C H A P I T R E 2

13.1K 673 49
                                    


Ma respiration s'accélère encore, suivit d'un vertige et d'un mal de ventre. Ou plus tôt d'un haut-le-cœur. Je tiens toujours l'appareil et je veux absolument le garder. Ma vue redevient floue à cause des larmes. Et s'il leur est arrivé quelque chose...? Un bruit de sirène venue de nul part me surprend et interrompt mes pensées angoissantes. L'ambulance ? Les urgences ? Ils ont l'air tout près et pourtant, je ne vois rien. Les bruits résonnent dans ma tête, des voies, des roues qui font craquer les branches. Ils ne sont pas près de moi et pourtant, c'est tout comme. Et mon mal de tête récurrent revient, plus fort. Mes oreilles sont partout. Je grimace, ma main droite collée contre ma tempe, je pleure. Trop d'émotions d'un coup... Où sont les autres ?? Où je suis !! Je ne devrais pas être là !! Je ne devrais pas être vivante !!!

PLUS TARD

- Suivez la lumière.

Le médecin fait des allers-retours avec sa petite lampe à droite et à gauche devant mes yeux. Pendant ce temps, les médecins légistes, les enquêteurs et d'autres hommes munis de détecteur de métaux s'éparpillent sur le terrain. Ils cherchent... Que cherchent-ils d'ailleurs ?

- Il n'y a rien de grave docteur ? 

Mon père fixe l'urgentiste depuis tout à l'heure, mais il semble que celui-ci n'y fait pas attention.

Depuis que mes parents sont arrivés, ils ne me lâchent plus. Ils sont venus quelque temps après l'ambulance, les pompiers et les policiers. À ce moment-là, tout le monde paniquait... Sauf moi.

Je suis restée assise à l'arrière de l'ambulance avec ce drap de papier en aluminium censé préserver la chaleur corporelle. Je n'ai pas froid ! Ils m'ont déjà passé une doudoune ! À quoi ce papier d'aluminium me sert ?! Ils m'ont trouvé avec quasiment rien sur le dos, juste mes cheveux qui me couvraient la poitrine et un bout de tissu au-dessus de mes jambes qui ne me servait plus à rien, car il partait en lambeaux... Quand ils sont arrivés, j'étais recroquevillée, les bras encerclant mes jambes et les serrant contre moi, la tête repliée et mon appareil photo toujours intact dans une de mes mains. Et pourtant, je n'avais pas froid. Je devrais peut-être leur dire ?

Je regarde ma mère se ronger les ongles et mon père qui continue à se torturer et se sentir coupable de ce qu'il m'est arrivé, à nous. Il n'a pas cessé de me dire qu'il est désolé, qu'il n'aurait jamais dû me laisser y aller et quand il ne disait rien, il avait cet air de chien battu. Il me serre l'épaule avec sa main - ce qu'il sait faire le plus, car il n'est pas très câlin - et ma mère me serre la main aussi forte qu'il lui est possible, toujours les larmes aux yeux. Quant à moi, je me demande ce que je fais là et comment je peux être encore envie.

Après avoir suivi la lumière du regard, je laisse le médecin tâtonner mon pouls et vérifier ma respiration. Il note quelque chose - sans doute les résultats - sur un bloc. Je ne dis absolument rien. Pas depuis les quinze minutes où j'ai dû raconter ce qu'il c'était passé. Le médecin me regarde fixement, comme s'il cherchait une réponse dans mes yeux ou sur mon visage. Il fait la moue, fronce les sourcils et claque son stylo bille bleu sur son bloc. Un tic nerveux, un son qui me tape sur les nerfs à cause de mon ouïe développée. Je ne dis rien et me contente de regarder le stylo en me forçant de ne pas le lui arracher des mains pour le casser en deux. Je me mordille la lèvre et relève les yeux sur le docteur qui me fixe toujours. Il a des rides sur le front quand il fronce ses sourcils. Il faut que les gens cessent de faire ce geste, ça donne des rides ! Pensais-je. Je regarde le médecin attentivement, tout comme mes parents qui attendent n'importe quel constat de sa part. Je ne vois pas ce qu'il peut dire de toute façon... La blessure que je me suis faite à la tête au début de la catastrophe, je ne l'ai plus et le sang a dû sécher... Je ne me suis pas regardée dans une glace, mais je dois avoir une mine affreuse.

Héritières ~ TOME 1 ~ TerminéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant