le cycle des protecteurs -1er tome :le voyage de mère

Chapitre 15/mariage et conséquences

Débordante d'émotion, je finis par demander, avec un sourire tremblant :
« Combien de temps avez-vous passé pour me préparer tout ça ? »

Huguette me sourit et, d'une voix douce, répondit :
« Depuis ton départ sur le monde Mer, nous nous sommes réunies, nous, les femmes, et nous avons décidé de te faire ce cadeau. Bien petit à côté de celui que tu nous as fait. »

Je restai un instant muette, cherchant mes mots.
« Je n'ai rien fait d'aussi beau et d'aussi... gentil ? » balbutiai-je.

Elle secoua la tête doucement, comme une mère qui réconforte son enfant.
« Tu nous as offert bien plus. Un foyer où vivre avec nos enfants, en sécurité ; tu nous as donné un avenir et de l'espoir. Nous, nous ne t'offrons qu'une robe. »

Ce simple geste, pourtant si généreux, me bouleversait profondément. J'étais émue au-delà des mots, et pourtant, je devais tout ranger dans les malles, défaisant avec regret la jolie coiffure qu'elles avaient pris le soin de me faire. Pour garder le secret, je bloquai chaque souvenir de l'essayage, y compris les émotions que j'avais ressenties, même si mon cœur se serrait à l'idée de devoir tout dissimuler. Je ne savais presque rien de ce qui m'attendait, et ce peu de savoir me laissait rêveuse et... légèrement inquiète.

Deux jours plus tard, tout bascula. Alors que Pierre enseignait la pêche aux enfants, trois hommes aux cheveux blancs surgissent de nulle part et l'enfermèrent dans un grand sac. Les jumeaux, déjà avertis pour ne pas intervenir, s'écroulèrent de rire en voyant leur père emporté comme un colis par trois gaillards, hilares surnommés les "tontons kidnappeurs". C'était, comme je l'appris ensuite, pour son « enterrement de vie de garçon ».

Mais où l'avaient-ils emmené ? Que faisaient-ils pendant trois jours, et surtout : pourquoi était-ce aussi secret ? Isabelle, qui était restée avec moi par « tradition », posa la main sur mon bras et, avec un sourire de conspiratrice, murmura :
« Tradition ! »

Je me retins de rire nerveusement. Ainsi, mon fiancé était en vadrouille dans les mains de trois énergumènes... mais s'ils me l'abîmaient, ils auraient de sérieux comptes à rendre. Mes pensées dérivaient malgré moi vers lui, et je me mordis les lèvres, tentée d'utiliser mes dons pour découvrir ce qui se tramait, juste un peu. Mais non, je refusais toujours de lire dans l'esprit des autres, et je devais me contenter de mes questions sans réponses.

Peu après, ce fut au tour des enfants de quitter la maison. Apparemment, la « Tradition » exigeait que la future mariée reste seule avec ses demoiselles d'honneur pendant trois jours avant le mariage. Pas un homme ne devait nous voir. Huguette, qui n'était plus vraiment une « demoiselle », garda donc les enfants avec elle.

Elle me glissa même :
« Tu sais, la tradition veut que la mariée et ses demoiselles dansent nues sous la lune, pour la fertilité du mariage. » Son sourire en coin m'arracha un rire, et un frisson de gêne.

Pendant ces trois jours, je naviguais entre le rire et une inquiétude sourde. Que me réservaient-ils encore ? Et pourquoi un tel mystère ? Malgré moi, je ne pouvais m'empêcher de m'interroger sur la cérémonie elle-même. À quoi ressemblerait-elle ? Est-ce que tout allait bien se passer ? Mon cœur bondissait à cette idée, et j'étais de plus en plus impatiente de découvrir ce qu'ils préparaient, tout en craignant de m'effondrer en larmes de surprise ou d'émotion le jour venu.

Ces trois jours sans enfants ni homme prenaient des allures de retraite étrange. Le calme qui régnait, ponctué de murmures complices entre les femmes, me laissait entrevoir l'importance de ces traditions, bien au-delà de ce que je pouvais imaginer. Isabelle, toujours à mes côtés, semblait lire dans mes pensées sans que j'aie besoin de dire un mot. Elle s'amusait de mon impatience et de mes questions voilées, répondant invariablement par un sourire espiègle et ce mot qui revenait sans cesse : « Tradition. »