𝟐.

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Camp militaire de Red Deer, février 2009, Alberta.


Levi


Mon bus a plus d'une heure de retard. Mes pieds sont gelés malgré l'épaisse paire de chaussettes que j'ai enfilé en partant ce matin. Je triture mes doigts d'angoisse. Je ne cesse de me répéter que c'est une mauvaise idée. J'aurais pu être affilié à un autre camp, mais Lewis me voulait à ses côtés, et je n'étais pas vraiment en position de pouvoir négocier.

J'ai passé les dix derniers mois dans un centre de formation pour obtenir mon grade de capitaine. Et c'était tellement plus dur que l'année passée aux côtés de Jane. Là-bas, je n'avais personne pour me comprendre, personne pour soulager ma conscience trop lourde. Les entraînements ont été si durs, si éprouvants, je ne compte pas le nombre de fois où je ne pensais pas y arriver. Je n'imaginais pas qu'il me fallait savoir faire tout cela, en fait, ce n'est pas à ça que j'ai pensé. Il m'a fallu plus d'un mois pour prendre une décision, et les deux seules questions auxquelles je pouvais réfléchir étaient :

« Suis-je prêt à une vie de militaire ? »

« Suis-je prêt à la revoir ? »

Et même si je frémis à l'idée de revoir son visage, je ne suis pas encore prêt à affronter ce nouveau changement, ni à la faire rentrer dans ma vie à nouveau. Pourtant, je suis assis dans le bus qui me mènera à Red Deer. Avec son retard, je vais arriver en pleine nuit, mais Lewis a pris soin de m'indiquer la chambre où je vais dormir.

Sans vraiment prêter attention aux mots qui défilent sous mes yeux, je continue mon livre. Je le relirai, c'est sûr, je ne retiens absolument rien.

Le bus est presque vide à cette heure-ci, un homme regarde son téléphone un peu plus loin, à droite de moi, et j'aperçois deux autres personnes à l'avant. Je ne sais pas exactement dans combien de temps je serai là-bas, mais quelque chose me dit que le trajet sera long. Je finis par réussir à me concentrer sur ma lecture et n'en sors que lorsque le chauffeur annonce l'arrêt pour Red Deer. La propriété privée du camp est immense, mais elle est enfoncée dans la forêt, alors je dois encore marcher quatre bons kilomètres avant d'arriver devant l'entrée principale. Je suis fatigué et agacé de devoir encore marcher avant de pouvoir m'installer au chaud dans un lit propre, mais je n'ai aucun autre moyen d'y arriver, alors je me mets en route.

Le portail en bois devant moi me motive à avancer plus vite, signifiant que je suis presque arrivé ! Lewis m'a remis un double des clefs pour entrer dans le chalet. Malgré moi, je me fais le plus silencieux possible. Je n'ai franchement pas envie de croiser Jane ce soir, je préfèrerai m'annoncer correctement demain, quand tout le monde aura dormi. La porte d'entrée émet un petit claquement sec, mais trop bruyant à mon goût. Les vestiges du passé reviennent sans que l'on toque à leur porte, je me sens à nouveau comme un criminel, pénétrant dans une maison pour se faire un peu de blé.

Alors que j'avance à tâton dans ce lieu que je connais presque par coeur maintenant, la lumière du couloir principal menant à l'escalier et là où sont nos quartiers, s'allume.

— Toi !? s'égosille celle que je ne voulais pas rencontrer.

— Salut, Jane.

Ce sont les seuls mots que je suis capable de lui souffler.

— Salut ? Sa-salut !? Je... Qu'est-ce...

Son vis age se tord d'incompréhension, et je ne trouve rien à dire pour me justifier.

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Azurite - Tome 1&2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant