Pierre me servit. Il avait le regard inquiet, je le rassurai, je n'avais fait que réfléchir. J'avais pris ma décision : il nous fallait des règles de vie, mais pas celles qui avaient été prises sur le haut plateau. Je lui annonçai ma décision de convoquer une réunion générale de tous les habitants du plateau. Il me regarda et m'embrassa le lobe de l'oreille, puis me murmura : « Pas ce soir, mon ange. »

Au petit déjeuner, l'atmosphère de la maison avait changé. Pierre et moi avions mangé seuls, en tête-à-tête. Bruce finit par pointer le bout de son nez, ayant eu peur de déranger. Je lui demandai d'emmener Éric au village.

le cycle des protecteurs -1er tome :le voyage de mèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant