Camp militaire Red Deer, janvier 2007, Alberta
Levi
Le mois de janvier à toujours été particulier. Symbole de renouveau, les flocons de neige balayent sur leur passage les souvenirs d'une année passée. Les missions se sont presque enchaînées ces dernières semaines et les réunions de préparation par la même occasion. Depuis quelques mois, j'ai l'impression de réellement faire partie de cette communauté. Non pas que le cœur y soit complètement, mais je m'y sens mieux. Les autres ne me traitent plus comme un criminel, mais bien comme un soldat, comme un frère d'armes. Je n'ai lié de vraie relation avec l'un d'eux, mais cela m'arrive de discuter avec des membres de mon escouade et ça me fait du bien. Je n'ai jamais été un grand fan d'interaction sociale, mais passer des mois comme le marginal que je suis à observer de loin les autres s'amuser, discuter et se faire confiance, c'est douloureux. Alors, parfois, je me laisse porter par la discussion et y intervient quelques fois. Je ne suis pas naïf, je sais que nous ne serons jamais de grands amis, mais ils ont la gentillesse de m'inclure. Même lors des missions, nous avons réussi à créer une réelle complicité de travail, si je peux appeler cela ainsi.
J'ai peur de m'y habituer. En fait, j'ai peur parce que je sais que je m'y suis déjà habitué. Les cauchemars n'ont pas diminué, les angoisses n'ont plus, le visage de Léo m'apparaît plusieurs fois par jour, sans que je puisse rien y faire. Mais j'essaie de me dire qu'ici, c'est mieux qu'ailleurs ?
Je ne sais plus qui je suis. Je ne veux pas être ici, et ailleurs non plus. J'aimerais appuyer sur un bouton reset et démarrer une nouvelle vie. Une nouvelle vie où je ne serai plus martyr de celle-ci.
Une nouvelle mission se prépare bientôt, à entendre les bruits de couloir. Personne ne sait encore quand, aucune réunion ne semble avoir été programmée, alors en attendant, je profite de ce calme. Je me suis habitué au rythme du camp, les entraînements qui durent des heures, les programmes d'études et de secourisme. Je suis dans le cours de langue depuis quatre mois maintenant, et même si j'apprends toujours des choses, je suis persuadé que cela ne me servira à rien. Je n'ai pas pour ambition de devenir professeur des écoles. J'aimerais bien découvrir les cours d'histoire, même si ce n'est que pour un mois. Avec trois heures de cours tous les vendredis, si j'ai bien retenu l'emploi du temps des différents programmes, je pourrais acquérir un peu de connaissance.
À l'inverse, j'aime beaucoup les cours de secourisme que donne la capitaine Collins une fois par mois. Je partais de zéro, et je peux assurer avoir appris un tas de choses. C'est ce côté du contrat qui ne m'a jamais dérangé, le sentiment d'aller à l'école et d'apprendre des choses, de me sentir moins en décalage avec les autres, moins stupide.
Le sol est couvert de neige, tout autant que les arbres de la forêt que je peux apercevoir de ma chambre. C'est mon premier hiver au chaud depuis sept ans. Lorsque Alex s'est marié et que je me suis retrouvé dehors, Léo m'a proposé de venir avec lui dans un vieux hangar. C'était pas le luxe, mais on était en sécurité la nuit et avec les quelques couvertures qu'on avait réussies à voler, on n'avait pas trop froid.
Ça me dégoûte. Je suis là, à dormir au chaud sans avoir à me soucier de comment je vais survivre la journée suivante pendant que Léo se fait dévorer par les asticots six pieds sous terre. Je grimace à cette vision. Pourquoi mon cerveau met-il toujours les choses les plus horribles dans mes pensées ? Je suis toujours obligé de me changer les idées en contraignant cet esprit tordu à s'intéresser à quelque chose de moins gore et dérangeant.
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Azurite - Tome 1&2
Lãng mạnL'OMS, Organisation Militaire Secrète du Canada. Un criminel, une capitaine, une réunion, une idée. Jane n'est pas militaire de métier, alors son intervention lors d'une réunion au QG de l'OMS ne passe pas inaperçue. Selon elle, Levi ne mérite pas l...
