𝟐𝟒. 𝐀 𝐠𝐥𝐢𝐦𝐩𝐬𝐞 𝐨𝐟 𝐮𝐬

96 9 6
                                        


Camp militaire Red Deer, octobre 2006, Alberta


Levi


Je m'ennuie affreusement. La nuit file et le sommeil ne vient jamais. J'ai envie de cogner et de me défouler, mais j'en ai marre de le faire seul. La solitude ne me quitte plus, comme si elle avait décidé qu'elle serait ma meilleure amie pour une durée indéterminée. Je suis affalé dans mon lit depuis des heures, mes démons grignotent petit à petit le semblant de stabilité émotionnelle qu'il me reste et je ne suis plus en mesure de les combattre seul. Je le sais, je n'arriverai pas à m'entraîner seul, et même si je le pouvais, je n'en ai pas envie. Désormais, il n'y a qu'une seule personne avec qui je ne ressens pas cette gêne atroce, c'est moins grave si c'est elle qui voit mes faiblesses et mes démons. Elle ne peut pas m'attaquer sans que je ne puisse l'attaquer en retour. En quelque sorte, c'est rassurant.

J'en ai marre, marre, marre. J'ai besoin de bouger, mais mon corps refuse de m'écouter. Si elle me rejette, la honte me dévorera pendant des jours. Je passerai pour un idiot, pour le pire des idiots. Je respire et respire encore, me disant qu'à trois, je me lèverai de ce matelas.

Un, deux, trois. Je ne bouge pas.

Un, deux, trois. Je ne bouge pas.

Je crie mentalement, épuisé de mon incapacité et la claque part. Mes doigts s'écrasent contre ma joue droite, et instantanément, des picotements s'y logent. Elle me brûle, mais mon corps semble s'être reconnecté à mon esprit. J'expire d'un coup sec et parvient à redresser mon buste. Ce qui m'angoisse ce n'est pas de sortir en douce, mais bien l'envie irrépressible de lui demander de m'accorder de son temps. Je doute qu'elle soit endormie, et je suis persuadée qu'elle aussi a des choses à extirper de son esprit, mais si je lui demande, elle n'aura plus aucun doute sur le fait que moi, j'ai des choses à faire taire.

J'enfile un pantalon de treillis et un t-shirt noir après être finalement sorti de mon lit. À part un jean, quelques t-shirts et pulls qui m'ont été donnés après mon arrivée ici pour les jours off, la tenue militaire est la seule que je mets. La question des goûts vestimentaire ne se pose pas au moins.




☆.。.:*・☆


Je ne sais même pas pourquoi je suis là, piqué comme un idiot devant sa porte, mais je finis par toquer. Deux coups simples, à peine perceptible, mais je sais qu'elle les a entendus, ou peut-être est-ce l'angoisse qui me fait croire ça. J'hésite à partir en courant ou à me cacher, mais ce serait encore plus ridicule que la situation dans laquelle je viens de me mettre. Lorsque la porte s'ouvre, dans une brutale lenteur, mon cœur semble rater un battement. Je remets toute ma vie et mes choix en question, comme si cet instant allait déterminer le reste de celle-ci. Alors que non, le pire qu'il pourrait se passer c'est qu'elle me rembarre. Son visage fatigué apparaît devant moi, plein d'incompréhension de me voir ici à une heure pareille. Elle ne dit rien pendant un temps qui paraît durer une éternité et les mots sont coincés dans ma gorge, refusant de les laisser sortir.

— Vous avez besoin de quelque chose ? souffle-t-elle.

Les mots ne sortent pas, je reste muet alors que pour une fois, j'ai envie de parler. Je me contente de la regarder avec ses yeux de chien battu et ma mâchoire contractée sous le stress.

Azurite - Tome 1&2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant